La série F de Ford incarne le rêve de tout constructeur: un véhicule dont il vend, bon an mal an, plus de 900 000 unités. Voilà ce que fait Ford avec la Série F, et ce sur le seul continent nord-américain. Sûre de son étoile, la série F joue la carte de la continuité et de la discrétion. Bien entendu, cette camionnette diffère, et c'est tant mieux, de la génération précédente. Plus raffinée, elle fait aujourd'hui l'unanimité auprès des amateurs pour son allure nettement plus virile.

Ford Série F

La série F de Ford incarne le rêve de tout constructeur: un véhicule dont il vend, bon an mal an, plus de 900 000 unités. Voilà ce que fait Ford avec la Série F, et ce sur le seul continent nord-américain. Sûre de son étoile, la série F joue la carte de la continuité et de la discrétion. Bien entendu, cette camionnette diffère, et c'est tant mieux, de la génération précédente. Plus raffinée, elle fait aujourd'hui l'unanimité auprès des amateurs pour son allure nettement plus virile.

Dodge Ram Mega Cab

Tout le monde le sait: la famille Ram ne sera jamais en mesure de rivaliser au plan des ventes avec ses concurrents de GM ou de Ford. À défaut de les vaincre en nombre, la marque a toutefois donné à ses rivales, ces dernières années, des leçons de créativité en matière de style et de fonctionnalité. Après son étonnante métamorphose d'il y a 11 ans, le Ram est parvenu à séduire, notamment en raison de style attrayant, ceux qui avaient juré fidélité aux Séries F et aux produits GM. Les ventes de Ram ont d'ailleurs pratiquement quintuplé en Amérique du Nord au cours de cette période.

__________________

L'auteur tient à remercier Jean-François Guay, Jean Pendleton, Jacques Plante et les Carrières Bernier pour leur collaboration.

Sur la route

L'horreur (ou la beauté, c'est selon) du merveilleux monde de la camionnette, c'est la possibilité d'en commander une sur mesure. À moins de vouloir de quoi occuper vos soirées estivales ou de savoir exactement ce que vous recherchez, il y a de fortes chances que vous acquériez celle qui se trouve sur le terrain du concessionnaire de votre choix.

Conséquemment, vous l'aurez compris, il est impossible de passer en revue toutes les combinaisons proposées par ces camionnettes. Encore moins de porter un jugement définitif compte tenu des multiples combinaisons possibles. Par chance, pour ce match, nous disposions de trois véhicules assez similaires au chapitre des accessoires. Aussi et surtout, ils étaient tous les trois animés d'une mécanique turbo-diesel.

Avant de prendre la route, vaut mieux laisser certains de vos préjugés au vestiaire. Contrairement à leurs ancêtres, ces camionnettes ont été conçues de manière à procurer un certain agrément de conduite. Suspension sautillante, perte de motricité, tenue de cap aléatoire, bref ce comportement «caractéristique» d'une camionnette a été brillamment gommé, ou presque.

Au sujet du passé toujours, est-il besoin de souligner que la série F actuelle est plus massive - beaucoup - que la génération précédente? Cherchant presque à s'excuser de l'avoir engraissé de la sorte, les concepteurs ont tenté de faire valoir que cette augmentation de poids, bien que significative, aura des effets bénéfiques sur la rigidité du châssis. On veut bien le croire, mais il convient aussi d'ajouter que le poids entraîne inévitablement une consommation d'essence plus importante. D'ailleurs, le V8 6 litres turbo-diesel qui l'anime ne ménage pas le mazout qui flotte dans son immense réservoir, et sa voracité en hydrocarbures est comparable à celle d'un adolescent en pleine croissance: il consomme en moyenne 18,2 litres aux 100 km. Imaginez maintenant ce que cette série F peut consommer avec un moteur à essence... Puissant, ce 6 litres, malgré ses 325 chevaux, est incapable de rosser le 6 litres Duramax qui équipait le Silverado au chapitre des accélérations, des reprises et de la consommation. Mais le «Power Stroke» de Ford n'est tout de même pas une tortue. On sent bien que ce moteur en a lourd à tirer et ça s'entend. À ce chapitre, le «Duramax» de GM et le «Cummins» de Dodge font mieux. Beaucoup mieux. Si le moteur proposé par GM a offert, dans un sens large, les performances les plus éclatantes de ce match, aidé par une transmission à six rapports franchement onctueuse, il faut également saluer le rendement du Cummins qui, malgré ses deux cylindres en moins (oui, c'est un six cylindres!), fait un travail remarquable. Bien que plus bruyant que le Duramax, ce six cylindres parvient, malgré le poids élevé du châssis, à signer des reprises fort honorables. Il remporte aussi la palme au chapitre de l'économie avec une moyenne combinée de 16,8 litres aux 100 km. Sans doute aurait-il fait mieux encore si DaimlerChrysler avait greffé un ou deux rapports de plus à la boîte de vitesses.

Suspendu assez fermement, le Ram affiche un comportement routier rassurant (le sous-virage n'apparaît que très tardivement), mais on s'étonne surtout de la vitesse de passage en courbes particulièrement élevée pour un véhicule dont le centre de gravité se trouve à plusieurs centimètres du sol. Attention, cependant: la «bête» n'est pas faite pour la course et il importe en tout temps de ne pas transgresser les lois élémentaires de la physique. Par ailleurs, le Ram fait moins bonne impression lorsque la qualité de la chaussée se dégrade. La suspension arrière réagit en effet bêtement aux irrégularités de la route. Dans ce domaine, le Silverado fait bien meilleure figure. Ses éléments suspenseurs assurent un confort de roulement étonnant. Impressionnant! Autre motif d'enchantement, la rigidité et la qualité d'assemblage des modèles essayés. Aucun bruit de caisse, pas la moindre vibration. Seul le pilier du pare-brise fait siffler le vent. Quant à la série F, elle s'est avérée la plus épuisante des trois à conduire. D'accord, elle est stable, mais elle nous rappelle constamment qu'on ne doit ni la brusquer ni la traiter comme une «vulgaire» berline. Bref, cette camionnette manque de vivacité. Ce qui est imputable, sans l'ombre d'un doute, à son poids élevé, mais aussi à ses suspensions assez fermes (moins que celles de la Dodge cependant).

Compte tenu du gabarit imposant de nos trois protagonistes et de leur rayon de braquage, est-il besoin de rappeler que leur agilité en milieu urbain s'apparente davantage à celle d'un rhinocéros qu'à une gazelle? À moins de vouloir escalader les trottoirs, les petites rues étroites sont à éviter, tout comme les manoeuvres de stationnement dans les espaces restreints, au risque de causer bien des dégâts matériels. L'option d'un radar de stationnement, lorsqu'elle est offerte, est chaudement recommandée.

La direction à billes qui équipe les trois véhicules transmet timidement les informations au conducteur sur l'état de la chaussée et l'emplacement des roues directrices. Celle du Ram est apparue la plus précise des trois et, surtout, la plus correctement démultipliée.

Budget

Avant de compiler les notes, soulignons que le Dodge l'emporte dans la catégorie budget. Il empoche du même coup la victoire dans ce match, mais par une très faible marge. Sa valeur de revente est sans doute inférieure aux deux autres, mais le Ram Mega Cab offre une garantie plus étendue. Surtout, il offre un rapport qualité/accessoires/prix plus alléchant. Le Dodge est aussi celui qui propose un moteur diesel à meilleur prix, ce qui permet de le rentabiliser plus rapidement que les deux autres.

Néanmoins, le comportement routier encore très «camion» ainsi que la consommation d'essence importante de nos trois concurrentes risquent de déplaire à ceux qui, comme moi, n'ont pas à transporter quotidiennement des madriers et autres planches de contreplaqué. Et tout comme moi, peut-être n'avez-vous toujours rien compris aux motivations qui poussent chaque année des milliers de consommateurs à prendre le volant d'une camionnette...

Les forces en présence

Chevrolet Silverado

Dans sa forme actuelle, le Silverado est le doyen du groupe. Même s'il masque de plus en plus difficilement son âge, lui et son alter ego de chez GMC, le Sierra, tirent admirablement bien leur épingle du jeu face à la concurrence. La quatrième génération de cette camionnette arrivera à l'automne et se reconnaîtra à ses dimensions plus généreuses et à son allure plus musclée. Techniquement parlant, cette nouvelle mouture corrigera plusieurs faiblesses du modèle actuel (les freins arrière, pour ne nommer que celui-là) et bénéficiera de mécaniques à la fois plus puissantes et plus économiques.

Trop grands pour jouer aux camions dans le carré de sable? Les trois concurrentes de notre Match du mois ont tout de même de quoi vous rappeler de joyeux souvenirs...

Les camionnettes vous laissent indifférents? Rassurez-vous: moi aussi. Comme vous, j'ai peine à comprendre le (vif) intérêt des Nord-Américains pour ces véhicules. Pourtant, devant les statistiques, on peut se demander si nous ne sommes pas les seuls, sur ce continent, à nous désintéresser de cette catégorie qui fait pourtant le bonheur des constructeurs de plus en plus nombreux à en offrir.

À la réflexion, cependant, il y a de nombreuses raisons d'apprécier une camionnette: la benne (communément appelée «la boîte») accueillera sans broncher les blocs de béton nécessaires à la construction de votre nouveau patio, les feuilles de gypse destinées à l'aménagement du sous-sol, ou le vaisselier de grand-mère lorsqu'elle emménagera dans sa nouvelle résidence en juillet. Sans oublier les amateurs de sport, de chasse et de voyage qui tirent également grand profit de sa polyvalence et de sa robustesse.

Les raisons de détester les camionnettes sont tout aussi nombreuses: elles ont horreur des labyrinthes urbains et assèchent leur réservoir d'essence en un rien de temps; et, surtout, il faut un doctorat ès sciences pratiques et usuelles pour débrouiller leurs fiches techniques et les différentes options offertes. Et je vous prie de me croire, ce n'est pas de la tarte! Vous pourriez aisément consacrer un été complet à éplucher les brochures publicitaires des trois véhicules inscrits à ce match. Comme si ce n'était pas assez de devoir choisir la couleur et les garnitures intérieures, vous devrez également établir la longueur de benne désirée, la capacité de remorquage recherchée, et j'en passe. À cette étape, un conseil, un seul: assurez-vous de faire affaire avec un représentant qualifié, capable de configurer la camionnette recherchée en fonction de vos besoins actuels et futurs.

Toujours est-il qu'au Canada, la série F de Ford, le duo Silverado/Sierra de GM et le Ram de Dodge occupent le sommet des palmarès de ventes de sept provinces. Le Québec fait naturellement bande à part. N'empêche que plus de 25 000 camionnettes neuves prennent la route chaque année chez nous. Pourtant, plusieurs d'entre elles ne poseront jamais une roue sur un chantier de construction. Étonnant, non?

Tonka pour adultes

Longtemps emprisonné dans un conformisme poussiéreux, le segment des camionnettes trimbale depuis quelques années une benne débordante de nouvelles idées toutes aussi séduisantes les unes que les autres. Les sceptiques seront-ils confondus ?

On a peine à le croire et pourtant, selon plusieurs études, la vaste majorité des camionnettes qui sillonnent nos routes ne transportent ni madriers, ni blocs de béton, ni boîtes à outils. À quel usage les consommateurs destinent-ils la benne alors? Au transport des meubles que vous vous êtes procurés à une boutique d'antiquités, ou encore d'une motocyclette ou d'un tout-terrain. Chose certaine, 80% des propriétaires de camionnettes accordent peu ou pas d'importance à ladite benne, selon une étude réalisée par la firme américaine Polk. Autre statistique intéressante, à peine 5% des propriétaires conduisent leur camionnette hors des routes asphaltées. Conséquemment il faut chercher ailleurs - pas seulement sur les chantiers de construction et dans les régions rurales - ce qui séduit tant chez une camionnette.

Cela dit, si vous n'avez jamais pris place à bord d'un tel véhicule, vous serez agréablement surpris par les camionnettes réunies pour ce match. Elles n'ont rien de rustique, je vous prie de me croire. D'ailleurs, chacune offre une version endimanchée qui ferait rougir une automobile de luxe. Tout y est: système de divertissement, sellerie de cuir, sièges baquets chauffants, etc. La liste des accessoires est si longue qu'il vous faudra sans doute plusieurs heures pour la passer en revue.

Tour d'horizon

À tout seigneur tout honneur: commençons par la Série F. Ses portières s'ouvrent sur un environnement soigneusement fini où la qualité des matériaux et de l'assemblage nous font rapidement oublier les intérieurs souvent bâclés et rustres des générations précédentes. Baquets convenablement sculptés, position de conduite confortable, tableau de bord élégant, instrumentation complète et commandes bien disposées, cette camionnette nous fait découvrir, au fil des kilomètres, un habitacle à la fois moderne et convivial. Des reproches? La jante du volant est mince comme une feuille de papier, le coussin de la banquette arrière est ancré trop bas, et les espaces de rangement ne sont pas tous très pratiques dans le cadre d'une utilisation quotidienne. Cette dernière critique peut être atténuée à l'aide du catalogue d'accessoires, lequel propose notamment de pratiques espaces de rangement arrimés au pavillon.

Si la série F a d'aussi belles manières, une partie du mérite en revient à Dodge: le Ram, lors de sa mémorable refonte de 1994, a été la première camionnette de l'histoire à ouvrir toutes grandes ses portes à l'ergonomie, science qui effrayait certains esprits étroits qui imaginaient une machination susceptible d'émasculer l'apparente robustesse de leur véhicule. La génération actuelle fait honneur à la lignée. Les commandes sont parfaitement accessibles et l'instrumentation, couchée sur un fond blanc, parfaitement lisible. De plus, comme la série F, ce RAM XXL est doté d'un accoudoir central à usages multiples qui ne profite qu'aux droitiers. La présentation d'ensemble ne manque pas de fraîcheur ni de luminosité, même si les appliqués de faux bois sur le véhicule d'essai faisaient un peu kitsch. Hélas, comme chez ses deux rivales, la colonne de direction n'est réglable qu'en hauteur et les baquets en banquette offrent toujours aussi peu de maintien.

Quant au Silverado, force est de reconnaître qu'il dissimule plutôt mal son âge face à la concurrence. Son habitacle plus étriqué (même à l'arrière) que les deux autres plaira sans doute à ceux qui recherchent une ambiance plus intimiste, mais pour le reste... L'aménagement intérieur est correctement exécuté à condition d'aimer le plastique, seul maître à bord. On aurait souhaité plus de fantaisie, plus de couleurs. En revanche, le tableau de bord héberge une instrumentation complète très lisible et une foison de prises d'alimentation destinées à brancher tous les appareils nécessaires à la vie moderne. En raison de la position dominante qu'il occupe sur la route et de ses immenses rétroviseurs, le Silverado offre une excellente visibilité.