Les détaillants de motos font déjà les frais de la décision de la SAAQ d'augmenter les primes d'assurances et les permis de conduire. Même si le projet de la Société de l'assurance automobile du Québec fera l'objet d'une consultation publique à Montréal et à Québec au début du mois prochain, les salles de montre des concessionnaires se sont littéralement vidées.

Les détaillants de motos font déjà les frais de la décision de la SAAQ d'augmenter les primes d'assurances et les permis de conduire. Même si le projet de la Société de l'assurance automobile du Québec fera l'objet d'une consultation publique à Montréal et à Québec au début du mois prochain, les salles de montre des concessionnaires se sont littéralement vidées.

«On a rapporté une baisse de 40% des ventes de motos neuves au cours des trois premiers mois de l'année», explique Bernard Benoit, porte-parole de la Coalition moto, qui regroupe la Fédération de la moto du Québec, l'Association des marchands, le Conseil de l'industrie de la moto de même que le Comité d'action politique motocycliste. Les chiffres pour le mois d'avril ne sont pas encore disponibles, mais on peut s'attendre à une baisse semblable, de l'ordre de 20 à 30%, si l'on se fie à Michel Savard, copropriétaire de Moto Montréal. Or, plus de la moitié des motos sont vendues au Québec au cours des quatre premiers mois de l'année.

«Des détaillants vont souffrir, dans certains cas ça va être difficile, affirme M. Savard. Au milieu des années 80, le tiers des concessionnaires ont dû fermer à la suite d'une baisse draconienne des ventes de motos.»

Des dommages collatéraux insoupçonnés?

D'ici 2008, la SAAQ envisage en premier lieu de faire passer de 50 à 127 la prime d'assurance particulière prélevée au moment du renouvellement du permis de conduire des motocyclistes, même s'ils n'ont pas de moto. «On risque donc fort de voir des gens renoncer à leur projet de faire de la moto, affirme M. Benoit. D'autres motocyclistes occasionnels pourraient aussi choisir d'abandonner leur loisir.»

Ensuite, au niveau de l'immatriculation, on veut doubler la prime des motos dites régulières de plus de 700 cc alors pour les modèles sports de cylindrée semblable, on parle d'une augmentation frisant les 500%.

Pourtant, contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce ne sont pas les ventes de motos sport qui sont les plus touchées. «Les hausses considérables des primes d'assurances privées ont déjà eu leur effet sur les ventes de motos sport, soutient M. Savard. C'est la vente de motos de type custom qui est en chute libre, car ce sont surtout elles qui ont gonflé le marché au cours des dernières années.»

La chute du marché de la revente pourrait en effet être une autre conséquence des nouvelles directives envisagées par la SAAQ. «En 1987, une hausse de 40% des primes d'assurance avait fait chuté de 90 à 70 000 le parc de motos au Québec, soutient Bernard Benoit. Dans les quelques années qui ont suivi, un propriétaire d'une Honda Goldwing achetée 10 000 en 1986 avait de la difficulté à la vendre 2000.» Présentement, 141 000 motos sillonnent les routes du Québec.

Le milieu de la moto tente donc de faire l'impossible pour court-circuiter le mal appréhendé. Une grande manifestation est d'ailleurs prévue le 21 mai prochain à l'Hippodrome de Montréal, où l'on attend plus de 30 000 motocyclistes.

Par ailleurs, la Coalition moto entend aussi déposer un mémoire au conseil d'experts mandaté par le gouvernement lors de son passage à Montréal, du 8 au 10 mai prochains. «On veut démontrer qu'il existe des solutions plus équitables que celles envisagées par la SAAQ, explique M. Benoit. Entre autres, la tarification devrait, selon nous, être ajustée en fonction des conducteurs et non des machines.»

C'est d'ailleurs un point de vue qui semble faire l'unanimité. «La puissance des motos ne fait pas de différence pour quelqu'un qui est expérimenté, explique Tony Rodrigue, motocycliste depuis 14 ans. De plus, avec les hausses envisagées par la SAAQ, on risque de voir des jeunes qui vont enfourcher leurs machines sans les immatriculer pour ensuite commettre des délits de fuite.»

Michel Savard abonde dans le même sens. «C'est aberrant de laisser un jeune de 18 ans partir avec une -bombe?. Est-ce que je pourrais conduire une F1 demain matin? Non. Je ne vois donc pourquoi, du jour au lendemain, on pourrait mettre dans les mains d'un jeune sans expérience une moto sport qui était sur les pistes il y a deux ans à peine!»

Malgré un portrait de plus en plus sombre, M. Savard croit que la moto est là pour rester. «J'en ai vu des crises en 25 ans. Les gens vont choisir d'autres types de motos ou même aller vers les véhicules hors route.»

D'ici là, les détaillants vont continuer de prendre leur mal en patience pendant que les motocyclistes attendent de voir quelle tournure prendront les événements. Tout ce beau monde espère maintenant beaucoup du rapport du conseil d'experts, qui se remis le 19 juin à la SAAQ. À suivre...