D'un côté, l'industrie ne cesse de multiplier les modèles, tout en démultipliant, de l'autre, ses gammes grâce à l'utilisation de plateformes communes. Ce faisant, les constructeurs explorent ou créent de nouveaux créneaux et combattent ainsi une fatalité : «On ne peut pas plaire à tout le monde.»

D'un côté, l'industrie ne cesse de multiplier les modèles, tout en démultipliant, de l'autre, ses gammes grâce à l'utilisation de plateformes communes. Ce faisant, les constructeurs explorent ou créent de nouveaux créneaux et combattent ainsi une fatalité : «On ne peut pas plaire à tout le monde.»

Depuis quelques années, l'industrie automobile s'est lancée dans une course complètement folle: la diversité. Les gammes se sont étoffées de manière incroyable. Pour s'en convaincre, il suffit de rendre visite à un concessionnaire Mercedes-Benz. Pendant des décennies, la marque-phare du groupe DaimlerChrysler a vécu avec un éventail limité de produits. Aujourd'hui, Mercedes-Benz compte près d'une vingtaine de modèles de base, dont plusieurs se déclinent en plusieurs modèles (V8, V12, Diesel, AMG, etc.). Si mes calculs sont exacts, au cours des 15 dernières années, l'offre du constructeur germanique s'est élargit de 43 %. Je vous préviens tout de suite, je suis complètement nul en math, mais ça tourne tout de même autour de ça. Suivant la même méthode de calcul, le champion du monde de l'offre est aujourd'hui, pour la même période, BMW, avec une augmentation de 67% du nombre de carrosseries produites. Et que dire de Porsche qui comptera sous peu cinq modèles de base (911, Cayman, Boxster, Cayenne et Panama) ou encore de Jeep qui a plus que doublé sa gamme en quelques mois. En fait, nous pourrions pratiquement tous les nommer. Même Mini est appelée à se diversifier dans les prochains mois avec la Traveler. Seule exception pour confirmer cette nouvelle règle de l'industrie: Smart. Celle-ci recentre en effet ses efforts sur sa ForTwo. Pour le moment.

Ce besoin de se multiplier s'explique. La part de marché des modèles «traditionnels» (berlines, coupés, fourgonnettes, etc.) s'effrite. Celui des berlines surtout, qui, représentait autrefois le coeur de l'offre automobile. Cette évolution du marché s'est traduite par une hypersegmentation; les segments de niche d'alors sont en quelques années devenus des segments à part entière (fourgonnettes et utilitaires compacts, camionnettes compactes, etc.) et de nouveaux créneaux font leur apparition (Multi-segments, coupés-cabriolets, etc.). Ces nouvelles catégories ont un taux de croissance à deux chiffres et leur taille peut finir par dépasser celle de segments plus classiques. Chez Buick par exemple, l'arrivée prochaine de l'Enclave, un véhicule multi-segments, entraînera à terme la disparition du Rendez Vous, de la Terazza et possiblement aussi de la Rainier.

De nouvelles catégories naissent, mais plusieurs sous-catégories aussi. Aujourd'hui, pratiquement chaque catégorie se décompose en trois sous-segments: entrée de gamme, milieu et haut de gamme. Haut de gamme ? Bien sûr ! Le meilleur professeur de l'industrie dans ce domaine est sans doute BMW. Le constructeur s'est employé ces derniers temps à exploiter, avec succès, les parties haut de gamme des différents segments de marché, comme en fait foi le succès de la Mini.

Évidemment, la notion de catégorie, hier très claire, est plus floue. Oubliés les «trous» entre les petites et les moyennes, entre les intermédiaires et les «prestiges». Des «intrus» se sont insérés dans ces vides en s'inventant des noms: crossovers (multi-segments), near-luxury («luxe accessible»?), etc. Aujourd'hui, le nombre de segments est complètement dingue et je vous mets au défi de classer certains véhicules dans les catégories dites traditionnelles. Méchant casse-tête. Avant l'arrivée de la Kia Rondo, où classiez-vous la Mazda 5 ? Est-ce une compacte à portes coulissantes ou une fourgonnette en réduction ? Et la SSR ? Un cabriolet ou une camionnette ? Et le PT Cruiser ? Et la HHR ? Comment, vous avez déjà mal à la tête ? Une petite dernière: la Rabbit. C'est une compacte ou une sous-compacte ? Doit-on la définir en fonction de sa taille ou de son prix ?

Au bout du compte, cette fragmentation de l'offre a une conséquence de taille pour les constructeurs: celle de réduire les volumes unitaires de chaque modèle. Selon une étude mondiale sur le sujet, les volumes unitaires moyens ont baissé d'environ 20 %. On comprend alors mieux pourquoi l'utilisation exagérée (dans certains cas) d'une plateforme commune. Mais ça, c'est une autre histoire!

Pour joindre notre chroniqueur: eric.lefrançoislapresse.ca