«Mais on peut faire un suivi plus serré des gens qui perdent leur permis, pour éviter qu’ils sombrent dans la dépression et la sénilité.»

Retour en force

À la Fédération motocycliste du Québec, le porte-parole Normand Noiseux note que la motocyclette fait un retour chez les baby-boomers. «Ce sont souvent des gens qui ont gardé le droit de faire de la moto avec les vieux permis, dit-il. Ils ont l’impression qu’on conduit une moto comme une voiture, et partent sur la route sans suivre de cours.

«C’est en partie pour cette raison que la SAAQ veut obliger les détenteurs des vieux permis à choisir s’ils veulent faire de la moto ou non. Il faut se rappeler que les gens qui commencent à faire de la moto cessent en moyenne deux ou trois ans après.»

«On ne peut certainement pas laisser conduire des personnes âgées qui représentent un danger sur la route», commente Richard Marottoli, aussi professeur de gériatrie à l’Université Yale, et qui a fait une étude montrant que le fait de perdre son permis de conduire augmente de 2,5 fois l’intensité des symptômes dépressifs.

Par exemple, entre 1993 et 2003, la proportion de motocyclistes morts sur la route, dont le taux d’alcoolémie excédait 0,08, a chuté de moitié chez les moins de 45 ans, mais est restée presque stable chez les plus âgés.

Problème cognitif

«Je ne pense pas qu’il s’agisse d’un problème cognitif, dit le Dr Marottoli. On ne parle pas de personnes âgées, mais de personnes de plus de 45 ans. Il est possible que ce soit un phénomène de richesse soudaine d’une certaine portion de la population. Des gens qui n’ont jamais conduit de moto, et qui s’en achètent des grosses, des gens qui ont une vie sociale intense, avec de beaucoup de bons alcools. Il faut faire plus d’études pour mieux cibler ce sous-groupe, qui visiblement échappe aux efforts de prévention des autorités.»

Au Québec, le nombre de motocyclistes plus âgés a aussi augmenté plus rapidement que la moyenne. Les plus de 45 ans représentaient près de la moitié des propriétaires de moto en 2005, contre le tiers en 2000. Le nombre d’accidents a augmenté encore plus vite: la représentation des plus de 65 ans chez les victimes d’accidents de moto a doublé entre 2000 et 2005, alors que leur représentation chez les propriétaires de moto grimpait seulement d’un tiers.

En 2002, le gériatre américain Richard Marottoli a remarqué une curieuse tendance chez les motocyclistes américains: les conducteurs âgés de plus de 40 ans étaient responsables de l’essentiel de l’augmentation de mortalité.

De plus, l’alcool au volant reste un problème chez les motocyclistes «âgés», qui semblent insensibles aux campagnes publicitaires.

«Je suis de loin le dossier depuis que j’ai remarqué cette tendance, et les chiffres se confirment, explique le chercheur de l’Université Yale. Il y a de plus en plus de motocyclistes âgés, qui ont de plus en plus d’accidents. Et l’alcool au volant demeure un problème dans ce groupe, contrairement aux autres tranches d’âge qui ont connu des baisses substantielles de l’alcoolémie.»