Rouler sur une moto unique. Certaines personnes vont dépenser des milliers de dollars pour personnaliser leur moto afin qu'elle ne ressemble à aucune autre. Peinture, dessins, modifications esthétique et mécanique, on ne recule devant rien pour se faire remarquer.

Rouler sur une moto unique. Certaines personnes vont dépenser des milliers de dollars pour personnaliser leur moto afin qu'elle ne ressemble à aucune autre. Peinture, dessins, modifications esthétique et mécanique, on ne recule devant rien pour se faire remarquer.

Pierre Trudel, des Ateliers Peinturopro, à Québec, travaille actuellement à la transformation complète d'une Honda VTX 1300. Une fois achevée, la moto vaudra 34 000$. À sa sortie du concessionnaire, elle en valait 10 000$. «Tout a été démonté. Toutes les pièces de métal ont été chromées, explique M. Trudel. Les cylindres ont été peints, le réservoir a été allongé, les ailes ont été moulées. Les mais des roues ont été faits sur mesure. Finalement, j'ai peint un crocodile qui s'allonge de l'aile arrière à l'aile avant de la moto, en passant par le réservoir et le siège, qui a été conçu pour imiter la peau du reptile. C'est une véritable oeuvre d'art.»

Le client avait d'abord évalué son budget à 9000$ Mais il a posé à M. Trudel la question qui tue: «Qu'est-ce que tu ferais de plus?» La facture a bondi à 24 000$!

Christian Fafard, de Tas Créations artistiques, a poussé l'audace jusqu'à reproduire de la rouille et du métal usé. «Un client avait acheté une vieille Harley-Davidson des années 40 et, après l'avoir restaurée, il m'a demandé de reproduire la rouille comme s'il s'agissait d'une moto d'époque que l'on venait de retrouver au fond d'une grange. La bécane s'est retrouvée dans les pages d'une revue spécialisée en Europe!

«Les gens veulent faire ressortir leur personnalité à travers leur moto, poursuit M. Fafard. J'ai vu une quinzaine de clients arriver avec des motos flambant neuves qui n'avaient même jamais roulé et qui voulaient les faire modifier à leur goût.»

Pierre Trudel abonde dans le même sens. «Pour bien des motocyclistes, leur bécane est comme un jouet, un objet de fierté. Ils aiment attirer l'attention. Pour eux, c'est même choquant de retrouver une moto pareille à la leur.»

Des clients célèbres

La clientèle des deux artistes est presque essentiellement constituée de propriétaires de motos customs âgés de 30 à 65 ans.

M. Trudel a notamment travaillé sur les motos de Marcel Aubut et de Guy Lafleur. «Guy voulait se voir dans l'uniforme des trois équipes pour lesquelles il a joué: le Canadien, les Rangers et les Nordiques. Il voulait aussi qu'on voie sur sa moto une photo de lui alors qu'il était pee-wee à Thurso. Enfin, il voulait qu'on retrouve une référence aux cinq Coupe Stanley qu'il a remportées.» La moto était jusqu'à tout récemment exposée à l'entrée du restaurant Mikes du Démon blond, à Berthierville.

C'est en travaillant sur leurs propres bécanes alors qu'ils étaient adolescents que les deux artistes ont eu la piqûre. La suite est une affaire de passion.

«J'aurais aimé être peintre, mais quand la peinture automobile est arrivée, j'ai tout de suite compris, explique M. Fafard. J'ai réussi à combiner mes deux passions.» Il fait aujourd'hui entre 60 et 80 créations par année, surtout l'hiver. «L'été, je me garde du temps pour rouler», précise-t-il.

M. Trudel, lui, personnalise de 120 à 125 motos par année, dont deux ou trois projets d'envergure. Lui aussi profite de la période hivernale pour abattre l'essentiel de sa besogne. Du lundi au samedi, il entre dans son atelier à 8h pour n'en sortir qu'à minuit. L'été, il répare et repeint des motos accidentées.

Les deux hommes en font leur métier depuis plus de 25 ans. Ils ont vu les technologies s'améliorer sans cesse, les motos sont de plus en plus belles et les clients sont de plus en plus émerveillés quand vient le temps d'aller récupérer leur bécane devenue oeuvre d'art.

«J'aime mon travail. Quand je remets une moto à un client, les yeux pétillants, les sourires, les poignées de main, c'est ça qui m'allume», dit M. Fafard.

«Quand je vois les clients bouche bée devant leur moto et que moi, je vois encore des choses à améliorer, je sais que ce n'est pas de la folie mais bien une maladie, rigole M. Trudel. Je vais mourir avec mon pistolet à peinture dans les mains!»

C'est d'ailleurs un souhait qu'il a inscrit dans son testament.