Tout le monde en rêve, mais bien peu de gens l’achètent. Alfa Romeo a dix ans pour devenir profitable. Faute de quoi, le groupe Stellantis arrêtera les frais.

Quatorze marques composent aujourd’hui Stellantis. Carlos Tavares, chef d’orchestre du groupe franco-italo-américain, ne voit pas la nécessité d’en supprimer une seule. Pas tout de suite. M. Tavares vénère leurs histoires et estime qu’elles méritent toutes de survivre pour peu qu’elles demeurent pertinentes et rentables. Voilà pourquoi il leur donne, à chacune d’elles, 10 ans pour s’exprimer et atteindre des objectifs précis. Y compris Alfa Romeo.

La marque italienne impose le respect, suscite l’envie, mais ne vend pas beaucoup de véhicules. Un peu plus de 60 000 unités ont trouvé preneurs dans le monde au cours de la dernière année. Les temps sont durs pour Alfa Romeo. La firme milanaise n’a plus les moyens d’attendre de la clientèle qu’elle courtise son Romeo. Elle perd beaucoup d’argent et rate les cibles qu’elle s’est elle-même fixées. Pour se lancer aux trousses des constructeurs allemands, la « bella macchina » de Milan doit sortir de sa marginalité et démontrer qu’elle mérite de graviter dans la galaxie Stellantis.

Il nous reste aujourd’hui neuf ans pour faire valoir notre pertinence.

Vincent Noirbent, directeur d’Alfa Romeo pour l’Amérique du Nord

Après une première année à comprendre les forces et les faiblesses de la marque, l’état-major d’Alfa Romeo se dit prêt à tourner la page.

« Notre mission consiste à redéfinir la marque tout en préservant la passion que l’on retrouve dans son ADN », insiste M. Noirbent.

Alfa Romeo entend mieux exploiter le capital de sympathie dont elle bénéficie pour séduire de nouveaux consommateurs. Mais l’héritage de cette marque plus que centenaire et sa sportivité ne suffiront pas, reconnaît Vincent Noirbent. « Nous devons tabler sur ces aspects certes, mais nous devons également recruter une clientèle nouvelle et accélérer notre transition vers l’électrification de nos propulseurs. À ces éléments, nous devons ajouter la qualité et la fiabilité de nos produits et sur ce point, notre président, Jean-Philippe Imparato, a été très clair, celle-ci doit être équivalente à celle d’une Lexus. »

La table est mise.

Coller aux attentes du client

Tout en préservant son tempérament enflammé et sa part de romantisme, le plan produit d’Alfa Romeo se doit d’être également plus réaliste qu’à l’époque où elle était administrée par le regretté Sergio Marchionne. Ce dernier visait alors un objectif de production de 500 000 unités et avait aussi pour ambition de mettre en chantier le retour du coupé GTV ou encore la renaissance d’une sportive 8 C. Deux projets qui ne collaient pas avec les réalités du marché. Seule l’idée d’un utilitaire compact lui a survécu.

Présenté sous forme d’une étude conceptuelle au Salon de Genève 2019, le Tonale entreprend cette année une carrière commerciale. Attendu au cours du premier trimestre de 2023, cet utilitaire disposera d’une version hybride rechargeable. Ce nouveau modèle dessine une génération de voitures qui, n’en déplaise au noyau dur des alfistes, cherche à relancer la marque en attaquant des segments populaires, mais hautement compétitifs. Il permet aussi de reconstituer très rapidement un catalogue Alfa Romeo. Et à peu de frais puisque le Tonale puise dans l’immense réservoir de composants du groupe. Ainsi, le futur modèle d’entrée de gamme d’Alfa Romeo repose sur le châssis existant (nom de code SCC pour Small Common Components and Systems Platform) dont font notamment usage les Fiat 500X, Jeep Renegade et Compass.

En attendant le Tonale, Alfa Romeo laisse courir la rumeur d’un utilitaire plus petit encore pour 2024 et d’un autre VUS, l’année suivante, beaucoup plus massif que l’actuel Stelvio. Ce dernier sera destiné aux marchés chinois et nord-américain. À cela s’ajoute bien sûr la renaissance de la mythique Spider ? Vincent Noirbent sourit et ne dira rien des produits futurs de la marque si ce n’est qu’un premier véhicule entièrement électrique effectuera ses débuts en 2025.