Les États-Unis viennent sans doute de faire un pas de plus vers l'installation obligatoire de modules contenant un enregistreur de données d'événements (EDR). Un projet de loi en ce sens a été présenté au Congrès mercredi. Le Canada suivra-t-il?

Le sénateur démocrate de l'État du Nouveau-Mexique, Tom Udall, a présenté les grandes lignes de ce qu'il appelle la Loi sur l'amélioration de la sécurité des véhicules. L'exigence première de celle-ci est que «toutes les automobiles vendues aux États-Unis soient équipées d'un EDR». Ce qui n'est pas le cas actuellement en Amérique du Nord.«Les enregistreurs de données d'événements ne préviendront pas les accidents, conçoit le sénateur. Mais ils aideront à déterminer ce qui a causé un accident et, dans le cas d'un défaut sur un véhicule, aideront à identifier des solutions pour améliorer sa performance. Les données qu'ils fournissent serviront à avoir un environnement plus sûr pour tous.»

Depuis plusieurs années, les constructeurs intègrent au module de déploiement du coussin gonflable - qui contrôle ce déploiement - un enregistreur de données d'événements (ou EDR, pour event data recorder). Le module est alors capable de fournir la vitesse, le régime du moteur, le pourcentage de dépression de l'accélérateur, le degré d'enfoncement de la pédale de frein, le nombre de fois où le moteur a été démarré et l'information selon laquelle la ceinture était bouclée ou non, le tout dans les cinq secondes précédant l'impact. S'il n'y a pas de collision, il n'y a pas de données d'enregistrées. Contrairement aux boîtes noires des avions, le trajet complet et les conversations à bord ne sont pas enregistrés.

La grande majorité des véhicules qui sortent des usines aujourd'hui ont un module de coussin gonflable comprenant un EDR. Pour déterminer les causes d'un accident, les autorités peuvent utiliser ce module ainsi équipé. Mais encore faut-il pouvoir lire les données qu'il contient. On dispose de lecteurs pour les véhicules américains, mais pas nécessairement pour les marques japonaises et européennes. «Durant les auditions des dirigeants de Toyota devant le comité du commerce, de la science et du transport, nous avons appris que bien que les Toyota étaient équipées d'EDR, ces enregistreurs ne pouvaient jusqu'à tout récemment être lus que par un seul ordinateur dans tous les États-Unis», a rappelé Tom Udall dans sa présentation du projet de loi.

C'est pourquoi, le deuxième volet de cette législation, si elle est adoptée, exigera que ces EDR puissent être lus par «un outil universel sans distinction de la marque ou du modèle du véhicule». Cette mesure rappelle la volonté récente de la National Highway Transportation Safety Administration d'imposer aux constructeurs la commercialisation d'un tel lecteur d'ici 2012.

Tom Udall souhaite que l'installation obligatoire de modules équipés d'EDR sur tous les véhicules légers soit effective dans les trois années suivant la promulgation de cette loi projetée. Pour les véhicules les plus lourds (8500 livres et plus), le délai serait de sept ans.

Le sénateur démocrate a appelé ses «collègues du Sénat à se joindre à cet important effort d'amélioration de la sécurité des automobiles». Il souhaite voir cette loi adoptée cette année. Mais rien n'est sûr.

Du côté des constructeurs, General Motors a pour l'instant été le seul à réagir officiellement, apportant son soutien à ce projet de loi.

Ce projet américain suit le dépôt à Ottawa, le 19 avril dernier, d'un projet de loi privé exigeant des constructeurs de faire preuve de plus de transparence lorsqu'un problème de sécurité est détecté. Parmi les amendements à la Loi sur la sécurité automobile proposés, le projet du député néo-démocrate Jim Maloway considère également que l'information contenue dans les modules de coussin gonflable dotés d'un EDR doit être facilement accessible pour la lecture et l'analyse.

Si ce projet de loi se concrétise aux États-Unis, le Canada suivra-t-il?

Pour Christian Navarre, professeur à l'École de gestion de l'Université d'Ottawa, «cela paraît inéluctable».

«Tout est là pour le faire et cela ne coûterait pas cher. Pour un constructeur, c'est dérisoire en terme de coûts et il n'y a pas d'obstacles techniques. Mais cela soulève un gros problème de vie privée», estime ce spécialiste de l'industrie automobile.

Transports Canada n'a pu commenter ce projet de loi américain, n'en ayant pas pris connaissance au moment où nous écrivions ces lignes.