Pour beaucoup d'écologistes, la fin de l'ère du pétrole est synonyme de la disparition de l'automobile. Moins de stations service, plus de trains, tramways et métros à gogo, et des kilomètres de rues piétonnes.

Pas si vite, disent cependant deux journalistes du mensuel The Economist. Dans leur livre Zoom, ils admettent que la consommation de pétrole ne pourra pas continuer à augmenter indéfiniment. Mais ils considèrent que l'automobile est trop pratique pour disparaître.

 

«C'est dommage pour les gens qui détestent les automobiles, mais la fin du pétrole ne signera pas l'arrêt de mort de la voiture», a expliqué, en entrevue depuis Londres, l'un des coauteurs, Iain Carson. «Les transports en commun ne peuvent tout simplement pas remplacer totalement les déplacements individuels. Et du point de vue du transport des marchandises, le camion est tout simplement indispensable sur les derniers kilomètres.»

 

L'idée du livre est venue à M. Carson après une discussion avec l'ancien président de Ford, Alex Trotman (décédé en 2005). «C'était un Écossais comme moi, alors nous avons eu des discussions à bâtons rompus.

 

Une fois, il s'était plaint du fait que l'industrie automobile est tenue responsable de tous les maux environnementaux. Alors qu'en fait, le problème, c'est le pétrole. En y réfléchissant bien, et en discutant avec mon collègue qui couvre l'industrie du pétrole, la pertinence d'un livre est devenue évidente. Nous avons même découvert que Jane Jacobs, la grande ennemie de la banlieue, ne tenait pas l'automobile responsable du déclin des centres-villes.»

 

Pour faire le point

Le livre ratisse large, et parvient à faire le point sur plusieurs aspects du débat. Tout d'abord, on apprend que les premières voitures étaient à 90% électriques. Henry Ford a même acheté une voiture électrique à sa femme en 1908.

 

Le premier brevet de moteur hybride à l'électricité et à l'essence date de 1905. Il a fallu l'apparition du démarreur électrique, en 1912, pour que le moteur à essence se démarque définitivement. Auparavant, on devait tourner une manivelle, une opération éreintante et souvent dangereuse. Le recul soudain a cassé bien des bras.

 

Zoom fait aussi le procès des partisans du «pic du pétrole «, qui préviennent que d'ici peu, la production d'or noir va nécessairement chuter faute de nouvelles découvertes de gisements. «Quand on assiste à leurs réunions, on dirait qu'on se trouve en présence d'anciens alcooliques, ou de revendeurs de drogue repentis, dit M. Carson. Ce sont très souvent d'anciens membres de l'industrie pétrolière. Ils font montre d'une émotion messianique.

 

Ils ignorent totalement les gisements de pétrole non conventionnels, et les avancées de la technologie d'exploitation des puits. De toute façon, je ne pense pas qu'on ait besoin de prédire un pic de pétrole pour chercher à remplacer l'essence comme carburant automobile. Les sables bitumineux de l'Alberta, par exemple, vont durer longtemps, mais ils sont extraordinairement polluants. Ça ne peut tout simplement pas durer.»

 

Les journalistes sont toutefois optimistes. M. Carson note que les gains d'efficacité des moteurs hybrides n'ont pas été entièrement utilisés pour augmenter la puissance de moteurs, contrairement aux améliorations des 20 dernières années. «Je ne comprends pas ceux qui s'indignent de retrouver un moteur hybride dans un 4X4. C'est tout de même mieux qu'un moteur à essence conventionnel. Le 4X4 Lexus hybride, par exemple, n'a pas plus de puissance que la version normale.»