En matière d'évaluations, celle de la R1200GS 2010 ne semblait décidément rien réserver d'extraordinaire. Le réputé modèle reçoit bien, cette année, une variation de la mécanique dont est dotée la HP2 Sport - rien de moins que la plus puissante monture à moteur Boxer de l'histoire de la marque de Munich - ainsi que certaines options fort intéressantes, comme l'ajustement de suspension électronique (Enduro ESA) et l'antipatinage (ASC). Mais de là à la qualifier, comme BMW le fait, de nouveauté, il y a peut-être une marge...

Le fait que la dernière R1200GS soit davantage une évolution qu'une nouveauté n'a pas empêché le constructeur d'organiser une impressionnante présentation en son honneur, la presse spécialisée ayant en effet été réunie dans un magnifique hôtel perché au beau milieu de la Sierra National Forest, en Californie, à 5000 pieds d'altitude. Au-delà des routes sinueuses et des sentiers montagneux prévus au menu, l'itinéraire comportait même une balade dans le majestueux parc national de Yosemite. Bref, vraiment «nouvelle» ou pas, le constructeur avait clairement choisi d'épater la galerie en mettant le paquet. Et cette galerie, fut-elle épatée?

Ça dépend. S'il est purement question des améliorations techniques apportées à la version 2010 de la vénérable R-GS, la réalité est qu'on a bel et bien affaire à une évolution. Les nouvelles options (l'Enduro ESA permet d'ajuster par la simple pression d'un bouton les suspensions afin de les adapter au type de conduite, de route et de charge, tandis que l'ASC empêche la roue arrière de patiner sur un revêtement glissant) fonctionnent bien, mais elles représentent davantage un luxe auquel on finit par s'attacher que des caractéristiques indispensables.

Quant à la nouvelle mécanique, même si elle provient d'un modèle sportif beaucoup plus rapide, elle est dans ce cas calibrée de manière à bien correspondre à la personnalité et à la nature d'une monture comme la R1200GS. L'augmentation de 5% de la puissance est notable puisqu'elle se traduit par une impression de performance légèrement accrue à tous les régimes, tandis que de façon générale, le Twin Boxer allemand semble plus raffiné grâce à une sonorité à la fois plus profonde et plus propre, celle-ci étant désormais exempte d'un tas de bruits parasites.

Est-ce suffisant pour justifier la vente d'une 2009 et sa mise à jour par une 2010? En un mot, non.

Cela dit, d'autres aspects de la R1200GS 2010 s'avèrent extrêmement impressionnants, et pour les apprécier, un retour sur la «luxurieuse» présentation du modèle est nécessaire.

En plus d'inclure de nombreux kilomètres de sentiers montagneux parfois très abîmés, celle-ci s'est déroulée dans sa presque totalité sous une pluie littéralement diluvienne et à des températures à peine au-dessus du point de congélation. Or, en raison des changements d'altitude considérables, cette pluie s'est changée en forte averse de neige. En plus de la combinaison de routes de montagne particulièrement serrées au froid et à la pluie, nous avons donc en plus dû composer avec une accumulation de bonne vieille «slush» au sol...

Certains journalistes - des Californiens... - ont tout simplement refusé de rouler dans ces conditions. Parmi ceux qui ont décidé de poursuivre, dont l'auteur de ces lignes, plusieurs ont frôlé l'hypothermie et tous ont dû faire un long, très long détour, gracieuseté du zèle d'un State Trooper qui a refusé catégoriquement de laisser passer quiconque n'était pas équipé de pneus à chaînes. «But sir, these are motorcycles...» D'autres, afin d'éviter le détour, ont opté pour un «raccourci par les sentiers». Au moment de quitter la scène le lendemain, ils n'avaient toujours pas été revus.

Si l'énoncé de toutes ces circonstances est dans ce cas nécessaire, c'est que malgré des conditions qui auraient essentiellement été catastrophiques pour à peu près n'importe quelle routière sur le marché, la R1200GS - qui était équipée de pneus à crampons, il faut quand même le dire - a non seulement su nous garder «debout» peu importe l'humeur de Dame Nature, mais elle a aussi ramené à bon port tous ceux qui lui ont donné la chance de le faire. Il s'agit probablement de la randonnée la plus difficile en termes de conditions climatiques qu'il ne m'ait jamais été donné de faire.

Le fait que la R1200GS se soit avérée une compagne de route aussi solide dans ces circonstances représente la plus grande démonstration de l'immense compétence de ce modèle et ce, sans égard aux améliorations de 2010 ni à la «luxurieuse» présentation. Je n'arrive tout simplement pas à penser à une seule autre moto sur laquelle j'aurais préféré me trouver pour vivre une telle aventure.

FICHE TECHNIQUE

Marque: BMW

Modèle: R1200GS

Prix: 17 650$

Garantie: 3 ans/kilométrage illimité

Moteur: bicylindre Boxer DACT de 1170 cc refroidi par air et huile

Transmission: à 6 rapports, entraînement final par cardan

Poids en ordre de marche: 229 kg

Frein avant: 2 disques avec étrier à 4 pistons

Frein arrière: 1 disque avec étrier à 2 pistons

Pneu avant: 110/80-19

Pneu arrière: 150/70-17

Bertrand Gahel est l'auteur du Guide de la moto.

Les frais de transport et d'hébergement ont été payés par BMW.

Photo fournie par BMW

C'est au guidon de la R1200GS que notre chroniqueur a fait la randonnée la plus difficile de sa carrière en termes de conditions climatiques.