Moteur diesel pas cher : la prochaine Mazda6 lance un défi à l'hybride

Audi n'est pas le seul constructeur automobile sceptique devant l'hybride et l'électrique. Mazda, comme Audi, pense qu'elle va faire beaucoup de millage avec des voitures diesel modernes, peu polluantes, moins chères.

Mazda prépare pour 2012 une berline intermédiaire roulant au diesel et brûlant seulement 5,47 L/100 km. C'est dans la même gamme que la Prius (5,11 L/100 km); la grande différence sera le prix, qui sera beaucoup plus bas, promet Mazda.

 

Le nouveau moteur diesel devrait être étrenné sur la Mazda6 de prochaine génération, affirme le quotidien Detroit News.

 

Au magazine de l'Union américaine des consommateurs, Consumer Reports, on estime que c'est une annonce importante: «C'est une grosse nouvelle. On a besoin de voitures légères au diesel, qui ne coûtent ni cher en carburant, ni à l'achat, affirme Jake Fisher, ingénieur chargé des essais chez Consumer Reports. Volkswagen en a, mais on dirait que tous les autres constructeurs ont peur du diesel, aux États-Unis. C'est formidable que Mazda se lance dans la mêlée.»

 

Audi aussi mise sur le «diesel propre», mais elle oeuvre dans le haut de gamme. Ses berlines sont peut-être économiques en essence, mais elles sont certainement disqualifiées si on cherche une voiture «qui ne coûte pas un bras à l'achat», comme dit l'ingénieur Fisher.

 

Mazda fait toujours à sa tête

 

Mazda, cinquième constructeur japonais, n'a jamais eu peur de sortir des sentiers battus et de faire le contraire des autres compagnies. Qui d'autre met encore des moteurs rotatifs dans ses voitures? Comme le fait remarquer le Detroit News, les meilleurs coups de Mazda viennent «quand elle fait zig, alors que le reste de l'industrie fait zag.»

Sa nouvelle berline avec le moteur Sky-D a l'air empreinte du même esprit de contradiction: lors du récent Salon de l'auto de New York, le patron de Mazda, Takashi Yamanouchi, a raconté qu'il a décidé de lancer le nouveau moteur diesel Mazda en Amérique du Nord tout récemment, quand il a appris que ni Toyota ni Honda n'allaient lancer de berlines diesel de ce côté-ci du Pacifique.

 

«Ça nous donne une énorme opportunité. On est capable de fournir une performance énergétique similaire à celle de l'hybride, à moindre coût, a dit M. Yamanouchi au Detroit News. Ça va probablement rendre inutiles plusieurs hybrides.»

 

L'efficacité énergétique des moteurs diesel a toujours été meilleure que celle des moteurs à essence. Mais les diesels coûtent plus cher, parce qu'il faut un dispositif pour capturer les oxydes d'azote produites en abondance. Mazda dit avoir repensé le moteur diesel pour éviter ce problème. «En général, les motoristes cherchent à augmenter le rapport de compression des diesels. Mais en étudiant la combustion, on a découvert qu'il vaut mieux réduite le rapport de compression. Ce faisant, on réduit de beaucoup l'émission d'oxydes d'azotes. Le mélange combustible-air brûle plus proprement, alors pas besoin d'un traitement post-combustion aussi intensif. Ce qui veut dire, un moteur moins cher.»

 

Comme le procédé est breveté, la concurrence ne pourra pas facilement riposter à cette technologie. Pour le moment, cela laisse Mazda avec un seul concurrent déjà engagé sur la voie de la voiture diesel bon marché, Volkswagen, avec sa Jetta TDI. Et comme Mazda estime que son diesel aura une meilleure performance que celui de la Jetta, M. Yamagouchi dit que «ça nous procure une opportunité énorme».

 

Les Américains face au moteur diesel: «Bof...»

 

Mais les Américains ont toujours été indifférents aux moteurs diesels et il n'est pas certain qu'il y ait un marché très important pour un tel produit, surtout que l'écart de prix entre l'essence et le diesel se ferme. Le moteur diesel d'antan, avec son bruit caractéristique, a créé une perception négative durable aux États-Unis et au Canada, dans une moindre mesure.

 

On les voit encore comme sales, bruyants, chers et pépères, ce qui n'est plus vrai des moteurs récents. Volks et sa marque haut de gamme Audi ont trouvé un petit créneau de clients, en Amérique du Nord, qui apprécient autant les économies de carburant du diesel que ses vertus environnementales.

 

Volks et Audi pensent que le diesel va continuer de faire de nouveaux adeptes (le marché des voitures diesel nord-américain est inférieur à 4%). Le patron d'Audi aux États-Unis a même décrit la Chevrolet Volt comme une voiture «d'idiots», affirmant que le prix exorbitant (40 000$) de cette berline intermédiaire n'avait aucun sens lorsque comparé à la performance; l'économie et la qualité qu'on peut acheter pour 15 000$ de moins.

 

En 2009, l'Audi A3 TDI a gagné le prix Voiture verte de l'année; cette année, c'est la famille Blue Motion (Golf, Passat, Polo) de Volkswagen. Mais plusieurs experts américains notent que le diesel, jadis roi incontesté des routes européennes, s'est fait rattraper par le moteur à essence. Jim Hall, un consultant américain, note que les ingénieurs automobiles ont trouvé toutes sortes de façons de tirer plus de kilomètres d'un litre d'essence. Si bien que les deux technologies sont maintenant nez-à-nez en Europe.

 

Pas assez zoum-zoum?

 

Hall est aussi sceptique face aux affirmations de Mazda: il pense qu'un diesel sans turbocompression est condamné à être un peu «vache», comme on dit au Québec. Pas bon pour une compagnie comme Mazda, dont la publicité cultive depuis des années sont image «zoum-zoum».

 

Chez Mazda, on assure que le moteur Sky-D a un couple élevé et en masse de punch. Il est possible que Mazda l'offre dans la majorité de ses modèles, avec le temps. En un coup et à peu de coûts, Mazda aurait ainsi adapté toute sa production aux nouvelles normes d'économie de carburant adoptées par le gouvernement fédéral américain. Tous les constructeurs devront d'ici 2016 offrir une gamme de véhicules faisant en moyenne 35,5 milles au gallon (consommant 6,72 litres/100 km).

 

On se retrouve donc devant une alternative classique: la technologie est là, reste à savoir si le client en veut.

 

Sources: Detroit News; Consumer Reports.