Algues, soleil, beurre, peuplier: les sources de carburant de l'avenir sont multiples et inusitées. Aux quatre coins du monde, des chercheurs planchent sur le successeur du pétrole dans les stations-services. Mon Volant vous présente au cours des prochains jours un portrait des recherches dans le domaine, dans la foulé du récent Congrès mondial de l'énergie. Aujourd'hui, le biodiesel issu des résidus alimentaires.

Chaque année, la foire agricole de Pennsylvanie, qui a lieu à Harrisburg, fait un concours de sculptures de beurre. En 2007, le gagnant avait façonné une statue de Benjamin Franklin et de la «Liberty Bell», qui a sonné tout juste après la proclamation de la Déclaration d'indépendance des États-Unis en 1776 à Philadelphie.

Soucieux de ne pas prêter le flanc à des accusations de gaspillage, les organisateurs de la foire ont demandé publiquement des suggestions pour utiliser de manière productive les 800 livres de beurre de la statue gagnante. Michael Haas, biochimiste au ministère de l'Agriculture des États-Unis, a répondu à l'appel.

En juin dernier, M. Haas a publié le résultat de ses efforts dans le Journal of Agricultural and Food Chemistry. Le biochimiste de Pennsylvanie a transformé le beurre en 150 litres de biodiesel.

«Je ne pense pas que le beurre soit une solution d'avenir pour le biodiesel, explique M. Haas en entrevue téléphonique. C'est un intrant beaucoup trop dispendieux. Mais notre démonstration illustre les progrès de la fabrication de biodiesel à partir de gras alimentaires. Si on transformait toutes les eaux usées graisseuses des usines et des restaurants américains en biodiesel, on pourrait produire près de 3 milliards de litres par an.»

Cela augmenterait du quart la production américaine de biodiesel, mais ne remplirait que 10% de la demande en diesel. Au Canada, la capacité de production de biodiesel est inférieure à 150 millions de litres par année, ce qui inclut une capacité de 35 millions de litres d'une usine de production à Montréal par une filiale de Maple Leaf utilisant des rebuts d'usines d'équarrissage.

Le biochimiste Haas travaille depuis 2005 de concert avec Blackgold, société qui veut elle aussi tirer profit des résidus de l'industrie alimentaire. «L'objectif est d'utiliser le gras emprisonné dans les filtres des restaurants. Des lois interdisent dans toutes les grandes villes d'envoyer les résidus de cuisson dans les conduites d'eau, parce qu'ils contiennent trop de graisse et peuvent boucher les canalisations d'égout. Plusieurs fois par année, les restaurants doivent payer des sociétés spécialisées pour dégraisser les filtres à eaux de cuisson. Beaucoup ne le font pas, ce qui cause des problèmes d'égouts. En réutilisant la graisse de cuisson pour faire du biodiesel, on pourrait éviter des coûts aux restaurateurs et des bris de conduites.»

Blackgold a reçu un contrat de la Ville de San Francisco pour construire une usine de ce genre. «Normalement, l'usine commence sa production cette année», dit M. Haas.