Sergio Marchionne a de la broue dans le toupet. Il travaille sept jours sur sept et même ce «travailcolique» notoire admet qu'il ne pourra pas continuer indéfiniment à tenir deux jobs inhumains, à la tête de Chrysler et de Fiat.

M. Marchionne vit dans sa valise entre les États-Unis et l'Italie: à Detroit, il donne le bouche-à-bouche au moribond Chrysler, tandis qu'à Turin, il guide à travers la récession Fiat, le constructeur automobile sur lequel il a déjà réussi un miracle.

 

Il cumule les postes de présidents des deux firmes depuis juin dernier, quand Fiat a pris le contrôle de Chrysler, une reprise de faillite. Ça fait beaucoup d'ouvrage et il y a des limites au travail qu'on peut faire dans la limousine et dans l'avion.

 

Ça chauffe sous le capot

 

Voici ce qu'il a dit au quotidien Detroit Free Press récemment: «Ça ne peut pas durer éternellement. D'ici 24 mois, c'est sûr qu'on va trouver une solution plus permanente ici ou là-bas. Je ne menace pas l'autre bord de quitter l'Italie, mais il faut trouver une solution.»

 

Pour le moment, en tout cas, le lapin Energizer de l'industrie automobile garde les deux jobs: «Je suis le seul qui peut garantir le transfert de technologies» entre Fiat et Chrysler, dit-il. Chrysler a besoin d'une transfusion sanguine et il faut que ça se fasse à la vitesse de la lumière.»

 

L'ambitieux plan quinquennal de Chrysler, présenté par M. Marchionne le 4 novembre, prévoit que le plus petit des Trois de Detroit doublera ses ventes (à 2,8 millions d'unités) annuelles d'ici 2014. La majorité des voitures espérées seraient des modèles nouveaux qui partageraient des composantes majeures avec des véhicules Fiat. Et c'est précisément pour éviter que la bureaucratie ralentisse le transfert technologique que M. Marchionne a décidé de diriger les deux boites en même temps.

 

Quand ce sera fait, il se trouvera un adjoint à Detroit, un président qui s'occupera seulement de Chrysler, rapporte le Free Press. Le concurrent General Motors aura eu le premier choix sur les rares candidats capables de diriger un constructeur automobile: GM vient de montrer la porte à son président, Fritz Henderson, et un chasseur de têtes a eu le mandat de dénicher quelque part au monde la perle rare.

 

La décroissance doit cesser

 

Le quotidien de Detroit tire une conclusion amusée de l'entrevue avec le patron de Chrysler et de Fiat: «Sergio Marchionne admet être humain».

 

Chrysler a fait ses frais durant les deux derniers mois, mais le constructeur l'a fait au prix de coupes sombres faites sous la protection de la Loi sur la faillite, l'été dernier. Elle ne perd plus d'argent parce qu'elle s'est amputée d'une partie importante de ses actifs. On le voit en comparant ses ventes de novembre 2007 (161 088 véhicules), novembre 2008 (85 260) et novembre 2009 (63 560). Mais la compagnie doit recommencer à croître si elle veut survivre et prospérer.

 

M. Marchionne dit que tous les travailleurs de Chrysler savent qu'ils en sont à leur dernière chance avec son plan. D'ailleurs, si la transfusion sanguine prescrite par M. Marchionne ne fonctionne pas bientôt chez Chrysler, il n'aura plus à se préoccuper d'avoir deux jobs.

 

Source: Detroit Free Press.