Le gouvernement du Québec veut orienter le transport individuel à quatre roues vers le tout électrique. En accordant à partir de l'an prochain un rabais - et non plus un crédit d'impôt - pouvant aller jusqu'à 8000$ à l'achat ou à la location d'un véhicule électrique ou hybride rechargeable neuf, Québec ne souhaite pas (ou plus) de moteurs à essence. Une mauvaise nouvelle pour... les Toyota Prius et Honda Insight de ce monde.

Dans son budget présenté jeudi, Québec a annoncé qu'il consacrera 50 millions à l'encouragement de tels achats faits entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2015, plus précisément 42,8 millions pour l'acquisition des véhicules et - aspect inédit - 7,2 millions pour l'acquisition et l'installation de bornes de recharge à domicile.

Ce nouveau programme de rabais remplacera donc l'actuel crédit d'impôt pour l'achat ou la location d'un véhicule neuf dit «écoénergétique». Ce crédit d'impôt sera aboli le 31 décembre prochain, à minuit. D'ici là, il sera bonifié d'une enveloppe totale de 800 000$. Somme qualifiée au passage de «risible» par le député de Québec solidaire, Amir Khadir. Ceux qui achèteront d'ici la fin de l'année un véhicule consommant entre 0,01 et 2,99 L/100 km recevront un crédit de 7769$.

Ce remplacement du crédit d'impôt par le rabais à l'achat a pour but d'offrir «une aide plus immédiate» à ceux qui souhaitent acheter un véhicule totalement ou partiellement électrique. Actuellement, selon Québec, les consommateurs doivent souvent attendre d'avoir terminé leur déclaration de revenus avant de recevoir l'aide fiscale assortie au véhicule qu'ils se procurent. Des délais qui freinent ou qui découragent ces initiatives personnelles.

Pour les véhicules électriques, ce nouveau soutien financier sera en 2012 du même ordre que le crédit d'impôt, dans sa tranche la plus élevée: 8000$. Pour les véhicules hybrides rechargeables, ce rabais sera nettement plus élevé (8000$) que le crédit d'impôt (2250$). Toutefois, ces sommes seront modulées selon la capacité de la batterie du véhicule convoité. Concrètement, le rabais sera par exemple de 5000$ pour une voiture ayant une batterie de 4 kWh, de 6385$ pour une capacité de 10 kWh, ou encore de 7769$ pour la batterie de 16 kWh d'une Chevrolet Volt ou d'une Mitsubishi i-Miev. L'acheteur d'une Nissan Leaf ou d'une Ford Focus électrique aura droit au rabais maximal de 8000$.

Les valeurs des rabais sont dégressives d'ici à 2015, dernière année au cours de laquelle elles seront de 2000$ à 3000$ pour les véhicules électriques et les véhicules hybrides rechargeables.

 

"Marketing politique"

Selon Pierre-Olivier Pineau, cette annonce du gouvernement est «ridicule» et relève du «marketing politique», car elle ne concernera que 10 000 véhicules neufs en quatre ans et qu'elle ne fait qu'encourager l'achat de véhicules, justement. «Il vaut mieux donner un bonus à ceux qui n'achètent pas de voiture et qui ont un impact sur le développement durable», dit ce professeur agrégé spécialiste en politique énergétique à HEC Montréal.

Selon Daniel Breton, président du mouvement écologiste Maîtres chez nous - 21e siècle, «on ne touche pas aux véhicules énergivores. Cette mesure est une petite bonne nouvelle dans un océan d'insignifiances en matière de transport. Cela ne change pas radicalement le paysage».

Pierre Langlois, lui, se félicite de voir que les rabais sur les hybrides rechargeables sont dorénavant identiques à ceux sur les voitures électriques. Mais l'auteur de Rouler sans pétrole estime que le nombre de véhicules concernés est nettement insuffisant. «Cela paraît bien, mais ce n'est pas assez. Idéalement, il faudrait 50 000 véhicules», soutient le physicien.

La déception de cette mesure budgétaire est le très faible soutien financier accordé aux acheteurs de véhicules hybrides comme la Toyota Prius ou la Honda Civic Hybrid. Pour les voitures dont la consommation d'essence est inférieure ou égale à 5,27 litres aux 100 kilomètres, le rabais à l'achat sera de 1000$ en 2012 et de 500$ en 2013, ce qui équivaut au crédit d'impôt. Le rabais est inexistant à partir de 2014. Le message paraît clair: le soutien à l'hybride traditionnelle n'a plus lieu d'être, ses prix vont baisser, l'avenir ne lui appartient pas.

«Il ne faudrait en fait récompenser personne mais pénaliser les plus énergivores», analyse Pierre-Olivier Pineau. Dans ce budget, «il aurait fallu un malus costaud», dit Pierre Langlois en référence au système de bonus-malus qui pénalise les véhicules pollueurs au profit des plus écologiques.

On notera au passage que l'achat et l'installation de bornes de recharge à domicile seront subventionnés à hauteur de 50% du coût total, jusqu'à un maximum de 1000$ en 2012. Cette somme maximum sera de 600$ en 2015.

Toutes ces mesures figureront dans un plan d'action sur les véhicules électriques que doit présenter la ministre des Ressources naturelles et de la Faune, Nathalie Normandeau, au début du printemps. Québec dit vouloir préparer et accélérer la venue de ces véhicules.

 

Photo fournie par Ford

La Ford Focus électrique sera non seulement zéro-émissions mais il sera également construit à partir de matériaux recyclés et renouvelables.

RABAIS À L'ACHAT EN 2012

- Ford Focus électrique 8000$

- Nissan Leaf 8000$

- Tesla Roadster 8000$

- Mitsubishi i-Miev 7769$

- Chevrolet Volt 7769$

- Toyota Prius 1000$

- Toyota Camry hybride 1000$

- Toyota Highlander hybride 1000$

- Honda CR-Z 1000$

- Honda Civic Hybrid 1000$

- Ford Fusion Hybrid 1000$

- Ford Escape Hybrid 1000$

* Liste non exhaustive

Photo: Reuters

La Chevrolet Volt