Il y a un an, la Nissan Leaf, premier véhicule 100% électrique grand public, arrivait sur le marché canadien. Quelques mois plus tard, les consommateurs découvraient une seconde voiture du genre, la Mitsubishi i-Miev. Si la voiture électrique a séduit les convaincus de la première heure, s'est-elle pour autant imposée sur le marché?

Les premiers tours de roue de la voiture électrique au Canada ont eu lieu en juillet 2011 lorsque Nissan a fourni 16 premiers exemplaires de sa Leaf à des municipalités, entreprises d'État et sociétés. Deux mois plus tard, les premiers modèles sont arrivés chez des particuliers. À l'approche de l'automne, Nissan a mis 600 exemplaires du modèle 2012 à la disposition des acheteurs potentiels.

Résultat? La courbe des ventes a suivi la cote de popularité médiatique de cette voiture distribuée au compte-gouttes. Les ventes de la Leaf sont passées de 17 exemplaires en septembre à 59 en décembre dernier. Mais la tendance s'est inversée pendant l'hiver. Depuis février, les ventes tournent cette année autour d'une vingtaine d'exemplaires par mois. En 12 mois, le modèle 2012 de la Leaf s'est écoulé à 325 exemplaires, en date du 31 août. Il reste grosso modo un semestre à Nissan pour vendre les quelque 250 modèles restants avant l'arrivée de la version 2013.

La division canadienne du constructeur nippon est consciente qu'elle n'atteindra pas les 600 ventes d'ici là. Ses premiers résultats représentent-ils une déception? «D'un côté, c'est encourageant car certains disaient que cette voiture était invendable, répond Didier Marsaud, directeur des communications de Nissan Canada. [...] Oui, le chiffre n'est peut-être pas aussi idéal qu'on l'aurait imaginé il y a un an et demi, mais on ne savait pas trop ce qu'il en serait non plus. Est-ce une déception? Non, on apprend.»

La déception sera néanmoins grande si la prochaine mouture produite aux États-Unis à partir de l'an prochain ne fait pas décoller les ventes.

Mitsubishi

Le son de cloche est similaire chez Mitsubishi. Sa petite i-Miev a été lancée au Canada à la mi-décembre. Les ventes des huit premiers mois de l'année y ont oscillé de 11 à 26 par mois. Tout comme Nissan, Mitsubishi est très prudent dans son offre. Six cents voitures devaient être fournies au marché canadien cette année. Cette modestie ne suffit pas, il faut croire, puisque 150 exemplaires seulement ont été vendus après huit mois.

«Depuis que j'ai joint l'entreprise en janvier, nous avons toujours dit que nous vendrions pas toutes les i-Miev possibles dans ce marché de niche que représentent les voitures électriques, affirme John Arnone, directeur des relations publiques de Mitsubishi Canada. Nous sommes satisfaits du rythme de notre i-Miev. Le marché de la voiture électrique est petit. En tant que l'un des plus petits constructeurs au Canada, nous sommes ravis de faire partie de ceux qui amènent sur le marché leur propre technologie électrique.»

 

N'empêche qu'il risque de rester des exemplaires à la fin de l'année.

«Je ne suis pas du tout surpris par ces chiffres et je m'y attendais. Les constructeurs doivent être déçus, bien qu'ils ne l'admettront pas», affirme Dennis DesRosiers, analyste de DesRosiers Automotive.

Comme pour n'importe quel modèle sur le marché, les Nissan Leaf et Mitsubishi i-Miev ont trouvé preneur auprès de ce que l'on appelle les «flottes», les parcs de véhicules des gouvernements, des municipalités et des entreprises. Ces parcs ont acquis 32% des Nissan Leaf jusqu'à présent. Mitsubishi prétend que 30% de ses ventes d'i-Miev ont été effectuées auprès d'entreprises ou de gouvernements. Ce qui réduit le taux de pénétration de ces voitures auprès de Monsieur et Madame Tout-le-monde.

Les constructeurs ont commencé à changer leur fusil d'épaule. Il leur faut élargir le bassin de clients. «C'est vrai que la Leaf est une voiture qui se vend différemment. On se rend compte qu'il faut augmenter le nombre de nos concessionnaires certifiés pour cette voiture et que pour aller vers une clientèle traditionnelle, il faut retrouver un modèle commercial plus proche du modèle classique», explique Didier Marsaud.

Nissan a fait le choix, l'an dernier, de commercialiser ses premiers exemplaires uniquement par le web. «Cela a très bien fonctionné auprès des enthousiastes», dit M. Marsaud. Mais cela ne suffira pas pour joindre et convaincre la masse critique. Nissan va également modifier son processus de vente aux États-Unis, où les résultats de la Leaf ont été «un peu en dessous des prévisions».

Nissan considère qu'il a défriché le terrain en étant le premier à commercialiser à grande échelle une voiture électrique. L'arrivée de la concurrence incarnée d'abord par les Ford Focus et Smart Fortwo électriques, puis par les Honda Fit et Toyota RAV4, est vue d'un bon oeil. À deux égards.

«Cela signifie qu'il y a d'autres marques qui croient à la voiture électrique. [...] Ce n'est plus Nissan seul qui va frapper à la porte des gouvernements pour l'infrastructure de recharge», dit M. Marsaud. L'essor du réseau de stations de recharge est primordial pour les constructeurs. S'ils veulent convaincre les automobilistes.

>>> Pour consulter le tableau des ventes depuis janvier 2012 de la Leaf et de l'i-MiEV, cliquez ici.

Photo fournie par Mitsubishi

La Mitsubishi i-MiEV.