Qu'on se le dise: les Américains ne veulent rien savoir des petites voitures, du moins pas tant que le prix de l'essence se situera sous la barre des 3$US le gallon.

C'est la conclusion de l'analyse menée par Edmunds.com, qui démontre que les goûts des acheteurs Américains n'ont pas changé au cours des deux dernières années, mis à part un hiatus de quelques mois en 2008 quand l'essence se vendait à près de 3,50$ le gallon.

 

Selon les données récoltées par Edmunds auprès d'acheteurs potentiels ayant eu recours à ses services internet, la proportion de consommateurs intéressés à acheter une petite voiture est passée de 16% à 15% entre janvier 2009 et janvier 2010. Pendant ce temps, les prix de l'essence ont augmenté de 1,79$ le gallon à 2,72$ le gallon, une hausse manifestement insuffisante pour changer le comportement des automobilistes américains.

 

Au même moment, la firme de consultants AutoPacific a démontré que l'intérêt pour les petites voitures et les hybrides a chuté, alors que la popularité des multisegments et des camionnettes est en hausse. L'enquête menée auprès d'un millier de membres du forum internet du consultant a permis de constater que l'intérêt pour les petites voitures avait chuté de moitié entre janvier 2009 et janvier 2010, soit de 24% à 12%. Parallèlement, le pourcentage d'automobilistes intéressés à acheter un véhicule hybride a dégringolé de 25% à 11% pendant la même période. 

Le faible intérêt des Américains pour les voitures économiques est d'autant plus marquant que l'administration Obama continue de faire des efforts pour convaincre les électeurs de s'affranchir de leur dépendance au pétrole. «La politique gouvernementale est pleine de bon sens, affirme l'analyste James Hossack, d'AutoPacific. C'est une bonne idée de consommer moins d'essence. Le problème, c'est que les prix à la pompe sont tout simplement trop bas.»

 

Le PDG d'Edmunds.com, Jemery Anwyl, fait pression depuis longtemps pour que Washington augmente la taxe sur le carburant, une idée également défendue par James Hossack. «Les prix de l'essence devraient être les mêmes aux États-Unis qu'en Europe si l'on veut que notre parc automobile soit le même qu'outre-Atlantique, où l'on retrouve un grand nombre de petites voitures économiques», a-t-il soutenu.

 

Cet état de fait montre l'étendue du défi qui attend les constructeurs. Comment peuvent-ils rentabiliser les investissements nécessaires à la production de véhicules économiques alors que la clientèle n'en veut manifestement pas? Tout ça alors que de nombreux gouvernements exigent que les constructeurs proposent une flotte de véhicules à la consommation moyenne beaucoup plus restrictive.

 

Le rendement sur investissement n'est absolument pas garanti pour les constructeurs ayant dépensé une fortune en développement de voitures comme la toute-électrique Nissan Leaf ou l'hybride Chevrolet Volt. De l'aveu même du vice-président de GM, Bob Lutz, «l'idée d'imposer des niveaux de consommation moyenne aussi ambitieux dans un marché où le prix de l'essence est aussi bas est comparable à vouloir combattre l'obésité en ne proposant que des vêtements de petite taille.»

 

La conclusion de Lutz? Les véhicules hybrides ne compteront jamais plus que pour 10% du parc automobile américain.

 

À moins d'avoir le courage politique d'affûter l'intérêt des gens en augmentant artificiellement le prix à la pompe. Un beau défi.