Tout automobiliste désireux de faire un geste pour l'environnement en achetant un nouveau véhicule peut dorénavant avoir droit à la somme de... 300$. C'est ce à quoi se résume l'encouragement «à faire des choix durables en matière de transport».

Le ministère fédéral de l'Environnement a lancé officiellement le 30 janvier dernier son programme «Adieu bazou» destiné à inciter les Canadiens à se départir de leur véhicule âgé de 14 ans et plus. Pour les convaincre de faire ce «choix durable en matière de transport», le gouvernement offre essentiellement en contrepartie une somme de 300$ en espèces.

 

«Le gouvernement fédéral supporte ce programme jusqu'au 31 mars 2011. Pour l'instant, ce sera le seul programme national de mise à la ferraille des véhicules appuyé par le gouvernement du Canada», affirme Sujata Raisinghani, porte-parole du ministère de l'Environnement.

Alors que ce programme fédéral, présent dans le dernier budget, est lancé, un autre est sur le point d'arriver à son terme et de ne pas être renouvelé. Le programme écoAUTO offrait des rabais allant jusqu'à 2000$ à ceux qui achetaient ou louaient à long terme (12 mois ou plus) un véhicule hybride ou à faible consommation d'essence. Trente-deux modèles sont encore éligibles et on a jusqu'au 31 mars pour s'en prévaloir.



Objectif atteint!


Du côté du ministère des Transports, on affirme que l'objectif de sensibiliser les gens à acquérir des automobiles moins énergivores a été atteint. En date du 30 janvier dernier, 163 000 remises ont été attribuées pour un total de 183,4 millions. Malgré ces chiffres, le gouvernement a décidé d'investir dans d'autres programmes environnementaux.

«C'est un autre bel exemple de désastre environnemental à Ottawa. Cela marchait assez bien et ils l'ont supprimé», commente Arthur Sandborn, spécialiste des changements climatiques et de l'énergie au bureau de Greenpeace à Montréal.

Jusqu'à tout récemment, le gouvernement du Québec faisait aussi sa part. Tout achat, location à long terme (au moins 12 mois) ou importation d'un véhicule hybride neuf effectué avant le 1er janvier 2009 permettait d'avoir droit à un remboursement partiel de la TVQ pouvant aller jusqu'à 2000 $. Même si 22 modèles sont encore aujourd'hui prescrits, toute acquisition à compter de cette date ne permet plus d'en bénéficier.

«Cet incitatif n'a pas été renouvelé. Pour l'instant, on ne peut pas indiquer s'il va être poursuivi, amélioré ou peaufiné», a commenté Catherine Poulin, attachée de presse de la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget.

Résultat, les incitations à acheter un véhicule le moins énergivore possible sont en passe d'être extrêmement timides. Pour Jacques Béchard, PDG de la Corporation des concessionnaires automobiles du Québec, «il n'y a plus rien au fédéral et au provincial». «Une réduction de la TPS pour acheter des véhicules neufs aurait beaucoup encouragé», pense George Inny, président de l'Association de protection des automobilistes. Du côté des constructeurs les plus concernés, Toyota n'a pas souhaité s'exprimer.

«La carotte offerte dans le programme de mise à la ferraille doit être plus importante que la valeur résiduelle du véhicule dont vous voulez vous débarrasser, fait remarquer Denis DesRosiers, président de DesRosiers Automotive Consultants. Si vous avez une minoune que vous pouvez vendre d'occasion 2000$, pourquoi la mettriez-vous à la casse pour quelques centaines de dollars? Surtout quand on sait que les propriétaires de vieilles voitures sont en général au bas de l'échelle économique et donc plus sensibles aux prix. Les programmes qui offrent environ 300$ ne sont pas efficaces.»

Au ministère fédéral de l'Environnement, Sujata Raisinghani répond que «les résultats obtenus jusqu'à présent démontrent qu'un montant de 300$ combiné avec un moyen facile de se débarrasser de son auto et la satisfaction d'avoir posé un geste pour l'environnement est attrayant pour certains propriétaires».

Des incitations significatives seraient payantes. Récemment, dans ces colonnes, Roland Hwang, analyste pour le groupe environnementaliste américain Natural Resources Defense Council, estimait qu'un véhicule moins énergivore pourrait faire économiser de 1000$ à 2000$ à son propriétaire au fil des ans.

Sur le marché des véhicules neufs, avec la fin récente ou prochaine des mesures, «les ventes se sont beaucoup effondrées» pour les véhicules écoénergétiques, affirme M. Béchard.

Dans un avenir proche, il faudra se contenter de ces 300$ d'encouragement à l'achat d'un véhicule propre.