Sur le marché automobile, un nouveau produit proposé à la signature d'un contrat de location longue durée suscite des interrogations quant à sa légalité et sa pertinence : la protection contre l'usure, dénommée aussi protection esthétique. Mieux vaut en lire les termes...

Signer les yeux fermés peut coûter cher. Martin (qui préfère taire son nom) l'a appris à ses dépens lors de sa dernière vidange en date.

Deux égratignures et une bosse sur la carrosserie de son VUS l'ont conduit à réclamer auprès de son concessionnaire Mazda une réparation en bonne et due forme, persuadé qu'il pouvait bénéficier de ce service pour lequel il a payé une « protection contre l'usure » de 1270,47 $ très exactement. En vertu de cette protection, tout dommage de ce genre était assumé par son concessionnaire durant les cinq ans que dure son contrat de location, pensait-il. Erreur.

« Au service à la clientèle, on m'a répondu que la bosse n'était pas assez grosse pour être réparée. Quant aux égratignures, je n'ai pas de réponse de leur part », dit l'automobiliste.

On pourrait penser que chaque partie n'accorde pas la même importance à la réparation.

Pourtant, à bien y regarder, le contrat signé par ce consommateur est en apparence très clair, tout comme la liste de ce qui n'est pas couvert par ce que le commerçant appelle une « garantie ».

En lisant la liste des exclusions, on s'aperçoit par exemple que ne sont pas couverts « les égratignures de surface (ne passant pas à travers la peinture), peu importe la taille, la peinture endommagée sur une surface de moins de 50 millimètres de diamètre ou si le dommage du pare-chocs n'est pas visible à une distance de trois mètres ».

Concernant les jantes frottées contre le trottoir, elles peuvent être remplacées mais seulement deux fois le temps de la durée du contrat et à condition que le dommage mesure plus de 50 mm de longueur...

Autant de détails et de conditions que n'a pas vus et n'a pas lus notre automobiliste mais qu'il a signés. Celui-ci a en fait été appâté par la brochure publicitaire que lui a remise le vendeur, brochure rappelant brièvement les coûts typiques de remplacement d'un pare-brise ou d'une jante et de réparation d'un éclat.

« Ce sont des représentations verbales et des décisions prises basées sur des pamphlets », note-t-on à l'Association pour la protection des automobilistes (APA).

Illégal?

Notre consommateur a « le sentiment qu'[il] n'est pas pris en charge et que la protection ne sert à rien ».

« Ce sont des réparations proposées en cours de bail et non à la fin et ça, ça semble nouveau », commente George Iny, président de l'APA.

Très au fait de cette nouvelle pratique des concessionnaires automobiles, l'Autorité des marchés financiers (AMF) examine actuellement la légalité de celle-ci.

« Ce genre de contrat a des aspects de garantie et d'assurances, il y a des exclusions similaires aux garanties et aux assurances, analyse George Iny. Mais de prime abord, c'est une assurance et non une garantie. »

Cette distinction est importante car un commerçant ne peut pas vendre un contrat d'assurance en le faisant passer pour une garantie. Et inversement.

« Même si le nom du produit utilise le terme "garantie", il ne s'agit pas d'une garantie si l'objet du contrat n'est pas de protéger le consommateur contre les vices de qualité du bien vendu. », explique Sylvain Théberge, directeur des relations médias de l'AMF.

Or, le document signé par notre automobiliste ressemble fortement à une protection liée aux hasards de la route. Donc à une assurance. D'où l'intérêt de l'AMF pour ce nouveau type de contrat.

« Les produits d'assurances afférents à un véhicule ne peuvent être distribués que par l'entremise de représentants certifiés auprès de l'Autorité. [...] Un formulaire d'assurance auto approuvé par l'Autorité est requis lorsque qualifié d'assurance automobile », ajoute M. Théberge.

Dans ce cas-ci, l'AMF pourrait décider d'une convention standard et interdire certaines pratiques et exclusions. Le consommateur n'en serait que moins lésé ? À voir.