Moins de voitures en circulation, moins de kilomètres parcourus et moins d'essence consommée. Voilà le rapport quelque peu surprenant qu'entretient l'Amérique avec l'une de ses icônes de la liberté individuelle, la voiture.

Que la consommation moyenne d'essence des véhicules en circulation aux États-Unis ait diminué n'a rien de surprenant, avancées technologiques obligent, mais que la consommation totale d'essence des Américains ait également baissé est plus significatif.

Professeur chercheur à l'Institut de recherche sur les transports de l'Université du Michigan, Michael Sivak a épluché les données de consommation de 1984 à 2011 de toutes les catégories de véhicules aux États-Unis. En 2011, 469 milliards de litres d'essence ont été consommés par les automobilistes américains comparativement à 525 milliards de litres en 2004, une année record.

«Cette baisse de 11% depuis 2004 reflète à la fois la diminution de la distance parcourue et l'amélioration des véhicules en matière de consommation d'essence», commente Michael Sivak.

Que ce soit par personne, par titulaire du permis de conduire, par foyer ou par véhicule, cette baisse est observable à tous les échelons et y varie de 13% à 17% entre 2004 et 2011.

Étant donné que cette réduction s'est matérialisée quelques années avant la récession économique de 2008, il y a fort à parier que le pic de consommation de 2004 ne sera pas atteint de nouveau de sitôt, estime Michael Sivak.

Cette baisse de la consommation totale d'essence observée après 2004 coïncide avec une diminution de la distance parcourue par les automobilistes américains sur une année.

Que ce soit par personne, par titulaire du permis de conduire, par foyer ou par véhicule, cette distance a elle aussi atteint son sommet en 2004 - qui se chiffre en trillions de milles. Depuis, elle a baissé, dans une fourchette comprise entre 5% (par véhicule) et 9% (par foyer). Comme pour la consommation, son pic de 2004 n'est pas près d'être renouvelé. Pour la même raison.

Mais si la consommation totale d'essence a baissé, c'est avant tout grâce aux meilleures performances des voitures.

Autre corrélation intéressante, mais moins marquée, le nombre de véhicules légers immatriculés a également diminué aux États-Unis. En 2008, il a atteint un sommet de 237 millions environ. Puis a baissé à 230 millions deux ans plus tard, pour se redresser quelque peu l'année suivante.

Dans le détail, la diminution du nombre de véhicules par foyer et par titulaire de permis a été entrevue dès 2001. Bien avant que la crise économique n'éclate.

«La diminution de la distance parcourue et du nombre de véhicules immatriculés est due, en partie, à des changements dans la société américaine qui influencent le besoin de conduire. Ces changements sont l'usage des transports publics, l'urbanisation croissante, l'augmentation des communications à distance et le vieillissement de la population», explique Michael Sivak.

«Bien que non prédominants, des facteurs économiques ont aussi joué un rôle: le haut taux de chômage, la stagnation des revenus pour une majorité de gens, et les coûts exponentiels d'acquisition et d'entretien d'un véhicule», ajoute le chercheur.

Les constructeurs automobiles doivent-ils s'inquiéter du fait que les Américains possèdent moins de véhicules, les conduisent moins et consomment moins d'essence que par le passé?

«Je ne dirais pas qu'ils devraient être inquiets. Avec l'augmentation de la population et l'amélioration de l'économie, le nombre total de véhicules et la distance totale parcourue excéderont à l'avenir les sommets atteints il y a quelques années», pensent M. Sivak.