À moins d'être entré dans le cercle des initiés déjà, le succès commercial du Honda CR-V garde une part de mystère. Ce modèle n'a rien de très flamboyant. En apparence, ce véhicule qui défile à bon rythme sur la chaîne d'assemblage d'Alliston, en Ontario, est même tout ce qu'il y a de plus banal. Les transformations apportées à la livrée 2015 lui donnent un air plus sérieux, mais n'allègent en rien la partie arrière qui paraît toujours aussi lourde et bossue.

Un peu carrée, un peu pataude également, cette génération n'a rien d'une gravure de mode. Elle continue d'ignorer les nervures délicates et les courbures énergiques auxquelles succombent ses concurrentes. Mais Honda n'en a cure, elle connaît ses clients. Voilà sans doute pourquoi le constructeur japonais n'a pas envie de sortir de cette «zone de confort» et préfère jouer ici de prudence.

Polyvalence

Avant d'amasser la poussière des musées, cette quatrième génération entame son dernier tour de piste en évitant soigneusement de s'écarter de ce qui a fait sa bonne fortune. En clair: sa polyvalence, même si celle-ci a déjà été supérieure. Rappelez-vous l'époque où le CR-V nous était servi avec une table de pique-nique. Ou encore, avez-vous en mémoire que la tablette suspendue entre les sièges avant s'escamotait pour faciliter le passage vers les places arrière? Il y a les bons et les mauvais souvenirs aussi. Comme ce lourd hayon (normal, la roue de secours y était accrochée) qui s'ouvrait sur le trottoir. Peu pratique et dangereux également.

Le CR-V a beaucoup évolué, mais demeure néanmoins encore et toujours pour initiés, qui ne se révèle vraiment qu'à celui ou celle qui l'utilise au quotidien. La modularité de son habitacle par exemple - une spécialité chez Honda - est un modèle du genre, même si la surface de chargement n'est pas parfaitement plane. Par chance, l'assise de la banquette ne l'est pas non plus et offre à deux occupants un confort appréciable et suffisamment surélevé pour permettre aux petits d'apprécier le paysage.

Comportement routier

Plutôt joyeuse à ses débuts, la conduite du CR-V s'est affadie au fil des refontes. Personne n'a l'air de s'en plaindre, sauf peut-être les acheteurs qui souhaiteraient joindre l'utile à l'agréable. Bien que le comportement routier de ce Honda ne puisse être qualifié de très amusant, symptôme de dépression qui perdure chez Honda ces dernières années. Sans modifier outre mesure un cahier de charges savamment préparé, Honda revoit parcimonieusement sa copie en apportant quelques retouches aux trains roulants, dans le but de stimuler les sens. C'est partiellement réussi. La direction est certes plus rapide et les mouvements de caisse mieux contrôlés. On note avec plaisir une stabilité légèrement accrue sans que cela ne la rende guère plus vivace sur un parcours sinueux. La suspension demeure sèche, particulièrement sur une chaussée dégradée. Cette critique se trouve partiellement atténuée par la qualité des sièges qui figurent, encore aujourd'hui, parmi les meilleurs du segment.

Révision technique

La pièce de résistance de cette révision technique se cache sous le capot avec cette mécanique 2,4 L qui intègre dorénavant un système d'alimentation à injection directe et une augmentation significative du taux de compression à l'intérieur d'un bloc maintenant en aluminium (plus léger) et dont les frictions ont été réduites au maximum. Le refrain habituel, quoi. La puissance maximale demeure la même (185 ch.), mais son obtention se fait à un régime un peu moins élevé, mais plus important, le couple progresse et se manifeste lui aussi plus tôt, ce qui ajoute un peu de souplesse à cette motorisation qui autrefois n'en avait guère. Et, surtout, une meilleure économie de carburant, même si celle que nous avons enregistrée figure au nord (9,2 L/100 km) des cotes mises de l'avant par le constructeur. Le crédit ne revient pas qu'au seul moteur, mais aussi à la boîte à variation continue (CVT) qui l'accompagne. Son mode de fonctionnement demeure transparent jusqu'à 4000 tr/min. Un régime de rotation rarement dépassé par les propriétaires de ce modèle. Après 4000 tr/min? Ça gronde.

Si tous les ingrédients sont réunis pour abaisser le coût d'utilisation, les frais d'acquisition, eux, demeurent plus élevés que la moyenne de ses concurrents. Sa valeur résiduelle l'est généralement aussi. De toutes les livrées offertes, la SE représente sans l'ombre d'un doute le meilleur choix.