La consommation de drogue est aussi fréquente - si ce n'est plus - que la consommation d'alcool parmi les automobilistes canadiens. Il est aujourd'hui possible de détecter les fautifs. Si le dépistage n'est pas aussi simple qu'un test d'alcoolémie, il est néanmoins fini, le temps où les conducteurs sous l'emprise de la drogue pouvaient circuler sans craindre de se faire épingler. Fumer du pot ou conduire, il faudra choisir.

Pour la première fois au Québec, un procès pour conduite avec facultés affaiblies sous l'emprise de drogue va se tenir à la cour municipale de Montréal... en mars prochain. Depuis mai 2009, 13 autres dossiers sont susceptibles de passer en cour sur le territoire du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).

Depuis l'adoption du projet de loi fédéral C-2 en juillet 2008, tout policier qui soupçonne un individu de conduire sous l'influence de drogues illicites ou de médicaments sur ordonnance ou en vente libre est autorisé à procéder à un test normalisé de sobriété.

Cette nouvelle législation et sa récente application changent énormément la donne sur le terrain. Jusqu'à tout récemment, il était presque impossible d'arrêter une personne pour conduite sous l'emprise de drogue. «Il fallait que ce soit des cas flagrants ou encore que la personne soit inconsciente au point de ne pas pouvoir consentir à un prélèvement. Avant, la police laissait repartir le conducteur ou saisissait son véhicule», explique Nathalie Valois, coordonnatrice au SPVM en matière de drogue au volant et monitrice du Programme d'évaluation et de classification des drogues.

Contrôle

Dorénavant, les policiers du SPVM peuvent participer à l'opération de dépistage. À ce jour, 400 des 2500 policiers sur la route ont été formés.

Lorsqu'un policier a des soupçons à l'égard d'un automobiliste arrêté, il lui ordonne de se soumettre à des épreuves de coordination. S'il échoue, l'automobiliste est conduit à un poste de police où un policier spécialisé en «reconnaissance de drogue» va l'évaluer et lui faire passer des examens. Un prélèvement d'urine est ensuite fait. Les résultats du laboratoire d'analyses seront déposés en cour municipale comme preuve de conduite sous l'emprise d'une drogue. Le dossier va devant une cour provinciale s'il y a eu une mort ou des blessés dans la cause concernée.

Les comportements au volant sont divers d'une drogue à l'autre. Sous l'emprise d'un stimulant, dans un état de surexcitation, la coordination est touchée. Avec le cannabis, on a de la difficulté à évaluer les distances et à conserver sa trajectoire. On conduit plus lentement, la coordination est aussi touchée. Avec l'héroïne, tout est plus lent au volant et ce sont les réflexes qui font défaut.

Plus répandue que l'alcool

Étant donné que la loi ne peut être appliquée que depuis peu, en raison essentiellement du temps de formation des corps policiers et de la durée du processus de dépistage, il existe très peu de chiffres sur la conduite automobile sous l'emprise de drogue.

Dans une enquête routière menée en 2008 en Colombie-Britannique, des tests ont révélé la présence de drogues chez 10,4% des automobilistes et la présence d'alcool chez 8,1% d'entre eux. «La conduite avec facultés affaiblies par la drogue est plus répandue qu'on ne le croyait», a dit Douglas J. Beirness, analyste et conseiller principal en recherche et politiques au Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies.

Dans une autre étude menée par le Centre, on a constaté que le tiers des conducteurs tués sur les routes du pays de 2000 à 2006 avaient pris au moins une drogue.

Chez les automobilistes de 16 à 20 ans, la drogue serait devenue un problème plus important que l'alcool.

Des tests (salivaires) de détection de drogues sont en vente dans certaines pharmacies. Leur efficacité n'est cependant pas reconnue par les autorités. «La loi n'est pas faite pour utiliser les tests salivaires, il faudrait la modifier pour ça», ajoute Nathalie Valois.