Voici la preuve que même les vendeurs d'autos peuvent se faire élire. Six concessionnaires automobiles vont maintenant siéger à la chambre des représentants du Congrès américain, à la suite des élections américaines d'hier.

C'est ce qu'observe le magazine spécialisé Automotive News, qui, vraiment, couvre l'industrie des bagnoles de façon obsessive. Le magazine indique qu'il y avait déjà trois concessionnaires automobiles (ou anciens concessionnaires) à la chambre des Représentants, et que les vendeurs d'autos ont ainsi doublé leur présence au Congrès américain (le Congrès américain est divisé en une chambre haute, le Sénat, et une chambre basse, la chambre des Représentants).

Les trois Représentants qui étaient déjà là et les trois nouvellement élus hier appartiennent tous au Parti Républicain. Les trois nouveaux élus d'hier ont défait trois Démocrates sortants, chassés du pouvoir après au moins quatre ans. Il y a une amère ironie là-dedans pour les Démocrates défaits: c'est le Parti Démocrate du président Barack Obama qui a sauvé General Motors et Chrysler de la faillite il y a à peine 18 mois, en injectant plus de 50 milliards de dollars dans ces deux compagnies. Et les trois nouveaux concessionnaires automobiles élus ont surfé sur la vague républicaine qui critique «l'ingérence» de l'État dans l'économie et la vie politique.



Concessionnaire exproprié

En fait, au moins un des nouveaux élus républicains, Mike Kelly, de la Pennsylvanie, est un ex-concessionnaire, qui a perdu sa concession Cadillac à la suite de la restructuration dictée par l'administration Obama et son Groupe de travail de l'auto. M. Kelly a décidé de se présenter aux élections en réaction à la fermeture forcée de sa concession, indique le site de la National Automobile Dealers' Association, de tendance républicaine.

Rappelons que General Motors et Chrysler (et Ford) essayaient en vain depuis les années 80 de réduire le nombre de concessionnaires, mais se butaient depuis cette époque à une myriade de lois votées par les 50 États américains, qui imposaient aux Trois de Detroit des compensations faramineuses en cas de fermeture forcée. L'an dernier, l'administration Obama a utilisé la loi sur les Faillites et des pouvoirs fédéraux spéciaux pour forcer des fermetures de concessions, créant ainsi un ressentiment profond (et un déluge de poursuites en cour) chez les concessionnaires fermés.

M. Kelly, James Renacci, en Ohio, et Scott Rigell, en Virginie, ont tous obtenu au moins 52 % des voix et défait leur adversaire démocrate par des marges d'au moins 10 points, indique le Washington Post.

Un seul concessionnaire républicain a échoué dans sa tentative de déloger un Représentant démocrate sortant, et c'est dans la région du Midwest, où vivent et votent la majorité des travailleurs de l'industrie automobile américaine.

Tom Ganley, de l'Ohio, a perdu contre la démocrate Betty Sutton, qui a rédigé la loi qui a injecté quatre milliards dans le programme de prime à la casse aux Etats-Unis, et qui a défendu les concessionnaires expropriés.

Les trois concessionnaires qui siégeaient déjà à la chambre des Représentants ont tous été réélus par de fortes majorités.

Un précédent canadien inverse : Jacques Olivier

Au Canada, il y a sûrement eu des concessionnaires automobiles qui se sont fait élire. Après tout, connaissez-vous un métier qui exerce autant le sens de la persuasion que vendeur d'autos ? (Si vous avez répondu "politicien" à cette question, vous gagnez une nouvelle voiture.)

Ici, à La Presse Auto, on n'a pas vraiment le temps de faire des recherches historiques poussées à ce sujet, mais on sait de mémoire qu'il existe au moins un précédent canadien impliquant une personne ayant fait le chemin inverse. Ainsi, on sait que l'Honorable Jacques Olivier, au départ syndicaliste, a été ministre fédéral du Travail, puis des Sports, dans le gouvernement de Pierre Trudeau. Après sa défaite électorale, il s'est recyclé dans la vente d'autos comme concessionnaire sur la Rive-Sud.

Notons qu'il n'a jamais pour autant perdu la piqûre électorale, puisqu'il s'est ensuite fait élire maire de Longueuil.

Sources : Automotive News, Washington Post, National Automobile Dealers' Association.

Photo: AP

Le républicain Mike Kelly