Six ans! Il aura fallu presque six ans pour qu'un constructeur sorte un véritable concurrent à la 5 de Mazda. Les raisons invoquées pour expliquer cet étonnant attentisme demeurent nébuleuses. Certains considèrent la vague du multisegment comme plus porteuse, d'autres que la 5 exhibent trop ouvertement les stigmates d'une catégorie honnie (les fourgonnettes) avec ses portières coulissantes.

Peu importe les motifs, il importe de rappeler certains faits. En Europe, où la Mazda5 et le C-Max font carrière, le segment des fourgonnettes compactes remporte un joli succès. Longtemps dominé par son instigatrice, la Renault Scenic, ce créneau représente, sur une base annuelle, environ 1,2 million d'unités. Il faut préciser également que ce nombre intègre aussi bien les ventes des versions régulières qu'allongées. Celles-ci comptent sept places au lieu de cinq et ont la faveur de quatre acheteurs sur dix sur le Vieux Continent.

Mais l'Europe, ce n'est pas l'Amérique. Ici, tout reste à faire. Au-delà des études réalisées auprès de la clientèle, la décision des constructeurs de grossir ou non les rangs de cette catégorie repose essentiellement sur les ventes réalisées par la 5 de Mazda. À ce chapitre, mentionnons qu'au Canada, la fourgonnette compacte japonaise séduit en moyenne 10 600 nouveaux propriétaires chaque année, et ce, depuis sa sortie à l'été 2005, ce qui représente environ 2,5% du marché des compactes dans lequel elle est inscrite, faute de concurrentes.

Entreprise audacieuse

Le pari de Ford de s'inscrire dans ce segment paraît tout aussi audacieux que celui qu'a relevé Mazda il y a six ans. Le constructeur à l'ovale bleu se garde d'ailleurs de pronostiquer sur le succès de ce nouveau véhicule qui nous sera proposé dans sa version «Grand» (lire allongée) à partir de l'hiver 2012. On peut comprendre pourquoi. Plusieurs inconnus subsistent à l'égard de ce véhicule, à commencer par son prix. Au moment de la présentation du Grand C-Max à la presse nord-américaine, il a été fait mention que son prix serait «inférieur à 25 000$US», près de 5000$ (US toujours) de plus que le coût qu'exige Mazda pour monter à bord de la 5. Il reste à voir comment Ford justifiera pareil tarif. Chose certaine, le lieu d'assemblage du Grand C-Max risque de peser lourd au moment où Ford devra chiffrer son offre. En effet, contrairement à la future Focus (sortie prévue au cours de l'hiver 2011) dont il dérive étroitement, le Grand C-Max prend naissance dans les installations de Ford à Valence (Espagne) et non à Wayne, dans le Michigan. Si une certaine économie d'échelle subsiste (partage de certains composants), tout laisse croire que pour contenir son prix, le Grand C-Max sera privé de certains éléments novateurs, comme la boîte à double embrayage (Powershift) pourtant annoncée sur la Focus.

Puisque le Grand C-Max ne sera pas prêt à coulisser ses portières avant 14 mois, la prudence nous incite à attendre d'en connaître le contenant (la somme des équipements de série) et le prix avant de fixer ses chances de s'illustrer sur notre continent. Concentrons-nous plutôt sur ses principaux attributs qui, eux, ne connaîtront aucune frontière. À commencer par le style de cette nouvelle recrue. Celle-ci reprend à la lettre tous les ingrédients du «Kinetic Design» (calandre trapézoïdale, arrêtes vives et arches de roues proéminentes) qui permettront, autant que faire se peut, de faire oublier les rails latéraux nécessaires au guidage des portières coulissantes.

Même si, dit-on, une photo vaut mille mots, elle ne peut ici donner une idée bien précise de l'espace qu'occupe le Grand C-Max sur la chaussée. Pour mieux le visualiser, comparons ses principales dimensions à celles de la Mazda5. Par rapport à celle-ci, le Grand C-Max est plus court (-100 mm), plus large ("113 mm) et plus haut ("50 mm). Quant à l'empattement, il est de 2788 mm pour l'américain comparativement à 2750 pour la japonaise.

À l'instar de la japonaise, les deux places engoncées derrière la banquette médiane ne seront fréquentables, même pour des enfants, que sur de courts trajets. Toutefois, si vous trouvez des volontaires, sachez que le volume de chargement est alors si réduit (équivalent à 56 litres) qu'il est impossible de ranger un ballon de soccer. Cela dit, l'ingéniosité de ce Ford repose sur la modularité de son espace intérieur qui permet un très grand nombre de configurations. Par exemple, il est possible de rabattre les dossiers des sièges de la deuxième et de la troisième rangées; d'escamoter en un tournemain la - peu confortable - portion centrale de la banquette médiane pour faciliter le passage aux (pauvres) occupants de la troisième rangée. On regrettera l'impossibilité de rabattre le dossier du baquet avant pour faire voyager des objets longs ou quelques petites fautes mineures sur le plan de l'ergonomie qui seront vraisemblablement gommées, comme celles que nous avions répertoriées sur la Fiesta européenne - avant son arrivée au pays.

Hormis les sièges de la troisième rangée et le «strapontin» logé dans la partie centrale de la banquette arrière, toutes les autres places se révèlent spacieuses et confortables. Et pour ajouter à ce sentiment de bien-être, ajoutons aussi que l'imposante surface vitrée conjuguée aux coloris clairs du décor ajoute au sentiment d'espace.

Le volant, au demeurant joliment dessiné et offrant une jante bien grasse, comme on les aime, paraît plutôt encombré avec ses commandes multiples et pas toujours intuitives. Les principales commandes disséminées sur le tableau de bord se révèlent, pour leur part, plus intelligemment réparties, même si on se questionne toujours sur l'idée de grimper la touche «verrouillage/déverrouillage» au sommet de la console centrale plutôt que de l'annexer dans la portière avec les commandes des glaces. On regrettera plus vivement, cependant, le peu de rangements à bord pour un véhicule à vocation aussi familiale.

Essai en deux temps

Nous pourrions longuement discourir sur les principales innovations de ce Grand C-Max. Par exemple, ce régulateur de vitesse intelligent, cet éclairage adaptatif qui permet d'éclairer dans les «coins», la connexion internet ou encore le détecteur de baisse de vigilance du conducteur. À quoi bon, encore trop tôt pour dire lequel ou lesquels de ces équipements nous seront offerts et, si oui, à quel prix.

Cela dit, l'essai routier de cette fourgonnette compacte s'est déroulé en deux temps. Le premier consistait à étalonner le nouveau quatre-cylindres 1,6 litre suralimenté par turbocompresseur à bord d'un C-Max à boîte manuelle (celle-ci ne figure pas dans les desseins de Ford pour le marché nord-américain), moins encombrant et moins lourd. Dans un deuxième temps, nous avons été conviés à prendre le volant d'un Grand C-Max pour évaluer seulement ses qualités dynamiques puisque celui-ci comportait un moteur (2 litres diesel) et une boîte de vitesse (PowerShit 6 rapports) qui ne nous seront jamais offerts. Voyez là toute la difficulté de tirer des conclusions claires de ce banc d'essai.

À bord du C-Max (empattement court et portières traditionnelles), le 1,6 litre se révèle étonnamment souple et adéquat avec deux personnes à bord... Le sera-t-il tout autant une fois intégré à un Grand C-Max remplit à pleine capacité? Déjà plus lourd d'une centaine de kilogrammes et doté d'une transmission automatique conventionnelle à 6 rapports dont nous ignorons encore l'étagement, difficile de se prononcer.

Si on fait abstraction du groupe moteur-boîte, le Grand C-Max se révèle impressionnant sur le plan dynamique. Pour une fourgonnette (compacte), s'entend. Hormis un diamètre de braquage décevant étant donné ses dimensions extérieures, le Grand C-Max se laisse aisément guider par une direction précise et correctement dosée. Sur les routes exigeantes de Nice avec de nombreuses enfilades de courbes moyennes, le châssis du Grand C-Max s'en est toujours très bien tiré. La filtration, le confort et le silence surtout sont de très bon niveau et d'une qualité supérieure à la Mazda5. Il reste à voir si la version qui nous sera destinée tiendra d'aussi belles promesses.

Les frais de ce reportage ont été partiellement assumés par Ford USA.

ON AIME

Performances du 1,6 litre

- Confort et niveau sonore

- Polyvalence de l'habitacle

ON AIME MOINS

- Boîte automatique conventionnelle

- Diamètre de braquage important

- Sensation de lourdeur

CE QU'IL FAUT RETENIR

- Fourchette de prix :21 000 $ à 25 000 $ (estimation)

- Frais de transport :nd

- Versions essayées :C-Max et Grand C-Max

- Garantie de base :36 mois/60 000 km

- Consommation obtenue lors de l'essai : 8 L/100 km (estimation)

- Visible dans les concessions :Automne 2011

- Moteur thermique :L4 DACT 1,6 litre turbocompressé

- Puissance (ch. à tr/min):150 ch à 5700 tr/min

- Couple (li.-pi. à tr/min) :180 lb-pi entre 1600 et 4000 tr/min

- Poids (kg) :1496 kg

- Rapport poids/puissance :9,9 kg/ch

- Mode :Traction (roues avant motrices)

- Transmission de série :Semi-automatique 6 rapports

- Autres transmissions :Aucune

- Direction :diamètre de braquage

- Crémaillère :11,4 mètres

- Freins (av -arr) ABS:Disque-Disquede série

- Pneus (de série) :215/50R17

- Capacité du réservoir/essence recommandée: 60 litres/Super