Martin Simek, résidant de Westmount, n'affiche pas l'image que l'on se fait du collectionneur d'automobiles typique. En effet, au départ, ce travailleur autonome dans le textile n'a pas de garage, même s'il possède cinq véhicules et pas les moindres. Par conséquent, trois de ces autos sont tout simplement garées dans la rue, devant sa résidence. Qui plus est, il n'est possible de se garer que d'un seul côté de la rue!

Des voitures de l'Est

C'est lors d'un de ses nombreux voyages en Californie que cet homme d'affaires a découvert le goût de posséder des voitures hors de l'ordinaire. À cette époque, il conduisait une Audi A4 qu'il adorait tout simplement. Le seul problème, c'est qu'il trouvait que l'auto manquait de personnalité. C'est alors qu'il a découvert une Porsche 912E de 1976. Il l'a essayée, l'a aimée et l'a achetée sans vraiment tenir compte du fait qu'il s'agissait d'un modèle très rare à moteur quatre cylindres avec injection. Il a donc remis l'Audi (dont le compteur affichait moins de 30 000 km) au concessionnaire et la Porsche est devenue sa voiture de tous les jours.

Évidemment, il ne tenait pas à ce que cette rare Porsche (il n'y en aurait que quatre de cette configuration mécanique au Canada, selon son propriétaire) soit endommagée par l'hiver. C'est alors que, grâce à ses connaissances européennes, il a découvert et importé une légendaire Trabant, une de ces petites autos plutôt bizarres construites dans ce que nous connaissions, autrefois, comme l'Allemagne de l'Est. Curieusement, M.Simek a bien apprécié sa Trabant 1988 durant les hivers montréalais avant de passer à une Range Rover d'occasion 1994, ce qui lui permet maintenant d'entreposer ses autos de collection durant la saison froide.

Ainsi, M. Simek s'est découvert une âme de collectionneurs d'autos. D'origine tchèque, il s'est mis dans la tête de conduire une voiture typiquement tchèque. Il y a eu environ huit grandes marques d'autos tchèques avant la Seconde Guerre mondiale. Alors que Skoda demeure aujourd'hui la plus populaire (elle fait maintenant partie de la famille Volkswagen), la plus prestigieuse a toujours été Tatra. Grâce à l'internet. M. Simek a trouvé une berline Tatra 603 de 1959 en Arkansas. Puis, il a trouvé une autre Tatra 603, celle-là de 1974, en République tchèque. Il s'est donc procuré les deux autos, prévoyant utiliser la plus vieille comme réserve de pièces. Mais il a décidé de la faire restaurer, ce qui n'a pas été facile. Au départ, il a trouvé un «expert» ontarien qui a réalisé une bonne partie du travail. Mais c'est un mécano de la région montréalaise, Joseph Sfeir, qui en a refait la mécanique avec une facilité presque déconcertante.

Une auto de tous les jours

En fait, le travail de M. Sfeir a été si bien exécuté que Martin Simek utilise maintenant sa Tatra 603 de 1959 de deux à trois fois par semaine pour ses déplacements locaux. Oui, il est possible que vous ayez vu cette voiture dans les rues de la métropole récemment. Cette grande auto de couleur argent (en vérité, elle aurait dû être noire, comme toutes les autres Tatra) est mue par un V8 de 2,5litres refroidi par air et disposé à l'arrière. Selon son propriétaire, ce moteur est nettement suffisant, malgré ses 95 chevaux, pour suivre le flot de circulation régulier. L'auto est munie d'une boîte manuelle à quatre rapports. On la reconnaîtra au décalque CS dans une des glaces de custode. Quelque 20422 Tatra 603 auraient été construites de 1956 à 1975 et la plupart de ces autos ont été utilisées par des administrateurs politiques et industriels d'Europe de l'Est. Très peu se sont retrouvées en Amérique du Nord, mais il semble que l'une d'entre elles ait été livrée à Fidel Castro à Cuba.

L'autre Tatra de M. Simek, la 1974, est actuellement en atelier afin d'être parfaitement restaurée. Elle aussi devrait se retrouver sur les routes du Québec dans un avenir rapproché. Cependant, Martin Simek, maintenant collectionneur aguerri, rêve plutôt du modèle Tatraplan construit de 1948 à 1956 dont un peu plus de 8000 exemplaires ont été produits. Il aurait même été importé chez nous. En avez-vous vu un récemment?

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L'auteur voudrait remercier Gilbert Bureau de sa collaboration.