Si l'on s'en tient à la définition initiale du véhicule de loisir urbain, il se caractérise en théorie par une architecture monovolume «haut de forme» et une grande modularité intérieure basée sur un plancher plat. Les Jeep Compass et Kia Soul appartiennent à cette nouvelle race qui autorise une vraie polyvalence et qui devrait recueillir un maximum de suffrages.

Élégance n'est pas le mot qui vient à l'esprit quand on découvre les carrosseries des deux voitures en lice. Haut sur pattes, doté d'un capot dans le prolongement du pare-brise et d'un hayon vertical, le véhicule de loisir urbain (VLU) ressemble peu ou prou à un utilitaire. Certains constructeurs parviennent mieux que d'autres à s'affranchir des contraintes esthétiques du genre. Vous êtes seuls juges en la matière, mais nous avons constaté que l'apparition du Soul déclenche la curiosité et la sympathie partout où il passe. Le Compass, avec sa carrosserie dessinée comme du prêt-à-monter, ne fait se retourner aucune tête; cela s'explique en raison de ses traits aujourd'hui familiers, car Jeep le commercialise depuis quelques années déjà.

 

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N'aurait-il pas mieux valu confronter le sud-coréen au Nissan Cube? Sans doute, mais le Compass n'a-t-il pas été le précurseur de cette nouvelle tendance, après tout? De plus, le Jeep se trouve sensiblement dans la même fourchette de prix que le Kia. Ce dernier propose, il est vrai, une version d'entrée (1,6 litre) plus intéressante financièrement, mais que nous nous gardons bien de recommander en raison des faibles ressources de son moteur et de ses lacunes au chapitre des accessoires. À ce sujet, mentionnons que la boîte automatique et le régulateur de vitesse ne figurent nullement sur la liste des caractéristiques, même optionnelles, de cette version destinée uniquement à attirer les clients dans les salles d'exposition. Voilà pourquoi nous avons pris rendez-vous avec sa livrée mue par le moteur 2 litres, laquelle coûte quelques milliers de dollars de plus. Mais parions que vous l'aviez deviné...

 

Contrairement au Soul, le Compass est le seul véhicule inscrit à ce match à proposer un rouage à quatre roues motrices. Un atout dont nous n'avons pas tenu compte dans ce match. Le mythe Jeep en prend un coup, mais il faut reconnaître que le Compass s'inscrit parfaitement dans la logique de ce segment et calque sans gêne la stratégie de la concurrence. Et à bon prix. Voilà qui explique pourquoi nous avons plutôt opté pour la version à roues avant motrices (comme le Soul), moins coûteuse, afin d'équilibrer les forces en présence.

 

 

Vie à bord

 

Preuve du repositionnement (à la hausse) des prix des produits sud-coréens, le Soul ne parvient pas à éclipser le Compass au chapitre des accessoires. En fait, l'américain n'a pas du tout à rougir de la comparaison. Ce serait plutôt tout le contraire. Considérant que le Soul vient tout juste d'arriver sur le marché, comment expliquer qu'il ne se soit pas inspiré de certaines astuces créées par Jeep? Des exemples? La lampe de poche encastrée dans la partie arrière du pavillon; ses haut-parleurs articulés qui peuvent être orientés vers l'extérieur quand le hayon est ouvert; ses porte-gobelets éclairés. Face à ce traîneau bourré d'idées, Kia a peu à offrir, si ce n'est cette curieuse molette placée près du contact et qui a pour fonction d'«enflammer» les haut-parleurs et d'émettre des pulsions lumineuses au rythme de la musique de votre choix. Psychédélique, vous dites?

 

Moins innovante peut être, le sud-coréen passe néanmoins devant son rival américain au chapitre des espaces de rangement, guère plus nombreux peut-être, mais assurément plus pratiques. Plus d'espace pour vider nos poches et pour accueillir tous ces accessoires nécessaires à la vie moderne, mais aussi pour les occupants. Surprise. En dépit de ses dimensions plus compactes, le Soul se révèle aussi sinon plus spacieux que le Compass à plusieurs égards. Plus de dégagement, mais aussi une banquette arrière plus confortable, même si l'un des essayeurs invités à ce match trouvait qu'elle «manquait de moelleux».

 

Le Compass se rachète en accueillant plus de bagages que le Soul. La modularité des deux coffres est cependant similaire. L'américain a gagné la faveur de nos essayeurs au chapitre de la position de conduite et quoique son tableau de bord - rénové il y a deux ans - ne soit pas aussi tendance, il n'en demeure pas moins dessiné avec plus de soucis à l'égard de l'ergonomie que celui du Soul.

 

En ville, un capot plongeant dont l'extrémité est invisible depuis le poste de conduite, voire un hayon totalement vertical, ne facilitent pas toujours les manoeuvres de stationnement, on est d'accord. Dans le cas du Compass, cela se complique davantage en raison des massifs montants de toit qui gênent, même dans les virages. Si nos deux véhicules braquent aussi bien l'un que l'autre, le Soul se révèle néanmoins, de par ses dimensions et sa visibilité, le plus agréable en milieu urbain.

 

Photo Ivanoh Demers, La Presse

Le Jeep Compass.

Sur la route

 

Nos deux protagonistes ne remporteront jamais le Nobel de la technologie, mais ils reposent tous les deux sur des architectures connues et éprouvées. En théorie, le Compass paraît avantagé considérant la cylindrée (et tout ce qui vient avec, puissance et couple) de son moteur par rapport au Soul. En pratique, c'est une tout autre histoire. En établissant le rapport poids-puissance de deux véhicules, la différence tient dans un dé à coudre. En effet, celui du Compass s'établit à 8,1 kg par cheval-vapeur comparativement à 8,3 kg par cheval-vapeur pour le Soul.

 

La grande différence entre les deux est la manière d'acheminer la puissance. Le Compass fait appel à une boîte à variation continue (CVT), alors que le Soul adopte une boîte conventionnelle à quatre rapports. Ces deux transmissions sont offertes moyennant supplément. De série, nos deux rivaux d'un jour retiennent les services d'une boîte manuelle à cinq rapports.

 

Aussi bien le dire tout de suite, le rendement général du 2,4 litres nous a déçus. Il a beau signer les meilleurs temps d'accélération (près d'une seconde de mieux que le Soul à l'épreuve du 0-100 km/h), ce moteur consomme trop et vit une relation houleuse et bruyante avec la boîte CVT qui l'accompagne. Le moteur en soi ne manque pas de caractère, mais il le fait savoir en braillant plus qu'on ne le souhaiterait. Le 2 litres de Kia manque de raffinement lui aussi. Et, comme à bord du Jeep, ça s'entend! Notre jugement aurait sans doute été moins sévère s'il y avait eu un rapport supplémentaire, ce qui aurait permis de réduire encore la consommation d'essence. À ce sujet, et contrairement à une autre version essayée dans ces pages récemment, «notre» Soul a enregistré une consommation moyenne de 8,9 L/100 km.

 

Sur la route, le Compass se révèle étonnamment civilisé et confortable. En revanche, son châssis réagit un peu mollement aux changements de trajectoire. Cela n'empêche pas, au fil des kilomètres, d'avoir du plaisir et d'être réconforté par son comportement neutre et prévisible. La confiance s'installe et le Compass se révèle alors un compagnon de route fort agréable. Surtout que ses suspensions filtrent beaucoup mieux (meilleur débattement) les chaussées déformées que celles du Soul.

 

Même si la direction du Compass a été qualifiée de «légère et imprécise» par un des essayeurs, il n'en demeure pas moins celui qui procure le plus d'agrément de conduite et la meilleure tenue de route. En outre, le Compass l'emporte également dans notre sous-catégorie portant sur la sécurité active et passive. En revanche, au chapitre du freinage, le Soul freine mieux que le Compass, qui met près de deux mètres supplémentaires pour s'immobiliser au moment d'un freinage d'urgence à 100 km/h.

 

Budget

 

Considérant les promotions en cours et les accessoires offerts de série, le Compass accumule de précieux points pour prendre l'ascendant sur son rival, qui a jusqu'ici remporté (de peu) les deux premières manches de ce match. Cependant, trop peu trop tard, puisque le Soul parvient à creuser l'écart au chapitre de la consommation et de la garantie.

 

Au cumulatif, le Soul remporte la victoire devant un Compass desservi par une mécanique et, surtout, une transmission CVT visiblement à court de mise au point.

Photo Ivanoh Demers, La Presse

La Kia Soul.