Les mots "Toyota" et "hybride" sont presque devenus synonymes. Ça en dit long sur la domination du constructeur japonais dans le domaine de la technologie essence-électrique. Cette situation a le don d'irriter les concurrents directs du numéro un mondial, dont Ford; après l'Escape, le constructeur américain signe ici une hybride très prometteuse sur base de Fusion. Il reste à voir maintenant si l'élève peut supplanter le maître.

L'hybridation combine deux systèmes de propulsion, le plus souvent un moteur thermique et un moteur électrique. On classe les différents systèmes selon leur degré d'hybridation (rapport de la puissance électrique motrice disponible par rapport à la puissance totale de traction). Il existe actuellement trois degrés d'hybridation. Le premier, appelé light hybrid, permet de mettre en veille le moteur thermique à l'arrêt du véhicule. Vient ensuite le mild hybrid, qui récupère l'énergie du freinage et qui fait appel au moteur électrique lors des accélérations. Le dernier degré d'hybridation, dit full hybrid, permet de fonctionner en mode électrique pur, dit ZEV (Zero Emission Vehicle).

 

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Cela dit, il faut savoir que le degré d'hybridation de nos deux protagonistes d'un jour est le même. Sans entrer dans des détails trop techniques, disons pour faire court que le système de Toyota se trouve ici à la remorque de celui de Ford, qui permet d'atteindre 70 km/h en mode tout électrique... Et cela se traduit naturellement par une efficacité énergétique encore plus grande dans le cas de la Fusion, comme en font foi les consommations enregistrées dans ce match (voir tableau). Et en adoptant une conduite (très) coulée, l'écart entre les deux peut aisément atteindre en moyenne 1L/100 km. Un gouffre.

 

En ville, l'écart augmente encore, toujours à l'avantage de la Ford. La Camry n'a visiblement pas les mêmes ressources (sur le plan électrique) pour demeurer muette sur une aussi longue distance. Dès 30 km/h, le quatre-cylindres de la Toyota se remet en marche alors que celui de la Fusion dort toujours... Concluons ce chapitre sur la consommation en soulignant l'optimisme éhonté des ordinateurs de bord de nos deux concurrentes. D'accord, ce ne sont certainement pas les seuls à procurer des informations aussi fictives, mais nous nous attendions tout de même à un peu plus de rigueur. Soulignons tout de même que la somme d'informations transmises par l'ordinateur de bord de la Ford sur le fonctionnement de son système hybride est fort complète (et fort bien présentée à part ça) par rapport à celle de la Toyota.

Vie à bord

 

Revenons à la nomenclature habituelle de nos matchs du mois pour aborder la question de la vie à bord. Fidèles à notre habitude, nous vous laissons seuls juges de la physionomie de nos deux protagonistes. Attardons-nous plutôt à relever certaines statistiques qui ne sautent pas aux yeux. La Fusion occupe sans doute un peu plus d'espace dans la rue, mais elle ne repose pas sur un empattement aussi long que sa rivale japonaise. La faute incombe à l'étroitesse de sa caisse, qui dessert la Ford au chapitre du dégagement accordé aux hanches et aux épaules. On apprécie en revanche l'angle d'ouverture des portières antérieures, qui permet d'accéder à la banquette avec facilité - attention tout de même de ne pas vous cogner la tête contre l'arche du pavillon. Pour pallier cet inconvénient de même que la réduction de la garde au toit qui s'ensuit, l'assise de la banquette est trop près du plancher. Malgré tout, comme la Camry, la Fusion accueille quatre personnes sans problème. Mais puisqu'il faut trancher, nous préférons le confort de la banquette arrière de la Camry pour voyager sans bagages... En effet, système hybride oblige (les batteries sont logées sous la plage arrière; entre le coffre et l'habitacle, si vous préférez), la japonaise perd non seulement en volume utilitaire, mais également en modularité. La Fusion s'en tire mieux que la Toyota à ce chapitre, et se révèle du coup plus pratique.

 

Rien à redire toutefois sur la position de conduite, ni sur la disposition des principales commandes de nos deux participantes. La qualité des plastiques n'est cependant pas très valorisante en ce qui concerne la Fusion, et cela est d'autant plus regrettable considérant les efforts réalisés récemment par Ford dans ce domaine. Si nous étions en droit de nous attendre à mieux de la part de Ford, nous n'avons pas été franchement surpris par la qualité de l'exécution à bord de la Toyota.

Photo Bernard Brault, La Presse

Ford et Toyota utilisent la technologie "série-parallèle" pour leurs berlines Fusion et Camry. Ce système permet au moteur thermique de se mettre en mode "veille" à un feu rouge, dans un bouchon de circulation ou à basse vitesse.

Même si la gaieté ne déferle pas non plus sur la physionomie de l'habitacle tout de gris vêtu de la Camry, la qualité de la finition est irréprochable. Autres motifs de satisfaction: la position de conduite excellente, le combiné d'instruments constamment éclairé, et les repères vite acquis. Avec de nombreux rangements pour les pièces, les lunettes, le portable et des vide-poches dans les accoudoirs ou sous le tableau de bord, la Camry se révèle des plus agréables à habiter. La Fusion l'est presque tout autant, si ce n'est le dégagement plus compté à l'arrière, les baquets pas aussi "moelleux" (dixit l'un des essayeurs) et l'emplacement de certaines commandes (celles des phares par exemple), pas très intuitif.

 

Sur la route

 

L'ajout du système hybride n'altère en rien le comportement routier de nos deux concurrentes. Elles sont certes un peu plus lourdes, mais leur comportement est sensiblement le même que celui des modèles "conventionnels".

 

Le comportement du châssis de la Fusion a la précision de conduite et l'équilibre attendus, sans roulis très marqué. La direction est consistante quand il le faut et permet de l'inscrire aisément dans les virages. Le comportement est vraiment agréable, surtout que la voiture bénéficie de veilles électroniques qui aident à la motricité, au freinage (d'ailleurs excellent) et à la précision de la trajectoire. Certains essayeurs ont reproché à la Fusion sa suspension plutôt ferme, mais tous ont reconnu qu'elle proposait, et de loin, le meilleur compromis entre tenue de route et confort. Et tout pourrait être mieux encore si la Fusion braquait aussi bien que sa concurrente d'un jour.

 

La Camry, pour sa part, propose un comportement routier parfaitement prévisible et plus encore, car il est géré par le correcteur de stabilité électronique. C'est sans doute ce filtre qui éloigne un peu plus les sensations du conducteur, malgré une direction assistée bien dosée. Équilibrée en courbe, la Camry survire progressivement quand on lève le pied de l'accélérateur. L'acoustique étant très bonne, on en conclura que les quelques kilos supplémentaires de matériaux insonorisants ont été savamment utilisés.

 

Grondant un peu à l'effort, le quatre-cylindres de 2,5 litres de la Fusion se révèle pourtant plus silencieux que le moteur thermique de la Camry. Ce dernier signe en revanche de meilleures accélérations et de meilleures reprises (est-ce bien important?) que la Fusion, visiblement handicapée par son poids élevé. Mentionnons que ces deux tractions font appel à une boîte à variation continue (CVT).

Photo Bernard Brault, La Presse

L'ajout du système hybride n'altère en rien le comportement routier de nos deux concurrentes. Elles sont certes un peu plus lourdes, mais leur comportement est sensiblement le même que celui des modèles "conventionnels".

On ne saurait clore ce chapitre du châssis sans évoquer le freinage qui, dans le cas de la Camry, manque de progressivité et d'efficacité. Les garnitures étaient-elles trop tendres ou les étriers manquaient-ils de dents? Toujours est-il que le freinage de la Fusion est en tout point supérieur et permet d'immobiliser la voiture sur une distance plus courte.

 

Budget

 

Sur le plan de l'efficacité énergétique et des émissions polluantes, la Fusion l'emporte haut la main. Aucune discussion possible. En revanche, lorsque vient le moment de finaliser l'achat, le coeur balance. À peine plus chère, la Camry Hybrid est actuellement offerte à des conditions de financement plus avantageuses que l'américaine. À cela, il convient d'ajouter une valeur résiduelle plus élevée pour la japonaise ainsi qu'un service après-vente légèrement supérieur. Qu'à cela ne tienne, la Fusion grimpe sur la plus haute marche de notre podium en raison de sa technologie hybride plus poussée, de son économie de carburant accrue et de son comportement plus dynamique. L'élève surpasse (de peu) le maître.

 

L'Auto tient à remercier Jean-François Guay pour sa précieuse collaboration à ce match.

Photo Bernard Brault, La Presse

La somme d'informations transmises par l'ordinateur de bord de la Ford sur le fonctionnement de son système hybride est fort complète (et fort bien présentée à part ça) par rapport à celle de la Toyota.