Réglons d'abord la question que vous vous posez: pourquoi diable opposer l'Insight à «l'autre hybride» de Honda et non à la Prius? Simplement parce que ces deux voitures boxent dans des catégories différentes. Notamment, l'Insight ne permet pas de circuler en mode 100% électrique et son toit n'est pas composé de panneaux solaires. La Prius est plus puissante, plus sophistiquée et vraisemblablement (son prix n'avait pas été annoncé au moment d'écrire ces lignes) plus chère. Alors, l'Insight est-elle unique? Sans doute, si vous optez pour le modèle de base (LX), vendu 23 900$. Mais, si vous considérez la livrée la mieux équipée (EX), à 27 500$, il vaut mieux préférer la Civic Hybrid, dont le prix unique est de 27 350$. C'est clair, non?

Voyez le tableau de pointage et le survol technique

Opposons donc la Civic Hybrid à l'Insight LX. Pour l'obtenir à un prix aussi attrayant, il faut délester cette dernière de quelques accessoires, mais pas de l'essentiel. Par exemple: le climatiseur, le déverrouillage à distance et le régulateur de vitesse. Comparativement à la Civic Hybrid, la plus «pauvre» des Insight ne paraît pas trop démunie, mais ce n'est qu'en apparence: elle n'a ni lampes de lecture, ni moulures latérales, ni jantes en alliage, ni même de miroir de courtoisie à l'intention du passager avant. Pas même de correcteur de stabilité électronique, lequel est de série dans la Civic Hybrid. En revanche, l'Insight propose un témoin de pression des pneus.

 

Si les deux protagonistes diffèrent en contenu, attendez de voir la forme. Celle de l'Insight n'est pas sans rappeler vous savez quoi (oui, la Prius) avec ses cinq portes, alors que la Civic Hybrid, elle, a l'air d'une... Civic.

Par sa taille, l'Insight se compare à certaines compactes peut-être (la Jetta de Volkswagen, par exemple), mais pas à la Civic Hybrid. Plus enveloppée, cette dernière offre à ses occupants plus de dégagement. En fait, à l'exception de l'espace accordé aux jambes à l'avant (1074 mm par rapport à 1072 mm), cette Civic se révèle la plus logeable à tous les points de vue, sauf peut-être en ce qui a trait aux bagages. Non seulement les batteries de la Civic Hybrid monopolisent une part du coffre, mais leur disposition (derrière les dossiers de la banquette arrière) bloquent net la possibilité de transporter de longs objets. Voilà sans doute l'un des principaux attraits de l'Insight: elle est plus fonctionnelle. Comme ses batteries se trouvent sous le plancher, l'Insight offre la possibilité de moduler la taille du coffre en rabattant en tout ou en partie les dossiers de la banquette arrière. Bravo!

Par rapport à la Civic Hybrid, la présentation intérieure de l'Insight paraît étonnamment austère. Moins valorisante, certes, mais également moins rigoureuse en matière de finition et d'assemblage. Rappelons que la doyenne des hybrides de Honda s'habille de matériaux de bien meilleure qualité. En revanche, elle est beaucoup moins «divertissante» que sa cadette. Moins interactive aussi. Comment? Par le biais de tout un tas de petits assistants aussi amusants qu'un jeu vidéo.

 

Par exemple, en analysant en temps réel votre conduite au moyen d'un halo de couleurs dans la partie supérieure de l'indicateur de vitesse. Si vous conduisez «bleu», il faudra vous appliquer. Si c'est «vert», vous êtes sur la bonne voie et de petits arbres stylisés bourgeonneront de bonheur et s'accumuleront dans un rectangle positionné dans un bloc inférieur. Pour les accumuler plus rapidement, vous pouvez faire appel à la magie ECON, le petit bouton vert, là à gauche. En appuyant dessus, la gestion électronique du système hybride invite le climatiseur à souffler moins fort, le moteur à essence à se déchaîner moins vite et la boîte de vitesses à donner un rendement optimal. Voulue plus «sérieuse» sans doute, la Civic Hybrid propose peu de distractions à ses occupants.

Par rapport à ceux de l'Insight, les sièges de la verte Civic permettent de parcourir de longues distances sans se fatiguer autant. On notera cependant qu'il est difficile d'y trouver une position de conduite agréable à bord de la Civic. Quant à ses essuie-glaces, par mauvais temps, ils doublent la superficie des piliers «A», ce qui nuit considérablement à la visibilité. À ce sujet, l'Insight ne fait guère mieux, surtout vers l'arrière où l'on doit composer avec de larges montants latéraux et avec cette double lunette scindée en deux, comme à l'époque de la CRX (ou pire encore, de l'Aztek).

Sur la route

Comme il se doit, ces deux véhicules sont animés par deux moteurs à essence et électrique fonctionnant en bonne intelligence. Un calculateur électronique répartit la contribution de chaque source selon les conditions d'utilisation afin de toujours offrir le meilleur rendement. À retenir, aussi: le moteur électrique vient ici uniquement en soutien au moteur à essence et ne s'y substitue jamais, comme c'est le cas par exemple des systèmes de Toyota ou de Ford.

 

À l'arrêt, le quatre-cylindres 1,3 litre des Insight et Civic Hybrid ne fonctionne pas. Lors des phases de décélération et de freinage, l'énergie dissipée est utilisée pour recharger les batteries. Les similitudes entre nos deux protagonistes s'arrêtent ici. En effet, avec la Civic Hybrid, si l'on relâche la pédale de frein, le moteur électrique assure le rôle de démarreur et, en utilisation normale, vient épauler le moteur à essence (sur une très courte distance). Pas avec l'Insight.

Les deux véhicules sont dotés d'une «hybridation» légère, presque subliminale. Conséquemment, les avantages liés à cette technologie sont réduits à leur plus simple expression. En pratique, les niveaux de consommation avancés par le constructeur paraissent bien optimistes. D'ailleurs, au terme d'un parcours effectué en adoptant une allure très raisonnable, en prenant bien soin de poser le pied on ne peut plus légèrement sur l'accélérateur et en faisant appel, dans l'Insight, à l'ECON (oui, le petit bouton vert), jamais nos deux rivales d'un jour ne sont parvenues à descendre sous la barre des 5 L/100 km. Manque d'application, dites-vous? Peut-être. Soulignons que la Civic Hybrid sirote l'essence avec plus de modération encore et que son réservoir plus grand lui assure une meilleure autonomie.

 

Volant en main, l'Insight se «pilote» comme une Civic. Enfin presque, puisque ses pneus verts ont, comme ceux de la Civic Hybrid, une adhérence très limitée, surtout lorsque la chaussée est détrempée. À ce sujet, rappelons que le fait d'optimiser les performances d'un véhicule afin de réduire sa consommation ne devrait pas se faire au détriment de la sécurité active. Donc, au risque de «gaspiller» quelques gouttes d'essence, il vaut mieux installer des pneus adaptés à nos conditions routières et climatiques.

Agile malgré un diamètre de braquage un peu long, dotée d'une direction légère (un peu trop à notre goût), l'Insight se prête mieux à une utilisation urbaine que routière. Sur une voie rapide, nous lui reprochons ses suspensions (trop) fermes et trépidantes; son habitacle faiblement insonorisé et sa tenue de cap incertaine. Au quotidien, la conduite de la Civic Hybrid donne beaucoup plus de satisfaction. Plus neutre dans ses réactions, plus équilibrée aussi, elle paraît beaucoup plus aboutie que «l'autre» hybride de ce match. Est-ce son toucher de la route supérieur? Sa courroie de transmission plus tendue (boîte CVT)? Ou simplement son confort accru sur les nombreuses irrégularités du revêtement? Toujours est-il que la Civic remporte sans discussion le deuxième acte de ce duel.

Budget

Plus douée sur le plan dynamique, la Civic Hybrid affiche également des performances environnementales légèrement supérieures à celles de l'Insight. On n'en attendait pas moins de sa part, considérant son prix. La déception est plutôt venue de l'Insight, et ce malgré un préjugé très favorable des essayeurs de ce match. Tous s'attendaient à mieux et à meilleur prix. «Si elle coûtait moins de 20 000$, ou si les taux de financement étaient plus avantageux, je la prendrais en considération», a résumé l'un d'eux.

Comme quoi même pour «l'hybride la moins chère», il y a un prix à payer. Surtout en l'absence de primes gouvernementales.

L'auteur tient à remercier Jean-François Guay pour sa contribution à la réalisation de ce match.