Le constructeur automobile américain General Motors, après un règne de près de 80 ans sur l'automobile mondiale, s'est déclaré insolvable lundi, après avoir tenté en vain de se restructurer hors des tribunaux. Le géant chancelant s'est placé sous la protection de ses créanciers, invoquant le célèbre chapitre 11 de la Loi américaine sur la faillite.

GM a déposé son bilan devant le tribunal de la faillite du district sud de New York, celui-là même qui a supervisé le redressement judiciaire de son petit concurrent, Chrysler. La firme a des dettes de 172,8 milliards de dollars US et des actifs de seulement 82,3 milliards. Elle a perdu 88 millions de dollars US depuis 2005.

Dimanche soir, le gouvernement américain avait déjà annoncé que GM allait entreprendre une restructuration draconienne sans cesser ses opérations, grâce à l'aide financière de l'État.

Le plan de redressement de GM par le gouvernement américain prévoit notamment la création d'une «New GM», détenue dans un premier temps à une très large majorité par les gouvernements américain et canadien (à 72,8%). Les actifs non rentables et l'essentiel des dettes seront versés dans la «mauvaise GM», et liquidés.

La nouvelle GM passera entre 60 et 90 jours sous la protection du chapitre 11, espèrent la direction de la compagnie et les stratèges économiques du gouvernement américain.

La coquille contenant les mauvais actifs et les dettes de GM pourrait passer beaucoup plus de temps devant le tribunal de la faillite, mais cela n'aura plus d'impact sur la GM restructurée.

Pour financer l'opération, l'administration du président Barack Obama apportera à cette société 30,1 milliards de dollars et l'État canadien et la province d'Ontario - où GM possède de nombreuses usines - 9,5 milliards. Durant «le temps nécessaire», le Trésor américain (le ministère des Finances) américain détiendra 60 % des actions de GM, tandis que les gouvernements du Canada et de l'Ontario auront 12 %.

Le gouvernement américain entend se départir de ses actions dès que possible. Au Canada, le gouvernement fédéral a déjà indiqué qu'il ne s'attend pas à être remboursé.

Un fonds de retraite syndical recevra 17,5% tandis que 10% reviendront aux détenteurs d'obligations non garanties. Les actionnaires actuels perdront leur mise.

«Aujourd'hui est une étape dans la réinvention de GM en tant qu'entreprise plus petite, plus centrée sur le consommateur et à la structure de coûts plus compétitive», a déclaré le directeur général de GM Fritz Henderson.

GM va suivre une procédure de redressement judiciaire accélérée, à laquelle Chrysler a eu également recours, ce qui a permis à ce dernier de faire valider sa restructuration en un mois.

Chrysler a obtenu dans la nuit de dimanche à lundi le feu vert du juge Arthur Gonzalez à son plan de sortie de faillite. Celui-ci prévoit l'émergence d'une nouvelle entité centrée sur les actifs les plus sains de

l'ancien Chrysler, reprise par un consortium mené par l'Italien Fiat.

Ce dernier détiendra 20% du consortium, avec une option d'achat pour monter à 35%. Le fonds de retraite syndical détiendra 68%, les 12% restants étant détenus par les gouvernements américain et canadien.

Reste que le retour de Chrysler ne sera pas aussi rapide qu'espéré: des fonds de l'État de l'Indiana, détenteurs d'obligations Chrysler, ont fait appel lundi de la décision de justice. Ils sont hostiles à la restructuration de la dette garantie du groupe, qui a été annulée aux deux-tiers.

Le temps presse: Fiat, qui attend depuis janvier de finaliser son alliance avec Chrysler, a fait savoir qu'il pourrait lancer la serviette si aucun accord n'est en place au 15 juin, échéance qui pourrait être dépassée en cas d'appel.

Aaron Bragman, analyste automobile chez Global Insight, relevait qu'un dépôt de bilan de GM, «impensable il y a six mois» a désormais «une chance plus décente de succès, au vu du précédent Chrysler».

GM devrait avoir besoin de plus de temps pour son redressement judiciaire, étant trois fois plus gros que Chrysler. Washington s'est fixé pour objectif de faire émerger le «nouveau GM» de la faillite dans un délai de 60 à 90 jours.