À quand une voiture aussi propre dans nos entrées de garage? Il faudra attendre dix ans encore. Patience!

Malgré son ancienneté, son pauvre rendement énergétique et ses émissions nocives, le moteur à explosion domine toujours le débat automobile. La super batterie électrique, qui pourrait donner à la voiture une autonomie, une agilité et un coût de revient équivalents aux performances des moteurs conventionnels, demeure un rêve. Les véhicules hybrides (mi-essence, mi-électriques) s’avèrent plus prometteurs, bien qu’ils soient considérés comme des solutions de transition.

Les regards convergent au­jourd’hui vers les progrès rapides de la pile à combustible, qui perd en poids et encombrement ce qu’elle gagne en performance. En 1994, Mercedes a présenté une grosse camionnette dont le système, entre réservoirs d’hydrogène, tubulures diverses et piles innombrables, laissait à peine de la place à un conducteur. En 1997, une petite Classe A Mercedes était équipée de piles plus performantes, mais elle n’acceptait toujours qu’un conducteur et un passager. Le mois dernier, DaimlerChrysler a dévoilé une Classe A dont la centrale énergétique est logée sous le plancher de la voiture, permettant à cinq passagers de monter à bord. Vitesse: 145 km/h. Autonomie: 450 km. Pas de bruit de fonctionnement, quelques gouttes d’eau en guise de fumée au bout de l’échappement.

À l’instar de ses principaux concurrents, comme GM, Toyota ou Ford, DaimlerChrysler jure qu’il commercialisera une voiture dotée d’une pile à combustible d’ici quelques années, à un prix de 10 à 15% supérieur à un véhicule similaire équipé d’un moteur thermique. Mais le coût d’une pile est encore exorbitant et son poids, malgré les progrès réalisés, est toujours important. Surtout, il sera difficile de mettre en place une infrastructure d’approvisionnement en hydrogène pour le commun des automobilistes. Cher à produire, délicat à manipuler, l’hydrogène ne devrait pas être distribué dans les stations-service. En revanche, il est plus facile de le produire à partir de méthanol. Liquide à température ambiante, le méthanol peut être obtenu à partir du gaz naturel ou de la biomasse (déchets végétaux). Utilisé comme carburant d’une pile à combustible, il engendre certes des émissions de CO2, mais deux fois moins qu’un moteur à combustion interne, et il ne dégage pas de CO, HC, NOx ou particules. Autre avantage, le méthanol pourrait être offert sans trop d’encombre dans le réseau des stations-service.

Tout ce qui peut être inventé a été inventé, claironnait en 1899 Charles Duell, alors responsable du Bureau américain des brevets. S’il est facile, un siècle plus tard, de se moquer du constat, il faut reconnaître que Charles Duell avait raison sur un point. La pile à combustible, qui pourrait un jour remplacer l’essence, a été inventée en 1839, soit 40 ans après la batterie et 40 ans avant le moteur à explosion. Le Britannique William Grove, un ami de Faraday, avait constaté que lorsqu’il déconnectait son appareil à électrolyse, le processus électrochimique s’inversait. La pile à combustible est née de cette observation.

La pile comprend un carburant (l’hydrogène), un oxydant (l’oxygène), deux électrodes et une mem­brane centrale qui facilite les échanges de particules. À la longue, si une batterie se consume elle-même, une pile à combustible se recharge indéfiniment tant qu’on la nourrit avec de l’hydrogène. Elle produit de l’électricité, de la chaleur et une émission résiduelle au-dessus de tout soupçon: de l’eau.

L’invention est tombée dans l’oubli pendant des décennies. L’aventure spatiale, dans les années 60, l’a réactivée. La NASA a utilisé et utilise encore des piles à combustible dont le processus électrochimique requiert d’importantes quantités d’or et de platine. Ces petites centrales énergétiques seraient donc très chères à produire en série. Des hôpitaux ont également recours à cette technologie pour leur production d’électricité. Reste que l’avenir de la pile à combustible, qu’on annonce prometteur, passe essentiellement par un usage automobile et domestique.