Plus de 10 000 Québécois souffriraient chaque année du syndrome de stress post-traumatique à cause d'un accident routier. Cette conséquence mal connue des accidents d'automobile est aussi mal traitée, car seulement une petite partie de ces victimes sont soignées.

Plus de 10 000 Québécois souffriraient chaque année du syndrome de stress post-traumatique à cause d'un accident routier. Cette conséquence mal connue des accidents d'automobile est aussi mal traitée, car seulement une petite partie de ces victimes sont soignées.

«Tout le monde connaît des gens qui ont peur en voiture, ou qui sont marqués par un accident, explique Ed Hickling, professeur du Collège médical d'Albany qui a publié le premier livre sur le sujet, After the Crash, en 1997. Mais c'est un problème beaucoup plus courant que l'on croit. Un million de passagers et d'automobilistes souffrent de syndrome de stress post-traumatique chaque année. Des dizaines de milliers d'entre eux restent marqués à long terme, plus d'un an après l'accident. La plupart d'entre eux ne reçoivent jamais de traitement.»

En gros, le quart des accidents avec blessés cause un syndrome de stress post-traumatique (SSPT), selon M. Hickling, qui vient de publier trois nouveaux livres sur le sujet. Comme les accidents routiers font plus de 50 000 blessés chaque année au Québec, on peut considérer qu'ils causent un peu plus de 10 000 cas de SSPT, dont quelques centaines à long terme.

M. Hickling s'est intéressé au sujet parce qu'il a travaillé avec des vétérans de guerre dans les années 80. «Les vétérans ont souvent un SSPT, explique-t-il depuis son domicile de l'État de New York. Quand je suis arrivé dans la pratique privée, j'ai été frappé de voir les mêmes symptômes chez des victimes d'accidents routiers. Je me suis penché sur le sujet et j'ai constaté avec surprise l'ampleur du problème.»

L'une des raisons expliquant la méconnaissance du problème est l'importance de la conduite automobile. «La plupart des automobilistes n'ont pas le choix de conduire, dit-il. Il n'y a pas d'autre exemple d'activité aussi répandue qui cause aussi souvent le SSPT. Par exemple, la peur de prendre l'avion est beaucoup mieux acceptée par la société que la peur de conduire.»

L'un des facteurs augmentant le risque de SSPT est la responsabilité. «Les automobilistes qui sont responsables de l'accident, parce qu'ils se sont endormis ou allaient trop vite, par exemple, sont moins susceptibles d'avoir du SSPT, dit M. Hickling. Ils savent qu'ils peuvent faire des changements pour diminuer leur risque d'avoir un autre accident. Les victimes qui ne sont pas responsables de l'accident n'ont aucun moyen de diminuer leur risque.»

Fait à noter, les passagers d'automobilistes responsables de l'accident avaient eux aussi moins de risque de souffrir de SSPT. Selon M. Hickling, une approche intéressante de psychothérapie est d'explorer les modifications à la conduite automobile permettant de réduire le risque d'accident, même si l'automobiliste n'était pas responsable. Par exemple, regarder plus souvent dans le rétroviseur pour mieux jauger le comportement et la vitesse des autres automobilistes.

Les femmes souffriraient trois à quatre fois plus souvent de SSPT que les hommes. «C'est en partie dû au fait que les hommes sont plus souvent responsables des accidents, dit M. Hickling. Mais il faut tenir compte du risque plus élevé des femmes en général de souffrir de problèmes psychologiques comme la dépression. Les femmes sont aussi plus susceptibles de souffrir de SSPT après un désastre naturel comme un tremblement de terre. Peut-être est-ce le résultat de l'évolution : les hommes sont plus résistants devant la mort parce que, dans la préhistoire, ils se trouvaient souvent dans des situations de chasse ou de guerre. Il ne fallait pas qu'ils réagissent trop fort et que cela les empêche de retourner chasser.»

Parmi les autres facteurs influençant le risque de SSPT, on trouve la sévérité des blessures, des épisodes antérieurs de dépression, des traumatismes antérieurs, un long arrêt de la conduite automobile après l'accident (le mieux est de recommencer le plus rapidement) et la peur de mourir. «Aujourd'hui, on peut survivre à des accidents terrifiants grâce aux sacs gonflables, commente M. Hickling. On peut avoir eu peur de mourir même si on n'a finalement que des blessures légères.»

2,9 millions $

Les traitements psychologiques constituent 5,1 % des frais médicaux remboursés par la Société de l'assurance automobile du Québec. En 2004, la SAAQ a déboursé 2,9 millions $ en frais psychologiques.