S'il semble banal et sans grand intérêt architectural, l'immeuble commercial à quatre étages du 5363, rue Saint-Denis, à Montréal, représente quand même une des pages importantes de la petite histoire automobile de Montréal. Clermont Chevrolet Cadillac célèbre en effet son 90e anniversaire.

S'il semble banal et sans grand intérêt architectural, l'immeuble commercial à quatre étages du 5363, rue Saint-Denis, à Montréal, représente quand même une des pages importantes de la petite histoire automobile de Montréal. Clermont Chevrolet Cadillac célèbre en effet son 90e anniversaire.

Fait inusité, l'entreprise familiale, qui a su résister aux divers changements de l'industrie, a toujours eu un des membres de la famille Clermont à sa barre. L'actuel président de Clermont Chevrolet Cadillac est Pierre Clermont. Il dirige l'entreprise avec ses deux frères Michel et Philippe, après que leur père, Pierre, leur eut vendu ses parts. C'est d'ailleurs ce dernier qui nous a raconté l'histoire de l'entreprise.

Le tout a débuté il y a 90 ans, le 6 novembre 1916, alors que son grand-père, Georges N. Clermont, de Saint-Eugène en Ontario, fonde la Clermont Motor Sales, avec pignon sur rue Saint-Denis, près de Rachel. Il avait alors une formation en «coachwork», que l'on traduirait aujourd'hui par carrosserie.

Sa première concession, comme ce fut le cas pour plusieurs commerçants nord-américains, mettait en vedette les produits Ford. À cette époque, on s'arrachait les modèles T (vendus à des prix que l'on considérerait ridicules aujourd'hui). Mais alors que ce véhicule vieillissait, et qu'Henry Ford s'entêtait à ne pas l'améliorer, Georges Clermont a eu une vive discussion avec le légendaire industriel lui-même. Il a finalement abandonné les produits Ford pour aller du côté de Buick-McLaughlin (ancêtre de GM du Canada), de 1925 à 1935.

«Ford et mon grand-père étaient deux têtus», souligne Pierre Clermont.

C'est à cette époque que le patriarche des Clermont fait construire l'immeuble du 5363, rue Saint-Denis, le même qui abrite encore aujourd'hui le commerce de la famille Clermont. On y vendit des Buick jusqu'en 1935.

Cette année-là, la compagnie Chrysler fait à Georges N. une offre qu'il ne peut refuser. En plus de vendre les autos et camions de la marque, Clermont Motor Sales devient aussi le distributeur officiel des véhicules et des pièces Chrysler de la ville de Kingston en Ontario jusqu'aux provinces de l'Atlantique.

Pour la petite histoire, rappelons que Chrysler en est alors à ses débuts comme constructeur automobile. Au même moment, les fils de Georges N., Georges O. et Émile, se joignent à l'entreprise familiale.

L'entente avec Chrysler est si prospère que le grand constructeur américain confie à l'entreprise montréalaise le soin de reconstruire des moteurs pendant la Deuxième Guerre mondiale. Comme on ne construisait pas de voitures neuves durant cette sombre période, Clermont avait consacré tout un étage de son entreprise à la reconstruction de moteurs pour véhicules de tourisme, pendant que les usines de Detroit fabriquaient des machines de guerre. La trentaine d'employés affectés à cette tâche produisait aussi des freins et des disques d'embrayage.

Clermont Motors a vendu des produits Chrysler pendant 27 ans. Georges N. est décédé en 1953 cependant que son fils Émile C. meurt subitement en 1956. Les petits-fils Pierre et Jean-Paul ont joint l'entreprise familiale vers la fin des années 40. Ils ont acheté les parts de leur père Georges O. en 1972.

Pierre se souvient des années difficiles, surtout 1957, alors que les produits Chrysler souffraient de nombreux problèmes de finition et de fiabilité.

Le retour de GM

En 1962, General Motors invite Georges O. et Jean-Paul à la société mère canadienne d'Oshawa. Jarry Motors, qui ne vendait alors que des Oldsmobile, venait de fermer ses portes. Clermont ne voulait pas vendre seulement des Oldsmobile. La concession de la rue Saint-Denis a donc obtenu aussi de vendre des Chevrolet.

Au passage, l'entreprise est devenue Clermont Chevrolet-Oldsmobile et, plus récemment, Clermont Chevrolet-Cadillac, depuis la disparition de la marque Oldsmobile. La prestigieuse marque Cadillac a été attribuée à Clermont en 1994, à la suite de la fermeture d'Avenue Pontiac-Buick-Cadillac.

Pierre Clermont a été président de la Corporation des concessionnaires automobiles de Montréal et du Salon de l'auto de Montréal, en plus de participer à la fondation de l'Institut canadien de l'auto à la fin des années 80.

Les 90 prochaines années...

Aujourd'hui, Clermont vend toujours des produits Chevrolet et Cadillac, autos et camionnettes. Les quatre étages de l'édifice servent désormais d'entrepôt pour les véhicules les plus luxueux (incluant certaines autos de collection de la famille).

Pierre, le fils et actuel président de la compagnie, entrevoit des années de changement intéressantes avec les véhicules hybrides et la concurrence asiatique. Mais, comme ses deux frères, il espère que le nom Clermont sera là au moins pendant les 90 prochaines années.

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CLERMONT AU FIL DES ANS

Clermont Chevrolet-Cadillac

Fondée en 1916

Édifice actuel construit en 1927

Environ 60 employés

Plus de 1000 voitures vendues par année

FONDATEUR

Georges N. Clermont (1916)

FILS ET SUCCESSEURS

Georges O. Clermont

Émile Clermont

PETITS-FILS ET SUCCESSEURS

(1972)

Pierre Clermont

Jean-Paul Clermont

ARRIÈRE-PETITS-FILS SUCCESSEURS (1990)

Pierre Clermont fils

Michel Clermont

Philippe Clermont