Juillet 2000 au Japon. Un scandale éclabousse Mitsubishi. Un document secret révèle que le constructeur cache depuis 20 ans des milliers de plaintes sur des défectuosités de ses véhicules. Mitsubishi est forcé de rappeler des centaines de milliers de voitures. En 2004, les autorités perquisitionnent encore ses locaux. Et découvrent d'autres plaintes cachées, dont l'instabilité de la roue d'un camion qui aurait causé quelques accidents mortels.

Juillet 2000 au Japon. Un scandale éclabousse Mitsubishi. Un document secret révèle que le constructeur cache depuis 20 ans des milliers de plaintes sur des défectuosités de ses véhicules. Mitsubishi est forcé de rappeler des centaines de milliers de voitures. En 2004, les autorités perquisitionnent encore ses locaux. Et découvrent d'autres plaintes cachées, dont l'instabilité de la roue d'un camion qui aurait causé quelques accidents mortels.

Chaque année, au Canada, des modèles naissent aussi avec des défauts de sécurité. Mais à l'opposé de Mitsubishi au Japon, les constructeurs collaborent presque toujours. Heureusement. Car contrairement aux États-Unis, le gouvernement fédéral ne peut déclarer unilatéralement un rappel.

«Au Canada, c'est le constructeur qui doit signaler tout défaut lié à la sécurité dès qu'il en prend connaissance», explique Claude Roy, directeur pour l'application des règlements sur la sécurité des véhicules à Transport Canada. «D'abord, il doit aviser Transport Canada. Puis contacter les propriétaires du modèle pour leur expliquer le problème et les réparations requises.»

«Dans plus de neuf rappels sur 10, le constructeur prend cette initiative», observe George Iny, président de l'Association de protection des automobilistes (APA).

Dans les autres cas, le fabricant ne détecte pas les défauts. Ou du moins il ne les signale pas. C'est plutôt le public qui alerte Transport Canada. Si une enquête confirme le défaut de sécurité, le gouvernement négocie avec le manufacturier pour obtenir le rappel. Et si les négociations achoppent, il peut recourir aux tribunaux. Une étape que Claude Roy assure ne jamais avoir dû franchir.

Reste que certains rappels sont plus longs à obtenir. Ceux qui impliquent le plus de véhicules traînent plus souvent, car ils coûtent plus cher au fabricant, prétend George Iny.

À ces coûts directs s'ajoutent l'impact sur l'image. «Aucun constructeur n'aime publiciser ses défauts mécaniques ou renvoyer ses clients au garage. Pourtant, un rappel ne devrait pas être perçu négativement», croit Stephen Beatty, porte-parole de Toyota Canada. «Ce n'est pas le nombre, mais bien la qualité de la gestion des rappels qui prouve la valeur d'une compagnie», souligne-t-il.

Gratuit

La loi oblige seulement le constructeur à identifier les défauts et les réparations nécessaires. Aucune clause ne l'oblige à assumer les coûts. Pourtant, il paie presque toujours.

Pour environ 98% des rappels, le constructeur rembourse la main-d'oeuvre et les pièces, avance George Iny.

Pourquoi cette générosité? «Qu'on soit obligé de payer ou non, ça ne dérange pas. On le fait, car on cherche à garder nos clients à long terme. On gagne donc à corriger rapidement et gratuitement ces problèmes qui irritent nos clients», justifie Stephen Beatty.

George Iny ajoute une autre explication: l'intégration au marché américain, où la loi oblige le constructeur à rembourser les réparations liées aux rappels.

«Nous vivons à l'ombre du système américain. Ce système litigieux coûte cher à leurs entreprises et, ultimement, à leurs consommateurs. Le Canada bénéficie des avantages sans subir la plupart des coûts, car la majorité des rappels et autres décisions aux États-Unis sont repris chez nous. Cela explique aussi pourquoi nous avons ici des ceintures de sécurité, des coussins gonflables et de meilleures protections à l'impact», soutient-il.

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DE MEILLEURES VOITURES, MAIS PLUS DE RECTIFICATIONS

La qualité et la sécurité des automobiles s'améliore année après année, affirment les experts. Pourtant, le nombre de rappels liés à la sécurité aussi croît significativement. Le Canada et les États-Unis en ont même enregistré un nombre record en 2004.

Contradiction? Non. D'autres facteurs expliqueraient la hausse des rappels.

D'abord, les vérifications des constructeurs sont plus minutieuses. La complexification de l'ingénierie pose de nouveaux défis techniques. Pour éponger les coûts, différents modèles partagent souvent de mêmes pièces, ce qui augmente le risque de propagation des défauts. Et le nombre de rappels ne reflète pas forcément la gravité des défauts.

Claude Roy, de Transports Canada, ajoute que les avancées technologiques ont permis de réduire le taux de mortalité sur les routes. «Quand la Loi sur la sécurité est entrée en vigueur en 1971, on comptait environ 7000 morts par année. Maintenant, on est rendu sous la barre des 3000. Et ce même si le nombre de véhicules a presque doublé.»

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POUR NE PAS RATER UN RAPPEL

«Le taux moyen de rectification ne dépasse pas 60%, estime George Iny de l'APA. Et plus le véhicule rappelé est vieux, plus ce taux diminue.» Quoi faire pour ne pas rater de rappel sur sa voiture?

D'abord, il faut s'assurer que son concessionnaire possède ses dernières coordonnées. Plusieurs constructeurs offrent aussi de s'inscrire sur leur site Internet pour recevoir les dernières nouvelles. L'inscription est encore plus importante pour les véhicules d'occasion, pour lesquels les constructeurs peinent souvent à rejoindre les nouveaux propriétaires. On peut aussi visiter la banque de données de Transport Canada au www.tc.gc.ca/roadsafety/recalls pour vérifier si un rappel a été émis pour sa voiture.

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UN DÉFAUT OU NON?

«Attention! Tout ennui mécanique ne constitue pas nécessairement un défaut sécuritaire, prévient Claude Roy de Transport Canada. Un problème pourra faire l'objet d'un rappel s'il menace la sécurité sans donner de signes avant-coureurs au conducteur, et s'il se répète sur plusieurs unités d'un modèle. Par exemple, on ne rappellera pas pour un air climatisé défectueux. Pour l'âge du véhicule, il n'y aucune limite. On peut même rappeler les véhicules âgés de 10 ans.»

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DES RAPPELS EN HAUSSE

Nombre de modèles rappelés au Canada

«Au Canada, c'est le constructeur qui doit signaler tout défaut lié à la sécurité dès qu'il en prend connaissance.»

2005: 404

2004: 449

2003: 350

2002: 248

2001 : 301

2000: 311

1999: 240

1998: 255

1997: 243

Source: Transport Canada