Un plaisir que les Jeffrey Renshaw de ce monde ne cessent de vouloir goûter.

Dans notre prochaine chronique: le souffle doux du zéphyr

Antique, même en 1951, la MG TD est la descendante directe des roadsters anglais purs et durs des années 30. Si la mécanique a quelque peu évolué, l’allure reste aussi rustique et c’est là d’ailleurs tout son charme.

Un charme auquel ne résistèrent pas les nombreux GI américains qui ramenèrent dans leurs bagages ces vieilles anglaises aux allures d’une autre planète.

Rudimentaires, inconfortables, exigües, dégoulinant d’huile par le bas et de pluie par le haut, ces bagnoles d’apparence fragile firent néanmoins des merveilles en course, initiant toute une génération de jeunes nord-américains aux plaisirs de l’automobile à l’européenne.

«La corrélation entre la musique et le pilotage? La concentration. Celle qui mène à ce que les athlètes appellent la zone, une sorte d’état second que vous atteignez lorsque le corps et l’esprit sont en parfaite harmonie. C’est comme si le temps s’arrêtait. Tous les sens sont aiguisés au maximum: le toucher, le goût, l’odorat, les émotions. C’est précisément cet état que je cherche à atteindre chaque fois que je dirige un orchestre afin de pouvoir être pleinement conscient de la musique qui se joue à cet instant et de faire le lien avec ce qui est passé et ce qui s’en vient. Plus je suis présent dans la zone, plus je suis détendu et souple et plus les musiciens que je dirige le ressentent et y parviennent aussi. C’est à ce moment là que nous jouons de la belle musique. Même chose pour le pilotage. Je sens tout ce qui se passe autour de moi. Les sons, les odeurs, les vibrations, les mouvements et je cherche à me mettre en harmonie avec la voiture. Il ne s’agit pas de se battre avec la voiture; il faut travailler avec elle, car c’est elle qui décide et vous ne faites que la guider».

«Quelle pièce de musique me vient à l’esprit lorsque je conduis mon MG? Aucune. La voiture et la piste font leur propre musique. Vous serez surpris si je vous disais que je n’entends pas tellement le moteur mais plutôt les pneus qui collent à la chaussée. D’ailleurs, si je devais me concentrer sur le moteur, je ne pourrais plus sentir le reste. C’est comme avec l’orchestre, lorsqu’un musicien joue une fausse note, nous sommes tous attirés par cette note et il nous faut un certain temps pour récupérer. Plus vous y pensez, moins vite vous allez récupérer. Même chose en course: lorsque vous faites une erreur, vous devez vous efforcer de ne plus y penser et de revenir en piste, d’anticiper ce qui s’envient, le prochain virage, le point de corde, le point de freinage. En somme, il s’agit de tout écouter en même temps sans s’arrêter à un seul élément. Et quand l’harmonie s’installe, tout se déroule avec souplesse. Vous avez maîtrisé la musique et les notes se suivent et s’agencent dans une parfaite harmonie. Quant à la voiture, chaque circuit, comme chaque composition, possède son rythme propre qu’il faut pouvoir trouver pour goûter pleinement au plaisir de la vitesse, celle que l’on maîtrise pleinement, comme une sonate de Mozart.»

Merci, Professeur, pour cette leçon de musique. Quelques mots à présent sur «l’instrument» que Jeffrey Renshaw dirige aussi adroitement et avec autant de passion que son orchestre philharmonique: la MG TD 1951.

Jeffrey Renshaw, chef d’orchestre de renommée internationale, dirige depuis plusieurs années l’orchestre philharmonique de l’Université du Connecticut, où il enseigne aussi l’art et la science de la direction musicale.

Mais ce n’est pas dans une salle de concert que j’ai rencontré le professeur Renshaw, c’est sur un circuit, lors d’une épreuve de courses de voitures historiques. Ce jour-là, le musicien de talent avait rangé ses baguettes pour coiffer le casque et prendre le volant de sa MG TD bien aimée.

Car Jeffrey Renshaw a deux passions dans la vie: la musique et le sport automobile à l’ancienne. «Il existe un lien entre mes deux passions», me dit-il la première fois que je l’ai rencontré. Douze mois plus tard, à l’occasion d’une deuxième rencontre sur le même circuit, Jeffrey Renshaw m’a finalement expliqué.