(Toronto) Les fournisseurs canadiens de pièces automobiles préviennent que la pénurie de microprocesseurs informatiques qui a semé le chaos dans l’industrie et causé des pénuries chez les concessionnaires a été plus grave que prévu et devrait continuer à faire mentir les prédictions.

Au moment de dévoiler leurs résultats financiers cette semaine, certains fournisseurs ont revu à la baisse ou carrément éliminé certaines prédictions en raison du caractère imprévisible de la situation.

« L’effet d’amortissement sur la production est plus prononcé que certains s’y attendaient il y a seulement quelques semaines », a dit Frank D’Eramo, le patron de Martinrea International, lors d’une conférence téléphonique.

Le fournisseur de pièces a décidé de ne pas offrir de prédictions pour le troisième trimestre, tant les calendriers de production sont flous. Les fournisseurs reçoivent parfois un avis de seulement quelques jours de la fermeture de leur client.

La situation devrait perdurer jusqu’au quatrième trimestre et possiblement jusqu’à l’an prochain, a dit M. D’Eramo.

Magna International prédit maintenant la construction de 1,6 million de véhicules de moins, par rapport à ses prédictions du mois de mai, en raison de l’impact plus prononcé que prévu de la pénurie de microprocesseurs.

« Il est évident que la pénurie de microprocesseurs a eu et aura un impact plus important en 2021 que plusieurs membres de l’industrie l’anticipaient plus tôt cette année », a dit le patron de Magna, Swamy Kotagiri.

La pénurie de microprocesseurs, comme plusieurs autres problèmes d’approvisionnement, est essentiellement attribuable à l’interruption de la production causée l’an dernier par les mesures sanitaires, et la production ne reprend maintenant pas aussi rapidement que la demande.

Les microprocesseurs sont très en demande pour les produits électroniques grand public, alors que de plus en plus de gens travaillent de la maison, et l’industrie automobile peine à s’approvisionner.

Les microprocesseurs sont requis par de plus en plus de composantes électroniques des véhicules. La pénurie a contraint les constructeurs automobiles à réduire leur production et à se concentrer sur les camions et les VUS les plus rentables ; à construire des véhicules auxquels on ajoutera des composantes plus tard ; et parfois même à renoncer complètement à certaines composantes.

GM a réduit la disponibilité de fonctionnalités comme la recharge sans fil de téléphones, les miroirs intelligents, la radio HD et certaines caractéristiques d’économie d’essence. Le géant peine à répondre à la demande, et ses concessionnaires sont pratiquement à sec.

Les clients ne se plaignent pas trop pour le moment, a dit Don Murray, le directeur général de Murray Chevrolet, à Winnipeg.

« Il y a plusieurs de ces trucs qui ne les intéressent même pas. Je veux dire, un volant chauffant au Manitoba est important, donc ça c’est dommage, mais pour la plupart, les clients s’accommodent de ce qui a été retiré », a-t-il dit.

La demande est si forte, a-t-il dit, que des clients acceptent d’attendre six semaines avant la livraison de leur véhicule. Le concessionnaire avait 29 véhicules disponibles au début du mois de juillet, mais en a éventuellement vendu et livré 78 pendant le mois.

« L’inventaire est si serré que pratiquement tout se vend », a confié M. Murray.

La pénurie de microprocesseurs n’est pas à la veille de s’estomper. Le patron de Ford, Jim Farley, a prédit lors d’une conférence téléphonique que la situation perdurera jusqu’à l’an prochain.

Ford est touché particulièrement durement, en raison d’un incendie chez un de ses principaux fournisseurs de microprocesseurs. GM a évoqué de nouveaux problèmes qui font surface, comme des éclosions de coronavirus en Malaisie qui pourraient entraîner la fermeture d’installations.

GM avait annoncé au début août la fin de la production de certains camions. L’usine ontarienne d’Ingersoll, qui produit le Chevrolet Equinox, est essentiellement fermée depuis le mois de février.

Les réductions de production sont pires que prévu, a dit la patronne de Linamar, Linda Hasenfratz, lors d’une conférence téléphonique.

Au début du deuxième trimestre, a-t-elle précisé, on attendait la production de 160 000 véhicules de moins à l’échelle mondiale, mais ce sont plutôt 2,6 millions de véhicules qui ont été perdus.

On prévoit perdre 1,7 million d’unités au troisième trimestre, mais elle croit que les chiffres réels risquent de ressembler davantage à ceux du deuxième trimestre.