Ça fait 20 ans que Michelin bosse sur son pneu increvable. Appelé Tweel, puis Uptis, cette innovation s’approche de sa mise en marché, si on se fie à l’ingénieur de Michelin qui a créé et qui utilise quotidiennement ce pneu increvable sur sa voiture.

Les curieux ont pu voir un pneu Uptis (pour « Unique Puncture-proof Tire System ») à Montréal lors de la conférence Movin’On de juin dernier. Cet automne, le fabricant français fait un tour de roue de plus en lançant un partenariat avec General Motors, en vue de mettre sur la route un certain nombre de véhicules GM munis de ces pneus. Les deux fabricants ont d’ailleurs présenté une Chevrolet Bolt, le mois dernier, qui chaussait des Uptis.

PHOTO FOURNIE PAR MICHELIN

L’Uptis est composé de fins rayons juste assez souples pour se déformer légèrement sous la pression, d’une façon qui imite très fidèlement un pneu doté d’une chambre à air.

« On a commencé ce projet en 1998 chez Michelin, mais les premiers essais n’avaient pas tout à fait les propriétés adéquates pour une application dans l’automobile. Celui-ci est beaucoup plus près de la version finale qu’on compte commercialiser en 2024 », résume Steve Cron, qui dirige le développement de l’Uptis pour Michelin, en entrevue. La version la plus récente de sa « structure non pneumatique » en tant que telle est faite à partir d’une combinaison de caoutchouc et de fibre de verre, ce qui offre un comportement routier semblable à celui d’un pneu à roulement à plat comme on retrouve sur plusieurs modèles de véhicules de luxe, selon le porte-parole du fabricant français.

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L’Uptis de Michelin pourrait être vendu sous peu.

L’objectif de Michelin est à la fois simple et ambitieux : créer un pneu increvable, sans entretien, qui coûtera moins cher à opérer qu’un pneu conventionnel, afin d’aider des groupes automobiles comme GM à mettre en marché des parcs de véhicules autonomes partagés. Le coût cible est de un dollar du mille (1,6 km).

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Le pneu Uptis (pour « Unique Puncture-proof Tire System »)

L’Uptis est tout près du but. Il est composé de fins rayons juste assez souples pour se déformer légèrement sous la pression, d’une façon qui imite très fidèlement un pneu doté d’une chambre à air, assure M. Cron, qui a justement des Uptis sur sa propre voiture en Caroline du Sud (où il est permis d’en avoir).

« Grâce à sa structure unique, le pneu est toujours dans sa condition optimale. Il ne s’use pas de façon imprévue. Il n’a pas besoin d’un entretien aussi constant qu’un pneu traditionnel. »

— Steve Cron

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Michelin et General Motors ont présenté une Chevrolet Bolt, le mois dernier, qui chaussait des Uptis.

« En fait, il suffit de reformer sa semelle pour en faire un pneu neuf, ce qui s’avère une solution intéressante pour créer un modèle économique circulaire dans le secteur du transport », ajoute-t-il.

Un pneu sur mesure pour tous les climats

Au premier coup d’œil, on remarque tout de suite les particularités physiques du Uptis : on voit d’un bout à l’autre du pneu, entre ses rayons. Sa jante est aussi incorporée au pneu, contrairement à un pneu normal. En mains, il est aussi un peu plus lourd.

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On voit bien ici le pneu qui se défome.

À l’aube de la saison froide, on peut se demander comment une telle technologie peut résister aux températures hivernales du Québec, à la gadoue et au verglas. M. Cron assure qu’il n’y a rien à craindre, au contraire. Dans ses labos de la Caroline, il a enfoncé un tel pneu dans la neige, puis a congelé le tout loin sous le zéro degré Celsius. Il a ensuite démarré sa voiture et donné un coup d’accélérateur.

« C’est simple : le pneu se déforme en roulant, et ça agit un peu comme le contenant à glaçons de votre congélateur quand on le tord un peu, puisque ça décoince les morceaux de glace et ça l’aide à s’en défaire », assure-t-il. Même chose à l’autre bout du thermomètre : de la boue séchée se déloge rapidement selon le même principe. La semelle étant somme toute assez épaisse, elle résiste à l’effort sans craindre de se déchirer.

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Le pneu Uptis au travail

En fait, elle est peut-être même un peu trop résistante au goût de certains, convient Steve Cron. « Des policiers à qui on l’a présentée nous ont demandé ce qui se passait si un fuyard décidait de rouler sur des clous avec ce pneu. Il ne se passe rien. Ce pneu est increvable. » Heureusement, il sera plus difficile de déguerpir à bord d’un taxi autonome sans volant…