Nagano, Japon — Avec ses nouvelles W800, Kawasaki montre qu’il sait aussi construire des engins capables de remonter le temps.
Un peu d’histoire
La Seconde Guerre mondiale a eu de nombreuses conséquences pour le Japon. L’une d’elles a été une interdiction imposée à la marque Kawasaki : elle ne produirait plus d’avions. La société a alors tourné ses ressources vers la fabrication de moteurs de motos. Est ensuite venue l’acquisition de la marque de motos Meguro, puis, en 1966, le dévoilement du plus gros modèle de l’histoire des motos japonaise, la W1 de 650 cc. Un peu plus de 30 ans plus tard, en 1999, une version moderne de la W1 voyait le jour, la W650, qui a brièvement été vendue en Amérique du Nord. Les nouvelles W800 STREET et CAFE 2019 représentent le prochain chapitre de cette lignée.
Du rétro authentique
La vague de modèles rétro lancés ces dernières années comprend des machines au riche passé et d’autres n’existant que pour profiter de la tendance. Les W800 font décidément partie du premier groupe. L’ultime preuve a été offerte par Kawasaki durant le lancement des nouveautés sous la forme de quelques précieux moments aux commandes d’une W1 1966. Descendre de la W1 et immédiatement monter sur la W800 STREET a été une expérience remarquable, puisque les proportions, l’ergonomie, le poids et même la cadence du moteur de ces motos séparées par plus d’un demi-siècle affichent des similarités indéniables. Ce lien étroit avec la W1 fait d’ailleurs de la W800 une moto très particulière à piloter.
Une approche technique inhabituelle
Les évolutions mécaniques des dernières décennies ont habitué les motocyclistes à des machines au comportement routier carrément exempt de vices majeurs. La W800 s’éloigne de cette direction en proposant une idée aussi étrange qu’attachante, soit un recul volontaire en matière de comportement. L’exemple le plus évident est l’absence de pneus radiaux, un choix réduisant la stabilité et créant un léger louvoiement lorsque le rythme augmente. Pour autant que le pilote comprenne le but du modèle, ces « défauts volontaires » deviennent une source de joie inattendue. Soudainement, on n’est plus aux commandes d’une moto aux limites intouchables, mais plutôt au guidon d’une bécane qu’on amène vite dans ses derniers retranchements.
Pleine de caractère
Les motos japonaises sont généralement plus sophistiquées que caractérielles. Là encore, la W800 fait bande à part, et ce, principalement en raison du tempérament de son bicylindre vertical à 360 degrés qui tremble sans gêne et transmet ses pulsations au pilote à travers tous les points de contact. Que le tout soit accompagné d’une très plaisante trame sonore s’échappant des silencieux ne fait qu’agrémenter l’expérience. L’envers de la médaille de ce caractère fort est une architecture-moteur qui limite la puissance et génère des performances maximales faibles. On n’achète donc absolument pas une W800 pour se faire catapulter en tournant l’accélérateur, et quiconque l’envisage doit le comprendre.
La STREET
La version STREET de la W800 est celle qui reproduit le plus authentiquement l’expérience que propose la W1 originale. On y est installé de façon très détendue en raison d’un guidon qui recule beaucoup et d’une selle basse et assez confortable. Il s’agit d’une ergonomie qui semble un peu étrange durant les premiers instants de conduite, mais à laquelle on s’attache vite et qui finit par mettre le pilote dans une ambiance agréablement décontractée. Même si le poids du modèle n’est pas faible, toutes les manœuvres sont accomplies avec facilité grâce à la rigidité du châssis et au grand effet de levier du guidon large. L’ABS est livré de série.
La CAFE
On jurerait que la version CAFE est construite sur une autre plateforme que la STREET tellement les sensations ressenties par le pilote sont différentes. L’élément principal derrière le phénomène est un guidon plus étroit et beaucoup plus bas et avancé qui bascule complètement la position de conduite vers l’avant. Même si tout le reste de la moto est identique, on se sent aux commandes d’une authentique sportive des années 60. Le confort est réduit par rapport à la STREET, mais il reste acceptable, surtout si on craque pour le style de la CAFE et que les longues distances ne sont pas le but premier de l’achat.
Conclusion
Les nouvelles W800 font partie de ces motos dont on doit absolument saisir la mission. On pourrait facilement conclure qu’elles sont lentes, instables et étranges en matière d’ergonomie, mais on n’aurait alors rien compris de leur but. Elles sont des rétros construites pour se comporter authentiquement, ce qui implique non seulement un moteur d’architecture anglaise refroidi par air et une vraie sonorité « années 60 », mais aussi une partie cycle sans la rigidité d’un cube d’acier et qui permet de sympathiques imperfections de comportement. La plupart des modèles rétro tentent de combiner vieux style et comportement moderne. Les W800 cherchent plutôt à ramener leur pilote un demi-siècle en arrière.
Bertrand Gahel est l’auteur du Guide de la moto.
Les frais de transport et d’hébergement ont été payés par Kawasaki.
Fiche technique
Marque : Kawasaki
Modèles : W800 STREET/CAFE
Prix : 9999 $/ 11 499 $
Garantie : 1 an/kilométrage illimité
Moteur : bicylindre parallèle de 773 cc refroidi par air
Transmission : 5 rapports, entraînement final par chaîne
Poids tous pleins faits : 220/222 kg
Frein avant : 1 disque avec étrier à 2 pistons et ABS
Frein arrière : 1 disque avec étrier à 1 piston et ABS
Pneu avant : 110/90-18
Pneu arrière : 130/80-18