Jugé jeudi par le tribunal correctionnel de Bobigny, en France, pour une tentative d'avortement forcé sur son ex-compagne, le chanteur de raï Cheb Mami a reconnu avoir «pété les plombs» lorsqu'il a décidé de prendre la fuite en Algérie en mars 2007.

«Ma mère était malade, ma femme me manquait, j'ai pété un plomb et je suis parti», a-t-il répondu à une question du tribunal expliquant avoir quitté le territoire grâce à un passeport français périmé. «Je me suis toujours dit dans ma tête que le jour du jugement, je serai présent», a assuré celui qui s'est rendu aux autorités françaises lundi soir lors de son atterrissage à Orly.

Visiblement éprouvé, Cheb Mami, de son vrai nom Mohamed Khelifati, a versé quelques larmes au début du procès mais a tenté de minimiser sa relation avec Camille, une photographe de presse, qui est tombée enceinte de lui à l'été 2005. «On s'est vus cinq ou six fois en deux ans», a-t-il assuré pour justifier le fait de ne pas avoir voulu de l'enfant. Les faits seront abordés plus en détail jeudi après-midi.

Dans la matinée, le tribunal s'est intéressé à la personnalité et à la carrière artistique de Cheb Mami, père de trois enfants nés de trois mères différentes, dont la petite «Lucie» née en mars 2006 qu'il n'a pas reconnue et un fils né en Algérie en août 2008. Son entourage a décrit le chanteur comme quelqu'un de «gentil» et d'«humain», parfois «un peu radin».

Né à Saïda en Algérie, Cheb Mami a commencé à chanter à l'âge de 12 ans. À son arrivée en France en 1985, il lance avec d'autres la mode du raï et devient en quinze ans une star internationale, un parcours couronné par un duo avec Sting en 2000 et le succès Desert Rose. Depuis son arrestation en 2006, il ne fait plus de musique. «Je compose, pour un jour, inch'Allah», a souligné le chanteur vêtu d'une chemise blanche.

Proche du pouvoir en place en Algérie, il admet avoir participé à des meetings et se définit comme un «militant» pour «aider (s)on pays». «Certains disent que vous êtes mal entouré là-bas», a souligné le tribunal. «Par Kader peut-être», a répondu le chanteur dont le nom de scène signifie «petit môme».

«Kader», de son vrai nom Abdelkader Lallali, est poursuivi pour avoir organisé l'avortement forcé, qui a échoué, subi par Camille en août 2005 à Alger. Domicilié en Algérie, il n'a jamais pu être interrogé. «C'est le grand absent», a regretté le tribunal.

Placé dans le box, Cheb Mami comparaît seulement aux côtés de son ancien agent Michel Lecorre, alias «Lévy», qui a longtemps travaillé avec Camille. Il est poursuivi pour avoir organisé le voyage professionnel de la jeune femme en Algérie afin qu'elle y subisse un avortement forcé. Cheb Mami l'accuse d'avoir tout manigancé, une thèse que Lecorre rejette en bloc. Le quatrième complice présumé, Hicham Lazaar, était également absent jeudi.

Mis en examen notamment pour «complicité de violences» sur la personne de Camille, Cheb Mami, 42 ans, encourt jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 150 000 euros, soit 244 455 $ CAN, d'amende.