Le coup d’envoi du Festival TransAmériques sera donné mercredi. Pour l’occasion, La Presse fait un tour d’horizon de l’événement.

La compagnie théâtrale Joe, Jack et John célèbre ses 20 ans l’été prochain. Une fête qui survient accompagnée d’une belle reconnaissance : une invitation au Festival TransAmériques (FTA) pour présenter sa nouvelle création, Cispersonnages en quête d’auteurice.

Catherine Bourgeois, qui est à la tête de Joe, Jack et John depuis ses débuts, s’est inspirée du classique de Luigi Pirandello, Six personnages en quête d’auteur, pour lancer l’écriture de ce nouveau spectacle.

« J’ai eu envie de réfléchir aux questions éthiques et morales sur la façon dont notre société pourrait être plus inclusive, explique Catherine Bourgeois. Ma posture est plus à gauche, mais comme j’ai un intérêt pour le dialogue, j’ai lu des textes de droite pour déconstruire les idées préconçues que j’avais. Car, on le sait, le théâtre est rarement intéressant s’il ne présente qu’un seul point de vue. »

Ce dialogue s’est poursuivi dans la salle de répétition avec ses « collègues acteurs », dont la plupart vivent avec un handicap cognitif. « Toutes ces questions concernant l’appropriation, les droits et privilèges, la culture du bannissement… Mes collègues doivent être concernés par tout cela, mais le vocabulaire utilisé sur la place publique ne leur est pas accessible. J’ai donc travaillé à rendre ce débat plus inclusif pour eux. »

Chacun arrivant avec un bagage différent, la confrontation des idées a été riche au sein de l’équipe, notamment en ce qui concerne la question de l’appropriation.

Mes collègues ne sont pas vraiment d’accord lorsqu’un acteur neurotypique joue une personne handicapée, mais d’un autre côté, eux veulent pouvoir jouer n’importe quoi. C’est déprimant de penser qu’ils ne pourraient jouer que ce qu’ils sont, c’est-à-dire des personnes avec un handicap… Le théâtre représente pour eux une façon de s’évader.

Catherine Bourgeois

Toutes ces réflexions de groupe ont mené à la création de Cispersonnages en quête d’auteurice, un titre qui résume à lui seul l’abondance d’étiquettes avec lesquelles jongler par les temps qui courent.

En répétition
  • Catherine Bourgeois donne des indications aux acteurs.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Catherine Bourgeois donne des indications aux acteurs.

  • Les acteurs Audrey Talbot et Guy-Philippe Côté en action

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Les acteurs Audrey Talbot et Guy-Philippe Côté en action

  • Les répétitions vont bon train en prévision de la première du 31 mai à Espace Libre.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Les répétitions vont bon train en prévision de la première du 31 mai à Espace Libre.

  • Le texte de Cispersonnages en quête d’auteurice a été construit à partir d’échanges au sein de l’équipe d’acteurs.

    PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

    Le texte de Cispersonnages en quête d’auteurice a été construit à partir d’échanges au sein de l’équipe d’acteurs.

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La pièce met en scène une troupe d’acteurs neurodivergents qui se frottent à la création de leur futur spectacle, parce que, disons-le, les pièces qui les concernent ne sont pas légion dans les bibliothèques des écoles de théâtre. Chacun tente d’apporter sa pierre à l’édifice, mais ce n’est pas facile de s’entendre. Et ce n’est pas plus simple de se retrouver dans ce qui peut ou pas être dit sur scène…

Une proposition différente

Dans ce texte, empreint d’humour, les questionnements philosophiques s’ancrent de façon très concrète. Le ton est direct et décomplexé ; chez Joe, Jack et John, on ne fait pas dans le lourd. « On rit en préparant le spectacle et on espère que le public va rire tout autant, lance Catherine Bourgeois. On ajoute le prisme de la neurodivergence dans l’équation, qui ne fait pas souvent partie du débat. Or, la confusion des personnages reflète bien notre propre confusion comme société, comme artiste. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

La metteure en scène et dramaturge Catherine Bourgeois est à la tête de la compagnie Joe, Jack et John depuis 20 ans.

Avec ce projet, Catherine Bourgeois arrive avec une proposition différente de ce à quoi sa compagnie nous a habitués jusqu’ici. Les spectacles souvent pluridisciplinaires cèdent ici leur place à une pièce plus théâtrale, plus parlée. « Tous ces mots à mémoriser représentent déjà un défi pour les acteurs. C’est aussi la première fois que je dirige une aussi grande distribution, avec sept acteurs et actrices sur scène. »

« Dans la vie, tout n’est pas noir ou blanc et c’est à cela que j’ai eu envie de m’attaquer avec Cispersonnages en quête d’auteurice, ajoute la metteure en scène et dramaturge. Dans le texte de Pirandello, écrit en 1921, tout est déjà là : le clash entre la fiction et la réalité, entre l’appropriation et le vécu des individus. La notion de jeu y est très présente. Ça fait 100 ans qu’on se pose certaines questions. »

« J’ai le désir de faire avancer le dialogue, mais je n’arrive avec aucune solution. Peut-être même que je vais rendre ces questions plus confuses, mais j’aurai apporté un autre angle de réflexion au débat », conclut Catherine Bourgeois.

Cispersonnages en quête d’auteurice sera présentée du 31 mai au 3 juin au FTA. La pièce sera ensuite reprise en mars dans le cadre de la saison régulière d’Espace Libre.

La 17e édition du FTA se tient du 24 mai au 8 juin.

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À ne pas manquer au FTA

i/O

PHOTO VALÉRIE REMISE, FOURNIE PAR LE FTA

Dominique Leclerc signe un spectacle intimiste et éclairant sur la mort avec i/O.

Reprise au Théâtre Prospero de ce très beau spectacle signé par la Québécoise Dominique Leclerc et mis en scène par Olivier Kemeid. Ici, la perte d’un père sert de moteur à une réflexion sur ce que nous laissons – ou pas – derrière nous. L’occasion est belle pour réfléchir aux notions de transhumanisme et de posthumanisme, en plus de se pencher sur les nouvelles biotechnologies qui risquent de bouleverser notre rapport à la mort. La dramaturge et actrice le fait avec beaucoup d’humour et de délicatesse, à partir notamment de nombreuses archives vidéo.

Au Théâtre Prospero, du 2 au 4 juin

Stéphanie Morin, La Presse

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Qaumma

PHOTO MARYSE BOYCE, FOURNIE PAR LE FTA

Qaumma rassemble sur scène les acteurs Vinnie Karetak et Charlotte Qamanik.

En inuktitut, qaumma signifie lumière. Et c’est par la lumière – et la poésie – que les artistes Laakkuluk Williamson Bathory et Vinnie Karetak souhaitent raconter les déplacements forcés qui ont marqué la vie de leurs ancêtres et la mémoire collective des leurs. Un spectacle qui puise notamment dans la tradition féministe qu’est la danse du masque groenlandaise, un art transmis de mère en fille. Une façon pour les familles inuites de reprendre leur place et leur espace dans l’histoire.

Au Studio Hydro-Québec du Monument-National, du 3 au 6 juin

Stéphanie Morin, La Presse

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L’Étang

PHOTO JEAN-LOUIS FERNANDEZ, FOURNIE PAR LE FTA

Adèle Haenel

Dans une récente sortie en France pour dire qu’elle cessait de faire du cinéma, Adèle Haenel a dit qu’elle souhaitait se consacrer au théâtre et collaborer avec la metteure en scène Gisèle Vienne. La critique française a écrit que la comédienne était « stupéfiante » dans L’Étang, une pièce de Robert Walser, mise en scène par Vienne. Avec Henrietta Wallberg, l’actrice incarne une dizaine de personnages dans ce petit drame de jeunesse que le « poète maudit » de la littérature germanophone offrit à sa sœur. « Un combat adolescent contre la famille et la société. Intime, voire incestueux, mais hautement politique. »

À l’Usine C, du 31 mai au 3 juin

Luc Boulanger, La Presse

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Creation Destruction

PHOTO YANNICK GRANDMONT, FOURNIE PAR LE FTA

Creation Destruction, par Dana Gingras

La chorégraphe Dana Gingras n’en est pas à sa première collaboration avec les membres du mythique groupe montréalais Godspeed You ! Black Emperor (Monumental). Cette fois, elle a fait appel à quatre d’entre eux pour sa nouvelle création, qui pourrait bien faire sensation en ce début de FTA avec une présentation extérieure gratuite, à la nuit tombée, sur l’esplanade Tranquille. Ils ont composé la musique et seront accompagnés sur scène de quatre musiciens des cordes et d’autant de chanteurs ; avec eux, onze danseurs feront vivre une expérience « métaphysique » aux spectateurs, dans une pièce entremêlant virtuosité et dépouillement, qui se pose comme un appel à l’action environnementale. Le collectif londonien United Visual Artists signe de son côté les projections vidéo. Un rappel que l’humain est capable autant de détruire que de créer du beau. Ça promet !

Du 25 au 27 mai, à 20 h 45, sur l’esplanade Tranquille

Iris Gagnon-Paradis, La Presse

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Navy Blue

PHOTO SINJE HASHEIDER, FOURNIE PAR LE FTA

Navy Blue, par Oona Doherty

La chorégraphe Oona Doherty propose des œuvres qu’on dit hantées par le passé de l’Irlande du Nord. Navy Blue se pose comme sa création la plus ambitieuse à ce jour, réunissant sur scène une douzaine d’interprètes en bleu de travail, aux âges et physionomies divers. Leurs corps réunissent l’humanité entière, le groupe pulsant à l’unisson sur le Concerto pour piano no 2 de Rachmaninov ; un ballet flamboyant qui tombe en déconfiture, des corps qui se fracassent, reflétant la chute libre d’un monde dévasté, mais où la réponse à l’écroulement social se dessine dans la danse, furieuse et vivante, des hommes.

Du 30 mai au 1er juin, au Théâtre Maisonneuve

Iris Gagnon-Paradis, La Presse

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