Après un bref passage à l’Usine C en 2021, Sophie Cadieux reprend le collier pour le solo Féministe pour Homme. Un spectacle grinçant et audacieux, mais dont la portée est amoindrie par un excès de… Zumba.

Dans ce texte écrit par la Française Noémie de Lattre, apprêté à la sauce québécoise avec brio par Rébecca Déraspe, Sophie Cadieux aborde les mille et une facettes de la condition féminine.

Les répliques fusent à vitesse grand V et font flèche de tout bois. Droit à l’avortement, sexualité au féminin, violences obstétricales, charge mentale, replis de l’anatomie et diktats de la beauté… Tous les sujets y passent, superbement portés par l’énergie contagieuse de Sophie Cadieux, son sens de la répartie et son autodérision bien affûtée.

Sa charge contre l’ineptie du 8 mars, Journée internationale du droit des femmes, s’avère particulièrement jouissive. Le doigt d’honneur collectif envoyé aux États américains qui restreignent les droits à l’avortement est purement cathartique. Et lorsque l’actrice exulte devant les étonnantes propriétés du clitoris, on ne peut faire autrement qu’applaudir devant ce « beau cadeau de la vie » fait aux femmes !

Mieux, on rit, on rage et on grince des dents en la voyant passer au broyeur avec une férocité parfaite les clichés qui collent depuis trop longtemps à la peau des féministes.

Du cardio en talons haut

Pour la mise en scène de ce solo théâtral aux allures de stand-up, Alix Dufresne a choisi une approche très (trop) physique. En effet, Sophie Cadieux explique en début de spectacle que lorsque la féministe en elle a besoin de ventiler, elle se lance dans de frénétiques mouvements de Zumba, une danse-exercice particulièrement aérobique. Le procédé est abondamment utilisé, si bien que l’actrice passe une grande partie du solo à exécuter des exercices de cardio en talons hauts.

Certes, la performance de Sophie Cadieux force l’admiration. Il faut déjà du cran et beaucoup d’aplomb pour défendre le féminisme seule sur scène pendant 1 heure 30 ; imaginez s’il faut en plus le faire en faisant des pompes !

Toutefois, le texte est mal servi par ce trop-plein chorégraphique. Il y a tant d’informations à assimiler, tant d’injustices à nommer et d’ironies à saisir dans ce spectacle mené tambour battant : un peu de silence et de lenteur auraient sans doute permis de mieux mesurer la drôlerie et surtout la pertinence du texte. À preuve : la finale, très émouvante, qui se déploie dans une relative économie de gestes.

Un mot pour finir sur le titre Féministe pour Homme, inutilement provocateur, mais que la production n’a pu changer pour des raisons de droits d’auteur. Il est trompeur. Non, ce spectacle n’est pas une leçon de féminisme pour les nuls (lire ici les hommes.) C’est un « guide de survie » (comme l’indique le sous-titre) rempli de bienveillance et pas moralisateur pour deux sous. Ce spectacle qui sillonnera tout le Québec dans les prochains mois s’adresse à tous : les femmes, les hommes, les jeunes et les moins jeunes…

Tous les humains qui rêvent à plus d’égalité y trouveront matière à rire (jaune souvent) et, surtout, à réfléchir à ce qui nous unit plutôt qu’à ce qui nous sépare.

Consultez le site du spectacle
Féministe pour Homme

Féministe pour Homme

Texte de Noémie de Lattre, adapté par Rébecca Déraspe
Mise en scène d’Alix Dufresne
Avec Sophie Cadieux

À l’Usine C, jusqu’au 21 janvier, puis en tournée à travers le Québec

7/10