Première collaboration entre Alix Dufresne (Hidden Paradise) et Étienne Lepage (La logique du pire), la création du Malaise dans la civilisation, samedi soir au Festival TransAmériques, ressemble à un banc d’essai pour amateurs de découverte. Ce spectacle expérimental détonne dans le cadre de la programmation d’un festival international.

On comprend le désir des artistes contemporains d’aller contre le discours ambiant, de bouder l’esthétique convenue. Or Malaise dans la civilisation, sous-titré « un vivarium philosophique », est un laboratoire théâtral d’une heure sans récit ni courbe dramatique soutenue. Un théâtre dépourvu de sens et de décorum, qui se transforme en un grand désordre scénique qui tourne à vide.

Quatre personnages en quête de hauteur

Au début, les quatre protagonistes arrivent inopinément sur scène, en pleine lumière. Ils explorent l’espace vide, en semblant ignorer les règles du théâtre, voire la présence du public. Ils mangent, pensent à voix haute, chuchotent, trébuchent sur le plateau…

Après quelques minutes de lazzis, les comédiens finissent par apprivoiser l’espace. Ils prennent conscience du public et s’adressent directement à lui en brisant le quatrième mur. Et pas à moitié ! Une chaussure est lancée dans les gradins, ratant de peu une spectatrice. Une comédienne interpelle un spectateur de la première rangée et lui « emprunte » sa veste.

Peu à peu, les quatre bêtes de scène vont tenter des expériences plus radicales. Ils veulent tester à la fois leur endurance physique et morale. La scène va devenir un foutoir, jonché de détritus. Un comédien vomit sur le sol, puis se roule dans son vomi. Un autre viendra essuyer le tout avec un linge… Mémorable !

Au bout du compte, devinez quoi ? Le spectacle n’aura pas lieu. Un placier vient interrompre la représentation pour demander à parler « à un responsable ». La troupe devra ramasser ses dégâts et quitter les lieux. Et c’est reparti avec une autre séance de burlesque qui fera éclater de rire la salle, avant une finale aussi chaotique que l’ensemble de la pièce.

Bien sûr, l’idée ici est d’exposer, à travers ces bêtes de scène, les maladresses, les malaises et les angoisses dans notre humanité frileuse. Le (court) texte de Lepage s’apparente à un précis de philosophie ludique et théâtrale. À notre avis, la philosophie a bien le dos large. Car l’exercice nous a laissé de glace.

Malaise dans la civilisation

Malaise dans la civilisation

De Étienne Lepage et Alix Dufresne

Avec Florence Blain Mbaye, Maxime Genois, Renaud Lacelle-Bourdon et Alice Moreault, Au Prospero, jusqu’au 1er juin

4/10