«C'est bien, non, que les théâtres offrent des rôles à des dames de votre âge?» dis-je à la comédienne Catherine Bégin, en entrevue pour parler de La vie devant soi, qui, cette semaine, prend la scène du Rideau Vert. «Mettez-en. Parce que pendant plusieurs années, j'ai connu le désert», me répond la sexagénaire, à qui la metteure en scène Louise Marleau a confié le rôle de Madame Rosa, cette ex-prostituée qui s'occupe des petits dont personne ne veut.

Les comédiens qui ont depuis belle lurette passé l'âge de la «Liberté 55» sont légion sur nos scènes. Et en ce début de saison d'automne 2009, l'âge d'or brille de tous ses feux.

 

Il faut sortir de son salon pour voir que la vieillesse peut être représentée autrement que dans des rôles de «Mamie a raison.» Personnellement, je me remets encore (deux semaines plus tard) de «l'expérience» Andrée Lachapelle dans Oh les beaux jours. Une comédienne de plus de 75 ans qui joue Winnie, quel beau pied de nez à la mort, à la maladie, à la vieillesse et bien sûr au culte de la jeunesse... «À 39 ans, ma mère a commencé à se coiffer d'un chignon qu'elle a gardé jusqu'à la fin de sa vie. Elle avait décidé qu'elle devenait vieille», évoque Catherine Bégin.

On n'ose pas imaginer la tête que feraient les Denise Filiatrault, Janine Sutto, Andrée Lachapelle, Béatrice Picard, Rita Lafontaine et Catherine Bégin, si un coiffeur mal avisé leur suggérait de porter le chignon de leur mère!

Avec leur énergie fougueuse, elles remplissent les salles, ce qui prouve que le public de théâtre n'est pas atteint de jeunisme. Parlez-en à Rita Lafontaine, qui, ce week-end, arrive à la fin des supplémentaires pour son solo Le paradis à la fin de vos jours, de Michel Tremblay. Ou à Marie-Ginette Guay, qui, dans l'intimité de La Licorne, campe une quinquagénaire fraîchement divorcée qui se lie d'amitié avec un jeune cégépien, dans la pièce Le Palier.

«On en a soupé du théâtre pour les têtes blanches», me déclarait le jeune metteur en scène Christian Lapointe, en entrevue pour sa nouvelle création qui prend la scène du Théâtre La Chapelle.

Bien d'accord avec lui. Il y a des soirs dans certains théâtres où, en effet, je me désole des choix de pièces conventionnels joués par des acteurs âgés et connus. Pour faire plaisir au public âgé, ne pas le déranger, lui donner des repères. Ce qui est dommage, c'est de présumer que les vieux s'enlisent forcément dans le passé.

Quand Rita Lafontaine joue Nana en solo ou se lance dans une première mise en scène professionnelle - avec La duchesse de Langeais, en juillet dernier - on se dit que le théâtre est l'antidote contre le règne de la jeunesse à tout prix. Continuez à jouer, mesdames. Et à vous amuser.