Regarder Virgin River est-il un plaisir coupable ? Cette série américaine, adaptée de romans Harlequin de Robyn Carr, connaît un incroyable succès depuis son lancement en 2019 et pourtant, elle passe inaperçue dans les grands médias. Pourquoi ?

La quatrième saison a été lancée sur Netflix pendant l’été et fait partie des séries les plus regardées de la plateforme. Virgin River, c’est le nom fictif de ce petit village paisible situé en Californie, au cœur de paysages montagneux. Melinda (Alexandra Breckenridge), une infirmière endeuillée, part de Los Angeles pour s’installer dans ce village perdu et obtient un poste au sein du cabinet du têtu docteur « Doc » (Tim Matheson) de Virgin River. Elle découvre les habitants du village et tombe sous le charme de Jack (Martin Henderson), le propriétaire du bar-restaurant, un ancien soldat de la marine américaine qui a vécu la guerre en Irak.

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Alexandra Breckenridge incarne l’infirmière Mel Monroe et Tim Matheson est « Doc ».

Tous les ingrédients pour faire de cette série tournée en Colombie-Britannique un succès sont là : des histoires d’amour, des personnages attachants, des ragots et rumeurs qui font le tour de la communauté. Sans compter des accidents, des maladies, des méchants qui font du trafic de drogues, un enlèvement, des règlements de comptes et des paysages somptueux, bref, il se passe vraiment beaucoup de choses à Virgin River.

Niche mélodramatique

Pour Anouk Bélanger, professeure au département de communication sociale et publique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Virgin River fait partie d’une grande tradition de feuilletons de type « soap américain » qui nous réconforte. « Son succès réside dans cette niche mélodramatique : il y a des triangles amoureux, de la souffrance puis de la consolation, de grands drames que vont vivre les personnages de la communauté et finalement un retour à l’ordre, ce qui respecte les codes du feuilleton », explique-t-elle.

Elle estime que cette série se veut authentique, bienveillante, et dans le contexte actuel, on a grandement besoin de réconfort.

Dans Virgin River, on prend soin des autres, il y a une grande entraide au sein de la communauté, on va passer à travers de dures épreuves avec le soutien du village. Même la montagne vient panser les plaies ! On se réfugie dans la nature, grandiose. Cet esthétisme fait vraiment partie de la trame narrative de la série, sans oublier les dialogues, qui sont souvent écrits comme une carte de souhaits Hallmark !

Anouk Bélanger, professeure au département de communication sociale et publique de l’UQAM

« Surtout que tous leurs drames sont moins importants que d’aller prendre un bon café en admirant la nature ! C’est fantastique ! », dit-elle en riant.

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Un des nombreux paysages de Virgin River

La journaliste culturelle Catherine Beauchamp avoue qu’elle aime haïr la série, mais elle y reste accrochée ! « C’est comme si mon cerveau se mettait à off ! Ça m’empêche de réfléchir. J’ai un plaisir fou ! Ça m’amuse. C’est tellement irréaliste, cette série. C’est facile, c’est prévisible, et en même temps, le nombre incroyable d’intrigues qui arrivent dans ce petit village, ça n’a aucun sens ! Il y a quelque chose de délicieusement vieillot dans Virgin River, c’est figé dans le temps », illustre-t-elle.

L’animatrice Amélie Boivin Handfield aime le fait que Virgin River se déroule au sein d’une petite communauté tissée serré. « Ça pourrait se passer dans un village québécois où tout le monde se connaît ! On s’identifie aux personnages, il y a plein de rebondissements qui ne sont pas toujours crédibles, mais on reste accro ! »

L’attachée de presse Christine Carier regarde aussi avec plaisir la série.

J’aime l’histoire d’amour entre Jack et Mel, qui ont des caractères diamétralement opposés, alors on se demande où tout ça va les mener ! Ça me plaît, cette séduction à l’eau de rose ! Le personnage de Jack qui veut toujours sauver tout le monde, c’est un vrai chevalier servant qui a fait la guerre, un vrai bon gars qui a aussi ses démons : l’alcool.

Christine Carier, attachée de presse

« Les paysages sont magnifiques et on a envie d’être ami avec les personnages, si généreux, sympathiques, c’est rassurant », pense Isabelle Normand, agente de bord, qui souhaiterait vivre à Virgin River !

En effet, la professeure Anouk Bélanger parle de Virgin River comme d’une série normative traditionnelle. « Les personnages ont tous une apparence soignée, partagent des valeurs traditionnelles et une certaine moralité. Il n’y a pas beaucoup de diversité dans cette communauté qui vit un peu retirée du monde, loin des conflits mondiaux, d’où le sentiment de réconfort », analyse-t-elle.

« Une série qui n’est pas intense ni choquante et qui nous permet de nous échapper de nos tracas quotidiens », conclut Anouk Bélanger.

Virgin River est sur Netflix et la cinquième saison est en tournage.