Après Janet Jackson, Sheryl Crow et Jennifer Lopez, au tour d’une autre chanteuse de subir le traitement documentaire en 2022 : Shania Twain. Offert sur Netflix dès aujourd’hui, Not Just a Girl nous rappelle à quel point l’artiste canadienne a transformé la musique country. Dommage qu’on n’y apprenne rien d’étonnant ou d’entièrement nouveau.

Tout le monde connaît l’histoire de Shania Twain. MusiMax devait diffuser sa Musicographie au moins huit fois par mois durant ses belles années, au tournant du millénaire. Son enfance difficile à Timmins, en Ontario, la pauvreté, l’accident d’auto qui a emporté sa mère et son beau-père, ses débuts éprouvants, son ascension, la gloire, l’argent, blablabla. La légende a été racontée maintes et maintes fois.

La suite a également fait l’objet d’un grand nombre de reportages, d’entrevues et d’articles au fil du temps. Même Oprah Winfrey s’y est intéressée. La maladie de Lyme qu’elle a contractée en 2003, son divorce digne d’un mauvais soap d’après-midi (son mari l’a trompée avec – eh oui – sa meilleure amie), sa voix qui s’est dégradée, etc.

En d’autres termes, notre culture shaniaesque était passablement développée avant qu’on amorce le visionnement du long métrage produit par Mercury Studios et réalisé par Joss Crowley, l’homme derrière la captation de plusieurs spectacles musicaux, dont ceux d’Elvis Costello, de Jeff Beck et d’Hall & Oates.

Un titre qui sème le doute

Avant d’aller plus loin, petite parenthèse par rapport au titre du documentaire : Not Just a Girl. Si vous avez connu les années 1990, vous conviendrez qu’il s’agit d’un curieux choix. On dirait l’autobiographie d’une autre chanteuse issue de cette époque, Gwen Stefani. On s’imagine bien l’ex-leader du groupe No Doubt appeler Shania Twain en fulminant au cours des prochains jours : « Tu m’as volé mon titre ! »

D’ailleurs, ce n’est qu’à la toute fin du film, juste avant l’arrivée du générique de clôture, que l’on comprend pourquoi l’interprète des tubes You’re Still the One, That Don’t Impress Me Much et Man ! I Feel Like a Woman ! a retenu cette option. C’est aussi le titre d’une nouvelle chanson qu’elle vient d’enregistrer et qu’on devrait retrouver sur l’album compilation qui atterrira en ligne cette semaine.

Not Just a Girl représente également l’un des thèmes du documentaire, qui expose le sexisme que Shania Twain a combattu pour percer en musique country.

En début de carrière, alors qu’elle tentait de promouvoir son premier album, des animateurs de télévision louangeaient – d’abord et avant tout – sa beauté. « Vous êtes très jolie. » « C’est une très belle pochette de disque. »

PHOTO ALEXANDER HARBAUGH, FOURNIE PAR NETFLIX

Shania Twain sort cette semaine un album compilation accompagnant le documentaire, Not Just A Girl (The Highlights).

Le chanteur Orville Peck résume parfaitement le deux poids, deux mesures qui avait cours en 1992, quand Shania Twain a frappé aux portes de Nashville avec ses tenues sexy (qui montraient son nombril… scandale !) et son besoin d’autodétermination. « Johnny Cash s’en tirait en chantant des chansons sur l’abus de drogue et d’alcool. Le public l’acceptait. Mais quand c’était une femme, on voulait qu’elle présente de bonnes valeurs chrétiennes. »

« Tu dois travailler trois fois plus fort que n’importe quel autre homme », ajoute d’ailleurs Shania Twain devant l’objectif de Crowley.

Avec pudeur

Not Just a Girl est fort bien documenté. Les images d’archives abondent, comme celle d’une jeune Shania Twain de 11 ans qui participe à diverses émissions de télévision locales sans grand budget.

Plusieurs figures marquantes du parcours de l’artiste participent également au film, dont Mary Bailey, sa mentore et première agente, et Jon Landau, l’agent qu’elle a engagé après l’incroyable succès du disque The Woman in Me pour devenir une superstar internationale qui remplit des arénas.

Du côté des grosses pointures d’hier et d’aujourd’hui qui vantent ses mérites et soulignent son apport à l’industrie, on signale Kelsea Ballerini, Avril Lavigne, Diplo et Lionel Richie.

Malheureusement, Not Just a Girl aborde avec pudeur des sujets sur lesquels l’auteure-compositrice-interprète s’est pourtant déjà ouverte avec plus d’abandon.

Dans ses mémoires publiés en 2011, la chanteuse raconte avoir été agressée physiquement et sexuellement par Jerry, son beau-père. Elle n’y fait aucune allusion à l’écran, hormis une déclaration qu’elle laisse délibérément en suspens, qui nous laisse deviner qu’il était – au pire – colérique.

Dans son livre, Shania Twain détaille également beaucoup plus crûment l’enfer qu’elle a traversé quand son conjoint et partenaire d’écriture, Mutt Lange, l’a quittée. Dans Not Just a Girl, ce chapitre pourtant encore douloureux n’est qu’effleuré. La chanteuse semble déterminée à garder les choses légères.

À bien y penser, le documentaire aurait peut-être dû s’appeler A Girl Who Just Wants to Have Fun. Tant qu’à évoquer le répertoire d’une autre diva…

Not Just a Girl atterrit sur Netflix ce mardi