Ça tourne au Québec ce printemps. Pas moins de 19 séries de fiction sont actuellement en production.

« Il y en a plus qu’il n’y en a jamais eu », observe Nicola Merola, président de Pixcom, une importante boîte de production montréalaise.

Parmi les séries en chantier, sept proviennent de Radio-Canada, dont Fragments, de Serge Boucher (Fragile, Aveux), Les yeux fermés, dans laquelle Magalie Lépine-Blondeau interprète une professeure au secondaire déterminée à résoudre la mort d’un proche survenue 27 ans plus tôt, et Avant le crash, de Kim Lévesque-Lizotte et Éric Bruneau, dans laquelle ce dernier donne la réplique à Karine Vanasse, Émile Proulx-Cloutier et Mani Soleymanlou.

Les nouvelles saisons de Discussions avec mes parents, Plan B, avec Pier-Luc Funk, Doute raisonnable (depuis ce lundi) et Eaux turbulentes viennent compléter cette liste.

Du côté de TVA, on tourne cinq séries en cette deuxième semaine du mois de mai : L’échappée, Les moments parfaits, Alertes, la quotidienne Indéfendable, avec Sébastien Delorme et Anne-Élisabeth Bossé, et Anna et Arnaud, l’adaptation du roman de Francine Ruel, qui mettra en vedette Guylaine Tremblay et Nico Racicot.

Chez Club illico, les premiers tours de manivelle ont été donnés sur Portrait-robot et Nous.

Chez Noovo, la deuxième saison de … Moi non plus !, avec Catherine-Anne Toupin et Vincent Leclerc, est maintenant en tournage, tout comme Chouchou, la nouvelle série de Simon Boulerice (Six degrés) dans laquelle Evelyne Brochu campe une enseignante qui entretient une relation avec son élève de 17 ans (Lévi Doré).

PHOTO LAURENCE GRANDBOIS BERNARD, FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Catherine-Anne Toupin et Vincent Leclerc tournent actuellement la deuxième saison de …Moi non plus !

Télé-Québec s’inscrit au tableau avec Comme des têtes pas de poule, une nouvelle quotidienne familiale signée Pierre-Yves Bernard (Dans une galaxie près de chez vous). Pour sa part, Unis TV compte deux séries en tournage, Basket et Détox.

Au cours des prochaines semaines, quatre suites se mettront en branle : Les mecs (ICI Tou.TV), Sans rendez-vous (ICI Tou.TV), La vie compliquée de Léa Olivier (Club illico) et Club Soly (Noovo).

Viendront ensuite le drame d’espionnage IXE-13 (Club illico), Virage – Double faute (Noovo), Désobéir : Le choix de Chantal Daigle (Crave), À cœur battant (ICI Télé), Les perles (Club illico), Léo (Club illico), 5e rang (ICI Télé), Entre deux draps (Noovo), Bon matin Chuck (Crave), L’œil du cyclone (ICI Tou.TV) et surtout, la nouvelle quotidienne de Radio-Canada (au titre encore indéterminé) qui remplacera District 31.

Nouveaux acteurs

Comment expliquer cette surchauffe de tournages ? L’arrivée en grande pompe de Bell Média, qui commande dorénavant des séries pour Noovo et Crave, y est pour quelque chose, tout comme l’augmentation des investissements de Québecor dans les séries.

On peut aussi signaler le retour de Corus Média qui, après quelques années de silence, recommence à financer des fictions francophones. Plus tard au cours de l’été, KOTV tournera – pour Séries Plus – l’adaptation télévisuelle d’un roman de Jean-Philippe Baril Guérard, Haute démolition.

« Tous ces joueurs ont décidé d’en faire plus. C’est le résultat », commente Nicola Merola, de Pixcom (Anna et Arnaud, Indéfendable, Alertes).

« Le volume de production est énorme », note Louis-Philippe Drolet, principal gestionnaire de KOTV, la boîte derrière Plan B et L’œil du cyclone, notamment. « Avec l’arrivée des plateformes, ça fait en sorte qu’on produit plus que jamais. »

La pénurie de main-d’œuvre persiste

Malgré ce boom de tournages, les choses se déroulent somme toute rondement jusqu’à présent, nous racontent des gens du milieu. La pénurie de main-d’œuvre qu’on observait en 2021 continuera toutefois de poser des problèmes en 2022, surtout cet été, quand Montréal sera assailli de tournages américains, prévoit Sébastien Pigeon, directeur général et producteur exécutif chez Aetios (Les yeux fermés, Doute raisonnable).

« Les Américains sont capables d’offrir des conditions qu’on n’a pas les moyens d’offrir. Dans ce temps-là, les équipes sont plus difficiles à constituer. Ça crée du tiraillage pour aller chercher les meilleurs éléments. »

« La recherche de staff, les négociations, ça doit prendre deux fois plus de temps qu’avant, soutient Nicola Merola. Quand quelqu’un se fait offrir trois contrats en même temps, c’est sûr qu’il faut majorer les salaires pour l’attirer. »

Aujourd’hui, produire une série, c’est comme se chercher une maison à Montréal : ça coûte plus cher et c’est plus long.

Nicola Merola, président de Pixcom

Pour atténuer cette pénurie, le gouvernement du Québec a versé 900 000 $ à l’Association québécoise des productions médiatiques (AQPM) pour qu’elle mette sur pied un programme de mentorat pour former des directeurs des lieux de tournage, des régisseurs et des scriptes (personne qui assure la continuité des scènes et leur conformité au scénario).

« Ce sont des postes-clés pour lesquels il y a des besoins criants », indique la présidente-directrice générale de l’AQPM, Hélène Messier. Un appel de candidatures sera lancé au cours des prochains jours. « C’est l’une de nos priorités », affirme-t-elle.

Aussi, 400 000 $ ont été accordés à l’Institut national de l’image et du son (INIS) pour qu’elle forme une cohorte de 60 étudiants qui pourront se joindre, au cours des prochains mois, aux équipes de tournage dans trois types de postes : direction de production, comptabilité de production et coordination de production.

La COVID-19 toujours présente

Bien qu’on en parle beaucoup moins qu’à pareille date l’an dernier, la pandémie cause encore des maux de tête aux producteurs, qui doivent remanier les horaires chaque fois qu’un cas de COVID-19 émerge dans leurs équipes. Et lorsqu’un tournage est suspendu, ils doivent obligatoirement récupérer les journées manquées à l’intérieur du calendrier adopté au départ, parce qu’en raison du grand nombre de séries en production jusqu’à l’automne, au lendemain du dernier jour de tournage prévu, leurs acteurs et techniciens sont généralement engagés ailleurs.

« Tout le monde est tellement occupé… On n’a pas de latitude, soutient Louis-Philippe Drolet. Heureusement qu’on peut s’organiser entre producteurs, des fois. Mais ce n’est pas quelque chose qu’on avait besoin de faire avant. C’est un casse-tête. »