Elle a quitté le droit et un poste de procureur de la Couronne pour devenir actrice. Une décision vertigineuse, qui porte pourtant ses fruits. Catherine Souffront reprendra son rôle dans la troisième saison de la série L’œil du cyclone et vient de terminer le tournage du film 23 décembre. Portrait.

« Si tu le voulais vraiment, tu l’aurais fait. »

Catherine Souffront fixait avec un vague à l’âme les quatre murs de son bureau du palais de justice quand elle s’est remémoré cette phrase que sa mère lui avait dite des années auparavant. La jeune femme avait toujours caressé le rêve de jouer et de chanter, mais elle avait pris un autre chemin. Celui qu’elle croyait devoir prendre.

Son père et sa mère sont arrivés au Québec à l’adolescence. Ses grands-parents ont quitté la vie aisée qu’ils menaient en Haïti pour sécuriser celles de leur descendance. « Disons qu’il n’y a pas de comédien dans ma famille, lance Catherine Souffront. Les choses changent pour les immigrants, mais je dirais qu’un devoir de sacrifices se transmet de génération en génération. »

Catherine Souffront sentait qu’elle avait un certain « devoir » de réussite. Si bien qu’elle a obtenu un baccalauréat et une maîtrise en droit, en plus de passer ses examens du Barreau du Québec.

Ce n’était pas si contraire à sa nature. Catherine Souffront a une voix forte — sur plusieurs plans — depuis qu’elle est très jeune. Au secondaire, au Collège Sainte-Marcelline, Catherine Souffront a fait du théâtre et des comédies musicales avec la metteure en scène Suzanne Spagnol. Comme présidente de son école, elle devait répondre aux besoins des élèves, mais aussi monter des spectacles. « J’aimais tout ce qui touche à la créativité », raconte-t-elle.

La jeune Catherine était aussi engagée. Elle se souvient d’avoir écrit au premier ministre après avoir été choquée par un reportage sur l’adoption.

Catherine Souffront avait une soif de justice qui l’a menée au droit, mais qui l’a aussi désillusionnée du métier.

Pendant quatre ans, Catherine Souffront a été procureure de la Couronne au Directeur des poursuites criminelles et pénales. Elle était assignée aux — trop nombreux — dossiers de violence conjugale.

Or, un grand sentiment d’impuissance habitait la jeune femme qui rêvait d’une justice avec un grand J…

Elle se souvient aussi de l’amertume ressentie en regardant la première saison de La Voix, avec des candidats qu’elle avait croisés lors de concours de chant, dont le Gala Révélation.

Si bien qu’un jour, comme nous l’évoquions plus haut, Catherine Souffront contemplait les quatre murs de son bureau en se répétant ce que sa mère lui avait dit des années plus tôt : « Si tu le voulais vraiment, tu l’aurais fait. »

« Dans le fond, ma mère m’avait dit de vivre ma vie », confie-t-elle, assise devant nous dans un café du Quartier des spectacles.

Le grand saut

Catherine Souffront avait trop longtemps refoulé son rêve de vivre de la création, même si sa carrière comme avocate était en plein envol. Mais faire le grand saut était plus facile à dire qu’à faire. « Je viens d’une famille où la vie n’est pas supposée être facile. J’avais le privilège que ma vie soit assez facile… »

Catherine Souffront a mis en location le condo qu’elle venait de s’acheter. Elle a sollicité les conseils de celui qu’elle considère comme un mentor, Hubert Makwanda, qui est formateur à l’École nationale d’administration publique.

Ce dernier lui a dit d’écouter sa petite voix intérieure. « Il m’a demandé ce que je voulais faire. Je lui ai répondu : je veux écrire, je veux jouer, je veux chanter… et c’est ce que je fais aujourd’hui. »

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Rapidement, Catherine Souffront a trouvé une agente, Michèle Leclerc. Elle a obtenu des contrats de mannequinat pour joindre les deux bouts et a obtenu un petit rôle dans le film The United States vs. Billie Holiday, de Lee Daniels.

Sa première audition pour une œuvre de fiction en français était pour L’œil du cyclone. « Quand j’ai su que j’avais un premier rôle et que j’ai vu le cast, j’ai dit : mais c’est quoi, cette chance ? »

Ce n’est pas de la chance. Catherine Souffront est travaillante et elle sème les graines de son avenir. Alors qu’elle peaufinait son jeu aux Ateliers Fichaud, elle a rencontré la réalisatrice Miryam Bouchard. Deux semaines plus tard, elle était en audition pour le film choral de Noël 23 décembre et a obtenu un rôle aux côtés de Virginie Fortin, François Arnaud, Bianca Gervais et Stéphane Rousseau.

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Quatre membres de la distribution du film 23 décembre : Catherine Souffront, Bianca Gervais, Stéphane Rousseau et Sacha Charles

Elle ne peut toutefois nous en dire trop sur son personnage. « C’est une fille qui se choisit. » Comme elle.

Lisez un article sur le tournage du film

Essais et erreurs

Catherine Souffront a eu des rôles dans Doute raisonnable, L’effet secondaire, Sans rendez-vous et Bracelets rouges. Elle se réjouit d’être dans la distribution d’une nouvelle série jeunesse. « Je vais jouer une sirène qui chante. J’ai mon essayage demain ! Je suis tellement contente. »

On a pu apprécier le talent de chanteuse de Catherine Souffront dans l’émission En studio avec Marc Dupré et lors de la finale de la deuxième saison de L’œil du cyclone (lors de la scène du mariage).

« J’auditionne énormément en anglais et en français », souligne l’actrice parfaitement bilingue.

Comme scénariste, Catherine Souffront a aussi deux projets en chantier. Des choses fonctionnent, mais d’autres pas, signale-t-elle toutefois. Elle cite en exemple un projet musical qui n’a pas abouti, ou du moins pas encore. « C’est correct, des choses qui ne marchent pas, revendique-t-elle. Et c’est correct de changer de track. »

Catherine Souffront dit avoir une bonne étoile. C’est une chose d’avoir une bonne étoile, mais c’en est une autre de la trouver et de la suivre comme elle l’a fait.