La série documentaire À travers champs, présentée sur Savoir média, décortique l’agriculture québécoise et les enjeux soulevés par le système actuel. « L’agriculture, ce n’est pas que des choix alimentaires, souligne l’animatrice Marie-Claude Lortie, ce sont des choix de société. »

Des années durant, alors qu’elle était chroniqueuse à La Presse, Marie-Claude Lortie s’est intéressée à l’alimentation et à l’agriculture. Son objectif était d’en expliquer les grands enjeux de manière simple et concrète, afin d’aider les gens à faire des choix éclairés, selon leurs valeurs. D’où son enthousiasme lorsqu’on lui a proposé d’animer la série documentaire À travers champs. « C’est le genre de projet que j’aurais voulu faire [à la télévision] », dit-elle.

La série documentaire parle peu de l’assiette elle-même. Elle s’attarde essentiellement au mode de production de nos aliments, à la mécanique du système agricole, en fait. Il est question de la santé des sols, de la protection des terres cultivables, de spéculation financière, de la difficulté pour les jeunes intéressés par l’agriculture de se lancer avec peu de moyens, d’approches de l’agriculture qui tournent le dos au modèle industriel mis en place au cours des dernières décennies et de bien d’autres choses encore.

Très technique, tout ça ? Un peu. Or, l’animatrice, qui est aujourd’hui rédactrice en chef du quotidien Le Droit, guide le téléspectateur en posant des questions concrètes, qui montrent bien l’incidence des choix qu’on fait comme société et comme individu lorsqu’il est question d’alimentation. Elle est convaincue qu’informer le public est un geste essentiel pour « remettre l’agriculture à l’avant-plan des discussions politiques ».

Et l’agriculture, c’est de toute évidence politique, constate-t-on en regardant quelques-uns des épisodes de la série. Cette activité essentielle a un effet sur l’environnement, le développement des villes (bien des terres cultivables à Laval sont la propriété de promoteurs immobiliers qui espèrent obtenir un dézonage pour bâtir), des banlieues (étalement urbain) et la structure des noyaux villageois. À travers champs montre l’exemple du village de Saint-Camille, en Estrie, où le développement est pensé de manière à préserver les terres agricoles et à favoriser l’implantation de projets respectueux de la communauté.

Un monde de questions

Pendant des années, comme journaliste, Marie-Claude Lortie a posé des questions à des politiciens au sujet de l’agriculture. Elle a eu le sentiment que c’était perçu comme un sujet superficiel. « L’agriculture façonne notre paysage, nos sociétés et ce qu’on mange », fait-elle pourtant valoir. Seulement 5 % du territoire québécois est constitué de zones agricoles protégées, et 2 % de ces terres, parmi les meilleures, se trouvent dans la vallée du Saint-Laurent, là où s’exerce le plus de pression pour le développement urbain.

« C’est comme si on avait sous-traité ce dossier au ministère de l’Agriculture et à l’Union des producteurs agricoles », relève-t-elle. Or, en ne s’occupant pas plus d’agriculture, la population et les élus ont permis à l’industrie de s’immiscer dans certaines structures administratives et de favoriser des intérêts économiques qui ne vont pas forcément dans le sens du bien commun. Ce que souligne d’ailleurs le premier épisode de la série, où l’animatrice rencontre l’agronome Louis Robert, qui a maintes fois dénoncé la « mollesse » des autorités face à l’« ingérence » de l’industrie des pesticides et des engrais chimiques dans les affaires agricoles.

PHOTO ANDRÉ RAINVILLE, FOURNIE PAR SAVOIR MÉDIA

Marie-Claude Lortie anime la série documentaire À travers champs, diffusée sur Savoir média.

Comprendre la structure agricole, c’est comprendre qu’il y a des questions à se poser sur les pesticides et les fertilisants, ce qui soulève aussi des questions sur la santé et l’environnement.

Marie-Claude Lortie, animatrice d’À travers champs

Elle ne rejette pas le blâme sur les agriculteurs. « Ils ne se lèvent pas le matin en se disant qu’ils vont polluer et se rendre malades en utilisant des pesticides. Ils pensent que c’est la façon de faire, constate-t-elle. Ils veulent nourrir le monde, tirer un revenu décent. » La recherche indiquant d’autres façons de faire existe, dit-elle, mais il faut qu’elle soit disponible et transmise. La série propose d’ailleurs des pistes de solution applicables à petite et à grande échelle pour améliorer les choses.

Marie-Claude Lortie cite l’exemple d’une ferme de la Montérégie qui a entrepris, il y a 25 ans, un virage vers l’agriculture biologique en pratiquant aussi une diversification de sa production. Une approche favorable à la préservation des sols et de la biodiversité, et de plus en plus rentable. « Il faut poser des questions », résume l’animatrice. Ensuite, « à chacun de faire ses choix en fonction de ses valeurs ».

À travers champs, les jeudis à 21 h, sur Savoir média. Les épisodes sont aussi offerts en ligne.

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