Le crime ne paie pas… sauf pour les scénaristes. Prenez François Létourneau. Après Série noire, l’auteur s’était juré de prendre une pause de la télévision, afin d’élaborer des projets pour le cinéma. Or, quand lui est venue l’idée d’écrire sur deux couples de banlieue qui battent de l’aile, il en a fait des meurtriers d’une organisation criminelle qui sème la terreur dans la région de Québec.
Alors, il s’est dit qu’il devait écrire pour la télévision. Le scénariste a mis sur la glace son projet de film pour plonger dans C’est comme ça que je t’aime. Une série qui a connu un énorme succès, tant populaire que critique.
La Presse a joint l’auteur il y a quelques jours, après qu’il eut tourné ses premières scènes de groupe avec ses amis acteurs de la saison 1. « On était très contents de se retrouver, car, comme tout le monde, on ne s’est pas vus depuis 16 mois. On était aussi un peu nerveux, parce qu’il y a des attentes pour cette nouvelle saison. Mais c’est une nervosité positive. »
L’action de la nouvelle saison débutera un an plus tard, à l’été 1975. Elle englobera des enjeux plus sombres et complexes, selon Létourneau, mais la série restera très drôle. « Même si je le voulais fortement, je suis incapable d’évacuer la comédie dans mon écriture. C’est comme pour ma personnalité, je suis pogné avec. »
Une série d’époque
Quand l’auteur a commencé à écrire cette série, il y a trois ans, tout le monde lui disait qu’il ne pouvait pas faire une série dans les années 1970.
« Parce que selon eux, dans le contexte actuel de la télé, ma série n’aurait jamais été financée, explique-t-il. Mais j’ai insisté auprès de ma productrice, Joanne Forgues, en lui disant que l’époque était importante, que ce n’était pas une série contemporaine. Et elle est allée chercher l’argent et les bonnes personnes pour reconstituer l’époque du milieu des années 1970, sans les gros moyens du cinéma. »
Produire une nouvelle saison permet à l’auteur d’ajouter une couche de complexité aux personnages.
Comme le public les connaît déjà, j’aime emprunter d’autres directions. J’ai la volonté de ne pas refaire la même chose, et même de prendre une direction opposée pour surprendre le spectateur.
François Létourneau, auteur et comédien de la série C’est comme ça que je t’aime
Létourneau ajoute qu’il voit C’est comme ça que je t’aime comme une trilogie, bien que la saison 3 n’ait pas encore été confirmée par Radio-Canada, son diffuseur.
Les Delisle et les Paquette vont donc reprendre les activités de leur organisation établie à Sainte-Foy, durant les vacances des enfants. Huguette est devenue la caïd en chef du clan. Après avoir cru se rapprocher dans la criminalité à l’été 1974, le clan va imploser. « De prime abord, c’est une série sur la criminalité, je m’amuse bien avec les scènes de crime. Mais pour moi, c’est plus une histoire sur les difficultés dans leurs couples », explique l’auteur, père d’un adolescent de 13 ans.
Huguette Delisle réalise qu’avec son don pour le crime viennent aussi bien des malheurs. « Plus la saison avance, plus elle va découvrir une nouvelle menace, car la mafia montréalaise s’intéresse au territoire de Sainte-Foy, explique Létourneau. Sa démarche criminelle va diviser son couple, au lieu de les rapprocher comme elle croyait. Elle constatera que la criminalité n’est pas nécessairement une bonne solution pour régler ses problèmes conjugaux [rires]. »
Un personnage qui marque l’imaginaire
Pour Marilyn Castonguay, Huguette Delisle représente un beau défi d’actrice. « Le personnage a marqué l’imaginaire du public. Je ne me suis jamais fait autant parler d’un rôle en carrière. On reprend son image dans des mèmes sur l’internet. Huguette a même fait sauter l’année 2020 dans la rétrospective de fin d’année d’Infoman. »
Comme 1975, c’est aussi l’Année internationale de la femme, les personnages féminins vont s’émanciper. « Huguette se cherche au début, mais elle change et elle s’affirme davantage », ajoute Marilyn Castonguay.
Elle est la caïd et elle vient d’accoucher de son bébé. Elle a aussi un côté plus sombre, sanglant, mais elle doit rester cette femme de banlieue, naïve.
Marilyn Castonguay, interprète d’Huguette Delisle dans la série C’est comme ça que je t’aime
François Létourneau est aussi heureux d’enfiler le veston et la moustache de son personnage, Gaétan Delisle « Dans toutes mes séries, et aussi dans mes pièces de théâtre, il y a toujours deux pôles de la masculinité que j’aime explorer dans ma démarche d’écriture. D’un côté, un personnage un peu maladroit et sensible, qui est comme une partie déformée de moi-même. Un genre d’alter ego que j’ai envie de jouer. Puis, il y a son contraire : un personnage macho et plus rustre que je donne à Patrice [Robitaille], parce qu’il est mon meilleur ami et on adore ça travailler ensemble. »
La saison 2 sera coréalisée par Jean-François Rivard et l’auteur, comédien et réalisateur Robin Aubert. Rivard étant le père d’un jeune bébé, il voulait avoir plus de temps avec sa famille cet été. Les 10 épisodes de la saison 2 seront diffusés d’abord en ligne, sur ICI Tou.tv Extra en 2021-2022. En France, la série originale est offerte sur Salto, la plateforme de vidéo à la demande lancée en octobre dernier par TF1, France Télévisions et M6.