Un évènement majeur à la télé québécoise a glissé sous le radar populaire, et c’est impardonnable, vraiment. Je parle bien sûr du retour en ondes de la fascinante docuréalité Si on s’aimait à TVA, qui a été le divertissement pandémique par excellence l’an passé, mais pour toutes les mauvaises raisons du monde.

Participant qui rote, crise du fromage Doré-Mi, grandeur nature catastrophique, plus laide chambre d’hôtel du Canada, attaque de moustiques voraces, ciseaux de la mort, pentacle maléfique, abus du mot « chochotte », unions malheureuses forcées, spectre d’un époux fantôme : la première édition de Si on s’aimait s’est déployée comme un déraillement de train au ralenti, dont chacune des secondes a été délicieusement gênante.

L’absence de pudeur des cobayes qui participent – avec beaucoup d’enthousiasme – à ces émissions m’étonnera toujours. En quelques minutes, ils dévoilent les moindres détails de leur passé conjugal, leurs peurs, leurs préférences sexuelles, leurs patterns amoureux, bref, toute leur histoire personnelle défile sous nos yeux, entre deux publicités de JC Perreault.

La deuxième saison de Si on s’aimait, qui a démarré lundi à 19 h sur les ondes de TVA, n’a pas échappé à cette incursion hyper rapide dans l’intimité des trois célibataires pivots de 2021, tous à la recherche d’une douce moitié. Sauf que cette fois-ci, j’ai l’impression que Si on s’aimait fera œuvre utile, notamment grâce à la participation de Sébastien, 35 ans, chanteur professionnel et premier concurrent gai de la série.

PHOTO FOURNIE PAR DUO PRODUCTIONS

Sébastien, 35 ans, est le premier concurrent gai de la série Si on s’aimait. On le voit ici en discussion avec la sexologue Louise Sigouin.

Après avoir repéré Gabriel parmi ses six prétendants, Sébastien a rapidement dévoilé une autre information à son sujet, par souci de transparence. Il est séropositif, indétectable, a-t-il précisé. Ça ne paraît peut-être pas, mais le fait de parler de séropositivité et d’intransmissibilité du virus dans une téléréalité Cupidon diffusée en heure de grande écoute, c’est un énorme pas franchi.

Pendant Big Brother Célébrités sur Noovo, Rita Baga a également enfilé un t-shirt sur lequel on pouvait lire : indétectable = intransmissible. Pour résumer grossièrement, cela signifie qu’une personne qui a contracté le VIH, qui prend sa médication et qui se soumet régulièrement à des analyses sanguines, n’a pratiquement plus aucun risque de contaminer son partenaire.

La réaction de Gabriel, 28 ans, à la confidence de Sébastien a été parfaite : « Ça ne me fait pas peur. » Et les confessions ne se sont pas arrêtées là. Gabriel a renchéri : « Je me considère dans le spectre de l’asexualité – si tu recherches un fuck friend, ce n’est pas moi. »

Les 540 000 téléspectateurs de Si on s’aimait ont ainsi été exposés à des sujets encore drapés de tabous et de préjugés. Ça prenait beaucoup de courage à ces deux jeunes hommes pour se livrer ainsi au jugement du public.

Avec son décor plus chaleureux, moins de type « condo modèle dans Griffintown », Si on s’aimait s’annonce plus solide et mieux construit que l’année dernière. La sexologue Louise Sigouin a mis la pédale douce sur son concept de dualités, qui limitait la pertinence de ses interventions. Car tout ne se résume pas à des concepts noirs ou blancs dans une relation.

La seule femme du trio, Brigitte, agente de probation de 53 ans, est celle qui a provoqué le plus de commentaires enflammés jusqu’à présent. Les fans de Si on s’aimait lui ont reproché de vouloir changer Carlos, 47 ans, celui qu’elle a choisi pour poursuivre cette expérience socioaffective.

Au pique-nique, le besoin de contrôle de Brigitte a été irritant. Regarde la nappe, regarde, regarde, regarde ! As-tu vu le fromage ? Regarde le fromage, regarde, regarde, regarde ! Une casquette portée à l’envers, c’est laid !

Il y a une limite entre « savoir ce que l’on veut » et imposer ses goûts et ses désirs à son partenaire. Il est bien patient, ce Carlos. D’autant que dans Si on s’aimait, les nouveaux couples se fréquentent, se présentent leurs enfants, cohabitent et partent en voyage dans l’œil de la caméra. Mettons que ça va vite en titi.

Guillaume, manœuvre en maçonnerie de 31 ans, clive moins. Il est le seul à avoir demandé une deuxième ronde après la première séance de speed dating. En voyant la photo de l’une de ses soupirantes, Guillaume a cependant lancé : « Ouin, y a de quoi à faire avec ça », « ça » étant une jolie jeune femme. Ce commentaire a très mal passé. Avec raison. C’était pas fort.

À la coanimation, Guillaume Lemay-Thivierge et Emily Bégin continuent d’analyser les rencontres comme nous le faisons, sur nos sofas. J’aime le regard bienveillant qu’ils posent sur les participants. Leurs interventions paraissent moins plaquées, plus naturelles.

Et il y a Louise Sigouin, qui perce toutes les carapaces. La séance qu’elle a eue avec Carlos à propos de l’infidélité de son père a été révélatrice.

C’est bien d’avoir des éléments plus costauds dans les demi-heures quotidiennes. Mais il ne faudrait pas non plus nous priver de moments d’hygiène corporelle douteuse, s’il vous plaît.