« Je suis tellement fier. » « Tu as toutes les raisons de l’être, mon fils. » Générique de fin sur une musique à la fois mélancolique et remplie d’espoir.

Lundi, la sécheresse oculaire, une calamité aussi grave que la mycose des ongles, a connu un répit, entre 20 h et 21 h, pendant l’émouvante finale de la minisérie Mon fils à TVA. Et personne ne blâmera les allergies saisonnières pour tous ces yeux humides, bouffis et rougis.

Si vous n’avez pas encore regardé cet épisode chargé, l’alerte au divulgâcheur hurle ici comme un loup dans la tête de Jacob (bouleversant Antoine L’Écuyer).

La scène où la maman Marielle (Élise Guilbault) a enfin pu étreindre son Jacob, après des mois d’incompréhension et de douleur, m’a cassé en deux. C’était joué avec finesse et filmé avec pudeur par la réalisatrice Mariloup Wolfe, qui a fait un sapré beau boulot sur Mon fils.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE TVA

Antoine L’Écuyer dans Mon fils

Le format de six épisodes convenait parfaitement à cette série de TVA. En dix heures, les auteurs Anne Boyer et Michel d’Astous auraient dilué et étiré inutilement leur sujet, soit le dur impact de la maladie mentale sur une famille aimante.

La descente aux enfers du cégépien Jacob, provoquée par la schizophrénie, puis sa lente remontée ont été racontées avec doigté et sensibilité. Ç’aurait pu être super cliché, les voix dans la tête de Jacob, les hallucinations de loup, les psychoses, mais le jeune acteur a été tellement convaincant et brillant que son voyage en montagnes russes nous a attrapé le cœur dès le début. Le trophée Gémeaux remporté à la mi-septembre par Antoine L’Écuyer n’a pas été volé, seigneur non.

Revoyez le premier épisode et l’avant-dernier, et comparez la lueur dans les yeux du comédien. Tout passe dans son regard, de plus en plus sombre, jusqu’à la naissance de son fils, où la brillance revient. C’est impressionnant.

Élise Guilbault a habilement transmis le sentiment de culpabilité de cette mère, de même que son impuissance face au rejet de cet enfant qu’elle a continué d’aimer, malgré les crises, les reproches et le témoignage en cour contre son fils, qui a dû lui broyer l’intérieur.

Les impacts de la maladie de Jacob sur sa jeune sœur Laurence (Émilie Bierre) ont aussi été efficacement montrés, parfois par des actes violents ou, de façon plus sournoise, par la mise à l’écart de la cadette par ses parents.

Le suicide de Raïd (Mehdi Bousaidan) a rajouté une couche de dureté à cette œuvre très frontale – et très honnête – dans son approche de télé-vérité. Voici ce qui se passe quand un jeune homme sombre. Pas question d’arrondir les angles.

La finale de Mon fils a été regardée par 818 000 téléphages, sa plus forte audience de l’automne, qui lui a permis de détrôner Une autre histoire (737 000) à Radio-Canada.

Pour ceux qui ont posé la question, non, Mon fils n’aura pas de suite. J’ai demandé mardi aux scénaristes s’ils planchaient sur un nouveau projet similaire pour TVA ou le Club illico. Aucune réponse. Honnêtement, ça ne me dérange plus d’être ignoré par des collaborateurs du Groupe TVA. On s’habitue à tout.

Je trouve ça dommage pour vous, chers lecteurs et téléspectateurs. Vous me posez des questions, que je relaie ensuite aux artisans concernés. En refusant de me parler, ces gens vous snobent et vous méprisent. C’est un manque de respect envers leur public, qui n’a rien à voir avec moi. Fin de la parenthèse.

PHOTO RÉPÔ, FOURNIE PAR ICI RADIO-CANADA TÉLÉ

Pierre-Luc Funk (Dominic) dans Fragile

Toujours lundi soir, la série Fragile a diffusé la fameuse scène qui sert de clé pour comprendre l’amitié (et peut-être plus) qui lie Dominic (Pier-Luc Funk) et Félix (Marc-André Grondin). Encore ici, si cet épisode, le sixième sur un total de 10, dort dans votre enregistreur, l’alerte au divulgâcheur tinte comme la cloche du restaurant de Cynthia (Sandrine Bisson) et Nancy (Valérie Blais).

Donc, si Dominic consulte un médecin spécialiste montréalais, c’est parce qu’il est hermaphrodite, un « secret » que seule sa maman Cynthia connaissait. D’où cette proximité extrême entre la mère et le fils.

C’est à la toute fin de l’heure que Dominic, après être accidentellement tombé dans la piscine intérieure des Lanthier, a montré son corps nu à Félix. Jusqu’à ce moment charnière, amené en douceur et sans jugement, je pensais que Dominic était peut-être eunuque ou gai ou en transition, mais l’hermaphrodisme ne m’avait pas effleuré l’esprit.

Cette révélation nous a permis de comprendre l’absence de sexualité et d’intimité corporelle entre Dominic et sa copine Kim (Juliette Gosselin). Attendez maintenant de voir la suite.

J’ai dévoré Fragile il y a un an sur l’Extra de Tou.tv et je redécouvre la justesse des dialogues de Serge Boucher, les beautés rugueuses de l’hiver et le talent de ses interprètes.

Si Netflix avait manufacturé Fragile, la planète entière crierait au génie.