Une dizaine d’humoristes participeront ce jeudi, en direct sur les ondes de Z Télé, à un bien-cuit qui fera office de défouloir collectif contre la COVID-19. Entrevue avec l’humoriste et animateur de la soirée Roast COVID-19, Alexandre Barrette, sur le potentiel et les limites de cette formule.

Le « roast » oppose normalement deux personnes. Pourquoi avoir décidé de faire une soirée d’humour autour la pandémie en utilisant la formule du bien-cuit ?

Les producteurs [de l’émission Roast Battle : le duel] voulaient faire un événement. On a repris la marque du roast battle, mais ce ne sera pas tout à fait comme les roasts qu’on connaît. On veut faire un bien-cuit à la situation collective ; c’est un défoulement collectif, avec un type d’humour qui va parfois écorcher un peu, selon les humoristes et selon les thèmes choisis. […] Chacun aura son angle. Moi, je commence avec un cinq minutes de stand-up. Je veux faire du bien aux gens, je ne veux attaquer aucun individu. J’écorche au passage quelques personnes, quelques projets télé, à la manière du roast. Et dans mes présentations, j’écorche aussi mes camarades [Yvon Deschamps et Judy Richards, Laurent Paquin, Marie-Lyne Joncas, P-A Méthot, Adib Alkhalidey, Christine Morency, Maxim Martin, Sébastien Dubé, Billy Tellier, Sam Breton, Pierre-Yves Roy-Desmarais] au passage. On va retrouver cette couleur-là dans mes interventions. Ensuite, selon l’humoriste, ce sera parfois plus touchant et sensible, d’autres fois plus cru.

Des exemples ?

On parle de la COVID-19, de la situation actuelle. Je me suis gardé vierge des textes pour réagir spontanément, mais je sais par exemple qu’Adib parle du fait qu’il lui a été difficile de convaincre sa mère de ne pas sortir, malgré son âge. Christine Morency parle du fait que c’est difficile d’être confinée en étant célibataire et de ne pas avoir quelqu’un dans sa vie pour traverser cette période. Laurent Paquin va faire une chanson un peu sarcastique, ultra-crue. Pour Billy Tellier, ce sera plus politique. Tout le monde aborde la pandémie ou le confinement différemment.

Puisque les tournages en studio sont presque impossibles depuis le début du confinement, tout le monde se filmera chez soi ? 

Oui. Mais ce sera à la manière d’une émission télévisée et pas comme un live Instagram. Tout le monde fera son numéro de son salon ou de sa cuisine, mais ce sera fait en tenues de soirée, un petit verre à la main. Ce sera une prestation. Même le réalisateur et monteur travaille de chez lui. Ce qui est un défi technique dont je ne comprends même pas l’ampleur. […] Moi, je vais toujours être à l’écran. Parce que l’humour est un art interactif avec le public, qui crée le rythme avec ses rires. Je vais un peu jouer ce rôle-là. Certains humoristes vont être ajoutés à l’écran ponctuellement pour qu’on voie leur réaction. Il y aura toujours une ou deux personnes, dont moi, pour soutenir la personne en train de performer. On pourra entendre nos rires… ou nos silences, si ce n’est pas drôle !

L’idée de rire de la situation actuelle reste au cœur de l’émission. Est-ce qu’il a fallu poser des balises, lorsque le concept a été élaboré, pour éviter de dépasser certaines limites ?

Les textes ont été supervisés par un auteur, par Z et ses avocats. Vu que c’est en direct, il fallait qu’ils s’assurent que tout [puisse être diffusé]. Pour l’émission Roast Battle, ils ont le luxe du montage. En direct, il faut faire attention. C’est un sujet délicat. S’il était mal abordé, ce serait une catastrophe. Il y a des gens qui décèdent, des gens qui vivent un deuil, des gens qui paniquent parce que la fin du mois arrive et qu’ils ne pourront pas payer leur loyer. Il y a de la tragédie dans tout ça. Je pense que l’humour peut aller dans les deux extrêmes : si c’est mal fait, ça peut être très laid ; mais bien fait, selon moi, c’est magique.

Justement, quelle est l’importance de l’humour en ce moment, à vos yeux ?

Quand c’est fait avec cœur, avec de belles intentions, quand c’est travaillé et peaufiné avec rigueur, l’humour peut être le plus bel exutoire. Le but n’est pas de choquer [ce jeudi soir]. Le but, au contraire, c’est de faire du bien aux gens qui sont, pour certains, seuls chez eux depuis des semaines. […] Dans toutes les périodes plus difficiles de ma vie, l’humour a été présent. Ça m’a toujours aidé. Je trouve que ça a toujours sa place quand c’est bien fait. […] Le but de la soirée Roast COVID-19, ça va être de rire de façon collective. Je pense qu’il y a quand même place à rire de certaines choses et que ce rire fasse du bien à certaines personnes, même celles qui sont touchées par ça.

Sur Z Télé ce jeudi soir, 21 h.