En cette époque frileuse où une seule plainte suffit pour effacer un épisode de La petite vie de Tou.TV, le service Crave ne prend aucun risque avec les vilains garnements de RBO. Deux avertissements très clairs précèdent les 20 épisodes de Rock et Belles Oreilles : The Archives, en ligne depuis mardi pour célébrer les 40 ans de ce groupe mythique.

Le premier, super formel, rappelle que le style d’humour de RBO risque de ne « pas convenir à tous les auditoires » et que certains « sujets pourraient offenser » des téléspectateurs. Le deuxième répète le même message, mais en blague. Du genre : cette émission ne renferme aucun sketch socialement acceptable. Nous voilà prévenus.

Ces mises en garde suffiront-elles à calmer les indignés permanents, toujours prêts à grimper dans les rideaux même s’il s’agit de stores verticaux ? Espérons que oui.

Car les trois épisodes des « meilleurs moments » de RBO que j’ai vus lundi m’ont fait drôlement rigoler. Le matériel, puisé dans les réserves de TQS entre 1986 et 1988, a assez bien vieilli. En fait, Rock et Belles Oreilles : The Archives s’adresse aux fans, comme moi, qui ont tripé fort sur les parodies et sketches fabriqués par Guy A. Lepage, Bruno Landry, André Ducharme, Yves P. Pelletier, Richard Z. Sirois et Chantal Francke, ne l’oublions pas, car elle a été formidable. C’est un puissant catalyseur de nostalgie.

Comme la matière d’origine date d’une trentaine d’années, bien sûr qu’elle contient des gags douteux sur les gais, les handicapés, les communautés ethniques (combien de Japonais se font hara-kiri dans RBO ?) et même les personnes trans. En toute honnêteté, je m’attendais à bien pire.

Ce qui frappe en revoyant les épisodes, c’est à quel point RBO fessait là où ça fait mal, en une phrase acide ou une image-choc. Les membres du groupe relevaient les moindres travers dans les pubs, les séries télé ou chez les vedettes et les exploitaient avec une méchanceté à la limite de la diffamation.

Cet aspect ne passerait plus aujourd’hui : les commentaires gratuits sur le physique des gens ou leur orientation sexuelle. Aussi, toute critique acerbe d’un annonceur, genre le WcDonald’s pas mangeable, le papier de toilette Mottonnelle qui torche bien ou le fromage Kraft qui empoisonne les mulots, ça n’aboutirait jamais, mais jamais en ondes. On ne crache plus dans la canette de boisson qui remplit les coffres de la station.

PHOTO FOURNIE PAR CRAVE

Les membres de RBO

Reste que dans la catégorie des pastiches décapants, personne n’a encore battu RBO à ce jour. Avec bonheur, j’ai revu Snappe pis Bourdonne (Linda Hébert, langue de vipère !), En plein temps, Zizanie (le Dynasty des pauvres), le mini-putt avec Ben Bigras et Danny Legros, les disques de Gammick International, Nicole Simard à Ciné-Quiz (et ses 12 paires de lunettes), le jeu Action Contraction, Parler pour rien dire avec Janette et Violette ainsi que le film Kenny (Seigneur !).

Le sourire étampé au visage, j’ai renoué avec le chef Groleau et son crastillon, le détective privé Jack Travis, le hockeyeur Stéphane Richer qui se pète des boutons d’acné, les pubs de Jésus-Christ, la réclame de John Labette Classique avec Andrée Lachapelle, celle de la fondue Swiss Knight avec la famille Slomeau et les saynètes de Dans le bon vieux temps ça s’passait d’même, qui font passer Séraphin pour un grand mécène.

Oui, c’est niaiseux, vulgaire, scatologique, mordant, pas gentil, mais maudit que ça fait du bien de rire et de décrocher de la pandémie. Dire qu’il me reste 17 épisodes de 40 minutes à visionner pendant le temps des Fêtes. Merci la vie, gratitude, reconnaissance, vie de blogueur, namasté.

L’heure des comptes

Mais pourquoi les concurrents d’Occupation double ont-ils attendu L’heure de vérité pour se parler dans le chapeau de pêcheur, hein ? Les dernières semaines dans les maisons de la Montagne coupée ont été ennuyeuses et le couple qui osait déroger à la ligne du parti — on est une belle famille, on s’aime tellement, bro ! — se faisait quasiment noyer dans le spa.

Dimanche soir, sous les auspices de Jay Du Temple, Julie-Anne a enfin confronté Kevin qui l’a sortie du jeu, Naadei et Marjorie ont croisé le fer sans s’écouter l’une et l’autre, Jordan a quasiment traité Jamie de guenille et Noémie s’est vidé le cœur à propos de Charles, qui l’a prise en grippe au début de l'aventure.

Et contrairement à ce qu’il avait annoncé à la table d’élimination, Jay Du Temple a été doux et bienveillant envers Éloïse, qui a reçu des menaces de mort et des incitations au suicide après sa sortie d’OD. Sage décision. Ce n’était pas le temps de rajouter une couche de blâme sur Éloïse, qui traverse une période plus difficile que « rocamboulesque », mettons.

Tout comme Charles. La pire période de sa vie, a-t-il dit les yeux dans l’eau. Les réseaux sociaux ont été impitoyables envers l’ancien couple chouchou, tombé en disgrâce en raison d’un Roku et d’un chapeau de leader.

L’heure de vérité d’Occupation double a rallié 709 000 fans, ce qui la place en troisième place du palmarès dominical, derrière Tout le monde en parle (1 129 000) et Vlog (735 000). Le TVA 18 h (628 000), Découverte (595 000) et Le Téléjournal de 22 h à Radio-Canada (564 000) ont mieux fait qu’En studio (550 000) et Bijoux de famille (513 000).